Environnement / Economie - Quel avenir pour nos forêts ? Le ministère de l'Agriculture combat les idées reçues
Quand l'exploitation de la forêt contribue à sa vitalité. Le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), présidé par le ministre de l'Agriculture, a publié le 26 mai 2014 la suite de sa "Controverse documentée à propos de quelques idées reçues sur l'agriculture, l'alimentation et la forêt". Un quatrième épisode intitulé "Trop exploitées les forêts disparaissaient". A l'heure où l'exploitation du bois est identifiée comme une filière d'avenir et soutenue en tant que telle par le gouvernement (voir nos articles ci-contre), cette mise en perspective sur l'évolution de la forêt et de ses usages apparaît bienvenue.
La forêt française continue à se développer
"Il y a moins de forêts", une première idée reçue à laquelle le CGAAER répond : "inexact en France et en Europe mais exact au niveau mondial". En effet, malgré un ralentissement, la déforestation se poursuit à l'échelle mondiale, avec cinq millions d'hectares (soit 0,1% de la surface totale) chaque année. Avec, en particulier, une régression forte en Afrique et en Amérique du Sud. La France, comme l'Europe dans son ensemble, affichent au contraire un solde positif. La forêt française a même "doublé de surface au cours des deux siècles passés" et ainsi "retrouvé ses superficies de la fin du Moyen-Age", soit 16,4 millions d'hectares. Parmi les facteurs d'explication évoqués : la fin des guerres, une politique volontariste de reboisement depuis le XIXe siècle et, plus récemment, la déprise agricole.
Le CGAAER souligne que "la forêt tend à s'éloigner des villes", ce qui alimente l'idée reçue - davantage citadine - de sa disparition. Quant aux espèces les plus représentées, "la France est le pays des chênes" qui couvrent 39% de la surface forestière. Réfutant l'idée selon laquelle "il y a trop de résineux", le CGAAER est catégorique : "La forêt française, ce sont deux tiers de feuillus et un tiers de résineux."
Le papier ne tue pas nos forêts
Autre idée reçue "largement répandue mais tellement contraire à la réalité" : "le papier tue la forêt". A l'inverse, pour le CGAAER, "le papier permet de prendre soin de la forêt". On apprend ainsi que seulement 40% de la pâte à papier fabriquée est issue de la matière première "bois" (les autres 60% provenant du recyclage de papiers et cartons). Le bois utilisé correspond soit à des chutes de l'activité de sciage, soit à des "coupes d'entretien" ou "coupes d'éclaircies". Et, avec ou sans débouché économique, ces coupes sont nécessaires : elles "permettent de dynamiser naturellement la croissance de la forêt en favorisant le développement des plus beaux arbres". La fabrique de papier participe donc d'une bonne gestion de la forêt, favorisant entre autres la protection de la biodiversité et la prévention des incendies.
Protection, récréation, production : trois fonctions à faire coexister
Quant à l'utilité des espaces boisés, tout en révélant que "les Français vont plus en forêt qu'au cinéma", le CGAAER rappelle qu'une forêt ne sert pas qu'à se promener. La production du bois, sa transformation et la mise en œuvre des "produits-bois" (dans la construction par exemple) représenterait 415.000 emplois en France. Avec, pour le CGAAER, un potentiel de 20.000 emplois supplémentaire dans le cas d'une "mobilisation de 60% du gisement de production supplémentaire annuel". Une filière d'avenir, affirme le CGAAER qui contredit par la même occasion une autre idée reçue selon laquelle "le bois, c'est sympa mais c'est le passé". Au contraire, "le bois c'est moderne": solide, durable, isolant de qualité, facile à assembler et parfois même "intelligent", avec des matériaux pouvant servir à la pharmacie ou encore à la fabrication de biocarburants de deuxième génération.
Détaillant notamment l'enjeu de lutte contre l'effet de serre, le rapport met en avant les trois fonctions de la forêt : "la protection (sols, eau, ressources naturelles et biologiques…), la fonction sociale d'accueil et de récréation et la production de bois". Considérant que "cette dernière fonction doit financer les deux autres", le CGAAER estime que le défi d'une gestion durable des forêts consiste à "faire cohabiter harmonieusement" ces trois vocations.