Habitat - Quels effets des réformes territoriales sur les politiques locales de l'habitat ?
Le Réseau des acteurs de l'habitat organisait, le 4 février à Paris, une journée destinée à discuter des conséquences les plus probables des réformes en cours sur les politiques locales de l'habitat. Environ 150 personnes issues des collectivités territoriales et organismes HLM étaient présentes. A la tribune le matin - la partie de la journée à laquelle nous avons pu assister -, des représentants des associations d'élus (ADF, ADCF, Acuf), puis une table ronde au cours de laquelle sont intervenus notamment Thierry Repentin, le président de l'Union sociale pour l'habitat (USH), et Etienne Crépon, le directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages au ministère de l'Ecologie. Tour d'horizon des principaux thèmes abordés.
L'essentiel sur la fiscalité locale et l'évolution du budget logement
Deux exposés synthétiques ont ouvert la journée : l'un sur la réforme de la fiscalité locale (Claire Delpech, ADCF), l'autre sur l'évolution du budget logement (Michel Amzallag, USH). Nous vous conseillons la lecture de leurs Powerpoint qui donnent une vue d'ensemble rapide sur ces deux questions pour le moins complexes (sur le site des acteurs de l'habitat). Ainsi, par exemple sur le budget logement, la comparaison entre la répartition des aides à la pierre en 2009 et en 2010 permet de comprendre que la baisse de la subvention unitaire par PLUS (de 2.700 euros à 1.000 euros) a permis d'abonder l'enveloppe surcharge foncière (p.7). Autre point très instructif, le résumé en un seul tableau du coût des principales aides fiscales au logement (prêt à taux zéro, loi Tepa, TVA à 5,5%, etc). Enfin, à regarder également, le plan de financement moyen pour une opération PLUS en 2008, avec le montant des différentes aides publiques. Un retour aux fondamentaux bien utile après les combats de chiffres de ces derniers jours.
Renforcement de l'échelon intercommunal
Si l'ensemble des intervenants se sont dits "dans l'incertitude" sur les conséquences précises des réformes, un point semble faire consensus : la montée en puissance de l'échelon intercommunal. Un mouvement de fond, dans la continuité de l'institution de la délégation des aides à la pierre en 2004. Ainsi, Thierry Repentin s'est félicité des dispositions du Grenelle 2 qui conduisent à la mise en cohérence des Scot, des PLH et des PLU. Il s'est également prononcé en faveur des PLU intercommunaux, espérant que la porte ouverte par le Sénat cet automne ne sera pas refermée par l'Assemblée au printemps (le projet de loi Grenelle 2 est actuellement en cours d'examen en commission, voir nos articles ci-contre). Autre point positif, le "pôle métropolitain", un outil "utile", qui favorisera la mise en cohérence des différents Scot sur une agglomération.
Pour sa part, Olivier Landel (Acuf) a jugé que le nouveau statut de métropole ne devrait pas changer grand-chose pour l'habitat, le Sénat ayant revu nettement à la baisse les ambitions affichées initialement. Il a ajouté qu'il faudrait bien dans les mois à venir définir les conditions d'une véritable prise de compétence habitat au niveau intercommunal. Sur ce point, à l'Acuf, on s'interroge : ne vaudrait-il pas mieux parfois un "transfert" net (et surtout compensé financièrement) plutôt qu'une délégation sans compensation ? Du côté des départements, on constate la diversification des interventions sur le secteur du logement depuis 2005 : fonds de solidarité pour le logement (FSL), foncier, accession sociale (voir notre article ci-contre du 15 octobre). Quant à savoir si, avec ou sans clause de compétence générale, les départements pourraient se désengager de ces politiques, "on voit mal comment", notamment en raison de leur compétence sociale… mais quid des offices départementaux ? Sur ces points, "on est dans le flou", estime Augustin Rossi (ADF).
Millefeuille, compliqué mais utile ?
Si le mot d'"intercommunalité" était dans tous les discours, personne n'a oublié l'Etat : son "désengagement financier" inquiète naturellement (par exemple sur les aides à la pierre, ou le financement des opérations programmées d'amélioration de l'habitat). Mais Didier Marie (Seine-Maritime) a indiqué qu'en dépit de ce désengagement, l'Etat "tentait de reprendre systématiquement la main". Qui doit alors piloter les politiques de l'habitat ? Pour le représentant du ministère de l'Ecologie, pas de doute : l'Etat est garant de la mise en œuvre du Dalo, il a donc un rôle et une place "incontournables"… mais, a-t-il ajouté, "la mise en œuvre ne peut se faire qu'en partenariat avec les collectivités et les organismes HLM". Un partenariat avec l'ensemble des niveaux de collectivités, a ajouté Thierry Repentin, se livrant à un éloge du fameux millefeuille territorial. Une participante a cependant signalé que sur le plan pratique, le millefeuille n'avait pas que des avantages : la multiplication des dossiers de demande de financement est un problème au quotidien pour les organismes. Un problème pratique, qui, estime le président de l'USH, pourrait être résolu par le développement des guichets uniques tout en maintenant la diversité des sources de financements.
Hélène Lemesle