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Investissement - Quand le plan de relance passe par la case commande publique

Le projet de loi d'accélération des programmes de constructions et d'investissements voté le 13 janvier par les députés, texte de mise en oeuvre du plan de relance, a été enrichi d'un important volet achat public qui prévoit la création d'un Code de la commande publique ainsi qu'une série de mesures concrètes d'assouplissement pour les collectivités acheteuses.

L'Assemblée nationale a adopté la totalité du plan de relance présenté début décembre par Nicolas Sarkozy, dont l'objectif est d'"injecter 26 milliards d'euros dans l'économie nationale", en votant mardi 13 janvier en fin de journée le projet de loi pour "l'accélération des programmes de constructions et d'investissements publics et privés". Ceci après avoir voté jeudi 8 janvier l'autre texte devant permettre de mettre en place ce plan de relance, à savoir le projet de loi de finances rectificative pour 2009. "Les deux projets de loi - le collectif budgétaire et le projet d'accélération - sont par nature très complémentaires", avait expliqué aux députés Patrick Devedjian, le nouveau ministre en charge de la mise en oeuvre du plan, le projet d'accélération se présentant comme le pan "simplification des procédures" de ce paquet législatif, le collectif budgétaire regroupant pour sa part les grandes mesures financières.
Si le projet de loi d'accélération est essentiellement constitué de mesures concernant les règles d'urbanisme et le logement (voir ci-contre nos articles des 9 et 12 janvier), sans oublier le vote d'une disposition touchant l'archéologie préventive, son examen à l'Assemblée a fait entrer en scène un invité surprise, la commande publique, avec l'introduction par amendement de plusieurs nouveaux articles aux conséquences non négligeables pour les acheteurs.

 

Bientôt un Code de la commande publique

Ainsi, souhaité de longue date par les acteurs et les décideurs locaux et relancé lors du débat sur la loi relative à la modernisation des partenariats public-privé, un Code de la commande publique pourrait voir le jour d'ici l'été 2010. Les députés ont en effet adopté un amendement gouvernemental autorisant le gouvernement à procéder, par voie d'ordonnance, à l'adoption de la partie législative du Code de la commande publique.
L'habilitation accordée au gouvernement par le nouvel article 8 du projet de loi suppose une adoption de ce nouveau code "dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi", c'est-à-dire avant juillet 2010. Ce code doit permettre "d'unifier, de clarifier et de simplifier" l'ensemble des dispositions législatives applicables aux contrats de la commande publique (contrats de partenariat, baux emphytéotiques administratifs, concessions, etc.). Les contrats et procédures actuellement régis par le Code des marchés publics ne seront pas concernés, puisque ce travail d'"harmonisation" a déjà été réalisé.
Le code ne se contentera pas de compiler les textes applicables en matière de commande publique. Le projet vise à harmoniser et donc " modifier [...] l'ensemble des dispositions législatives applicables à la commande publique et leurs règles de procédure". Concrètement, le Code de la commande publique devrait permettre de dégager des principes généraux et d'homogénéiser, dans la mesure du possible, les différents régimes applicables afin de renforcer la sécurité juridique des contrats et "mettre fin aux perplexités des acheteurs et de leurs cocontractants".

 

Des règles communes à l'ensemble des contrats

L'élaboration de ce code pourrait donc entraîner un certain nombre de modifications concernant notamment l'ordonnance du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat, l'ordonnance du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au Code des marchés publics, la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique, la loi du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence mais aussi le Code général des collectivités territoriales, le Code de l'urbanisme, etc.
Le projet de Code de la commande publique avait été fortement recommandé par le Conseil d'Etat dans son rapport public de 2008. La profusion de nouveaux contrats, encadrés par des règles qui leurs sont spécifiques, entraîne en effet une forte insécurité juridique pour les acteurs de la commande publique. En cas d'erreur, l'étanchéité des règles applicables à chaque catégorie de contrat oblige le juge, dans bien des cas, à annuler la procédure. Le Conseil d'Etat préconisait donc de dégager des principes et des règles de procédures communes à l'ensemble des contrats afin de procéder, comme le prévoit la jurisprudence Tropic Travaux, à une "simple" requalification du contrat.
Cette nouveauté s'inscrit parfaitement dans un projet de loi de simplification et d'accélération, a estimé Patrick Devedjian lors de la discussion du texte. Et celui-ci d'ajouter : le nouveau code "ne sera évidemment pas disponible dès demain, dans le cadre strict de l'application du plan de relance, mais il faut commencer ce travail (...) afin de disposer de cet instrument le plus vite possible".

