Transports - Quelques idées fausses qui circulent sur les transports, selon la Fnaut...
A l’attention des usagers et des élus, la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut) a présenté le 10 septembre une liste des idées fausses qui circulent dans le domaine des déplacements en zone urbaine et périurbaine. Titillant ainsi l’esprit critique des décideurs publics qui, trop souvent à son goût, les colportent sans prendre de recul, l’association s’attarde pour commencer sur la dépendance automobile. A l’idée selon laquelle on ne peut se passer de voiture, elle répond que le transfert modal est possible. Et que le recul de son usage est déjà significatif dans de grandes agglomérations comme Lyon ou Lille. Depuis le milieu des années 1990, la part modale de la voiture y a fléchi, de récentes enquêtes confirmant par ailleurs le caractère national de cette tendance.
Autre idée fausse : la marginalité d’usage du vélo en ville. "Elle est loin de l’être, contrecarre Jean Sivardière, président de la Fnaut. L’expérience prouve que le vélo peut s’imposer comme un transport quotidien de masse, car il s’est adapté aux besoins et ainsi élargi à de nouveaux utilisateurs et usages. Il est aussi beaucoup moins dangereux qu’on ne le pense. Les investissements cyclables étant peu coûteux et à la portée des collectivités locales, il est du coup réaliste d’imaginer qu’une fois réalisés, la part modale du vélo dans nos villes pourra se rapprocher de celle observée à Amsterdam, Copenhague ou dans certaines villes italiennes, soit plus de 30%."
Et d’ajouter qu’un autre bruit qui court depuis longtemps, selon lequel le tramway n’est adapté qu'aux grandes agglomérations, est aussi faux. "La pertinence économique du tramway dépend de la population totale de l’agglomération mais aussi de sa répartition géographique, si bien qu’il se développe aisément dans des petites et moyennes agglomérations comme Brest, Besançon ou Le Mans." Quant à la pertinence économique du bus, elle dépend du trafic à écouler en période de pointe. A partir d’un seuil estimé à 3.000 voyageurs par heure et par sens, le bus devient même "la seule technique pertinente économiquement". En effet, sa vitesse commerciale tend alors à se rapprocher de celle du tramway, soit 20 km/h. Mais pour cela, encore faut-il qu’il roule dans de bonnes conditions, dans des couloirs dédiés et qui bénéficient de la priorité aux carrefours, etc. "Et que le véhicule soit accessible à l’arrêt, sans qu’on exige la montée par l’avant, une aberration qui sous prétexte de réduire la fraude, ralentit le trafic et bride cette performance", renchérit l’association.
Nullement épargné par les a priori en tous genres, le train intéresse de près l’association. "On dit par exemple que pour desservir de petites villes et zones rurales, le car peut remplacer le train, que c’est moins cher, mais l’exemple allemand montre que s’il est exploité intelligemment, le train peut assurer efficacement les relations entre territoires ruraux et grandes villes voisines, tout en restant d’un coût modéré." Plus globalement, dire que le transport collectif n’a guère de pertinence dans les zones périurbaines et rurales est également injuste pour l’association, qui rappelle que "la dispersion de la population est certes un facteur défavorable, mais que des techniques nouvelles et disponibles de desserte de ces zones ont prouvé leur efficacité : dessertes activées sur réservation (dites "lignes virtuelles"), dispositifs de transport collectif à la demande déployés par les départements, etc".
Reste le coût des transports collectifs, souvent évoqué comme un obstacle majeur à leur développement. Réponse de l'association : ils coûtent certes cher aux collectivités territoriales mais des leviers de réduction existent. "En abaissant par exemple le coût d’exploitation des bus tout en augmentant leur vitesse commerciale, on peut attirer une clientèle nouvelle et donc générer des recettes supplémentaires." "Ce qui coûte cher à la collectivité, c’est d’abord l’usage de l’automobile", ajoute la Fnaut, qui cite à l'appui une étude du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) chiffrant les coûts externes de l'usage de la voiture à plus de 31 milliards d’euros.
Enfin, la Fnaut croit au potentiel de l’autopartage, alors qu’on le cantonne souvent à une pratique marginale. "En Suisse, il y a 93.000 autopartageurs, il pourrait donc y en avoir dix fois plus en France (12.000 actuellement) ! Son développement est possible aussi dans de petites villes, par exemple à Colmar, Sélestat ou Saverne." Mais généraliser cette pratique via le modèle Autolib', plaqué sur celui de du Vélib' parisien, équivaut pour l’association à la figer et la vider de son sens. "Car autant il faut faire un minimum d’effort pour accéder à l’autopartage, autant le modèle Autolib’ prône la facilité au point d’inciter fortement à utiliser la voiture, ce qui est contre-productif d’un point de vue écologique", conclut la Fnaut.
Morgan Boëdec / Victoires éditions