Réforme des collectivités - Création des métropoles : le Sénat donne son feu vert et pose des garde-fous
Les sénateurs ont adopté, le 2 février, la création des métropoles prévue par la réforme des collectivités territoriales, au terme d'un long débat qui a porté sur l'autonomie fiscale des communes au sein de ces nouveaux établissements publics de coopération intercommunale. Le texte d'origine prévoyait que le pouvoir de lever l'impôt des communes était transféré à la métropole. Celle-ci percevait toutes les taxes et les redistribuait à ses communes. La commission des lois, saisie au fond lors de son examen du texte, avait supprimé cette intégration fiscale et rétabli l'autonomie fiscale des communes. Mais, mardi, la commission des finances a présenté en séance un amendement visant à rétablir le texte d'origine du gouvernement. S'en est suivie une discussion au cours de laquelle la majorité s'est divisée et les deux commissions, lois et finances, se sont affrontées. Finalement, l'amendement de la commission des finances, soutenu par le gouvernement, a été rejeté massivement par la gauche, mais aussi par quasiment toute la majorité qui a suivi le rapporteur du texte Jean-Patrick Courtois.
Avec le maintien de l'autonomie fiscale des communes, "il faudra [aux villes françaises] des décennies pour rattraper les autres grandes villes européennes", a soutenu Charles Guené. De son côté, Jean-Pierre Fourcade a mis en avant les progrès en terme de justice pouvant naître d'une plus grande intégration fiscale. Tous les opposants à l'amendement de la commission des finances ont estimé, eux, qu'il programmait la disparition des communes.
Garanties pour les fonctionnaires
Les sénateurs ont aussi veillé au respect des communes en introduisant la notion d'"intérêt métropolitain", qui permettra aux communes membres des métropoles de conserver la gestion des équipements de proximité, qu'ils soient culturels, sportifs ou de loisirs.
Parallèlement aux mesures visant à protéger les communes, les sénateurs ont donné des garanties aux agents des communes, des départements et des régions appelés à être transférés à la métropole. Après l'adoption d'un amendement du groupe communiste, le projet de loi dispose que "les fonctionnaires conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable ainsi que [leurs] avantages acquis".
Les métropoles regrouperont des communes d'un seul tenant et sans enclave représentant plus de 450.000 habitants. Les huit villes les plus peuplées (Lyon, Lille, Marseille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Nice et Strasbourg) pourront ainsi accéder à ce statut. Elles exerceront des compétences plus vastes que celles des actuelles communautés urbaines et certaines des compétences exercées par les départements et les régions leur seront transférées.
Nouveaux seuils pour la création des communautés d'agglomération
Les sénateurs ont aussi adopté la création de pôles métropolitains. Ces établissements publics doivent permettre à plusieurs intercommunalités de mettre en place des projets à l'échelle de l'ensemble de leur territoire. Des amendements ont élargi, notamment à la culture, la recherche et l'université, la liste des compétences que les communautés peuvent transférer au pôle métropolitain. Les sénateurs ont, par ailleurs, assoupli les conditions de création d'un pôle métropolitain. L'article 7 adopté par le Sénat prévoit que "le pôle métropolitain regroupe des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre formant un ensemble de plus de 300.000 habitants" (contre 450.000 habitants dans le texte initial). En outre, "l'un d'entre eux compte plus de 150.000 habitants" (le texte déposé au Sénat fixait ce seuil à 200.000 habitants). Les sénateurs ont, enfin, décidé que la création du pôle métropolitain "fera l'objet d'une consultation préalable avec les régions et les départements concernés".
On notera que le Sénat a assoupli les seuils exigés par la loi pour la création d'une communauté d'agglomération. Il sera ainsi possible de constituer cette catégorie d'EPCI autour d'un chef-lieu de département rural, même si l'agglomération ne compte pas 50.000 habitants, seuil requis normalement. Il suffira que l'agglomération ait seulement 30.000 habitants. En fonction de ces nouveaux paramètres, des villes comme Auch, Cahors, Vesoul ou encore Lons-le-Saunier pourraient accéder au rang de communauté d'agglomération et ainsi obtenir une dotation globale de fonctionnement par habitant supérieure à celle qui leur est versée aujourd'hui. Un autre assouplissement adopté par le Sénat vise à prendre en compte l'affluence des touristes sur certains territoires pour permettre aux communautés concernées de se constituer en communauté d'agglomération.
La Haute Assemblée devait entamer ce mercredi 3 février l'examen des dispositions du projet de loi sur les regroupements de régions et de départements.
Thomas Beurey / Projets publics