 

Simplifier pour accélérer...

Outre le lancement du projet de Code de la commande publique, plusieurs amendements adoptés par les députés introduisent des modifications relatives au droit de la commande publique. Celles-ci "ont leur place [dans le plan de relance] parce que l'achat public représente 120 milliards d'euros par an", a estimé Jean-Luc Warsmann, président et rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée à l'origine de la plupart de ces amendements. "Si nous accélérons d'un mois l'achat public, nous introduisons dans le circuit économique cinq milliards d'euros supplémentaires", a-t-il ajouté. Les amendements Warsmann émanent en fait pour bonne part des travaux la mission parlementaire sur la simplification du droit - et des marchés publics - menée l'an dernier par le député des Ardennes.

 

Suppression du seuil applicable aux marchés publics et aux avenants pour la délégation accordée à l'exécutif
En application des articles L. 2122-22, L. 3221-11 et L. 4231-8 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), l'assemblée délibérante peut autoriser l'exécutif, par délégation, à prendre pour la durée de son mandat toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés et des accords-cadres d'un montant inférieur à un seuil défini par décret, ainsi que toute décision concernant leurs avenants qui n'entraînent pas une augmentation du montant du contrat initial supérieure à 5%. L'un des amendements adoptés vise à supprimer la référence au seuil fixé par décret ainsi que le seuil applicable aux avenants. L'assemblée délibérante pourrait donc à l'avenir autoriser l'exécutif à passer tous les marchés de la collectivité (y compris les appels d'offres) et à signer des avenants supérieurs à 5 %. Les collectivités seraient toutefois libres de fixer, si elles le souhaitent, des seuils qui leurs sont propres.

 

Suppression de la double délibération
L'obligation d'une "double délibération" (par la commission d'appel d'offres puis par l'assemblée délibérante) dans le cadre de l'attribution des marchés publics locaux pourrait également être supprimée. Lorsque l'exécutif n'a pas bénéficié de la délégation citée précédemment, l'assemblée délibérante pourrait ainsi être autorisée à déléguer, par un seul vote, l'autorisation d'engager la procédure de passation et de signer le marché. Les articles L. 2122-21-1, L. 3221-11-1 et L. 4231-8-1 du CGCT actuellement en vigueur prévoient au contraire que l'assemblée délibérante "peut, à tout moment, décider que la signature du marché ne pourra intervenir qu'après une nouvelle délibération, une fois connus l'identité de l'attributaire et le montant du marché".

 

Rendre obligatoire la publication des listes de marchés
L'article 133 du Code des marchés publics prévoit que les personnes publiques doivent publier, chaque année, la liste des marchés conclus l'année précédente. Un amendement vise à renforcer la transparence en exigeant la publication régulière de cette liste, mise à jour tout au long de l'année, et d'y faire figurer l'ensemble des marchés conclus et en cours d'exécution ainsi que les attributaires de ces marchés. L'Etat et les grandes collectivités territoriales seront tenus de mettre cette liste "à la disposition du public sous forme électronique de manière permanente et gratuite". Les petites communes pourront quant à elles procéder à un affichage en mairie.

 

Recentrer le délit de favoritisme sur l'élément intentionnel
Un autre amendement adopté vise par ailleurs à introduire un élément intentionnel dans le délit de favoritisme. En effet, il est aujourd'hui possible d'être condamné pour une "simple" erreur, sans qu'une faute volontaire n'ait été commise. Il s'agit donc de "recentrer le délit de favoritisme sur ceux qui ont eu l'intention délibérée de le commettre" et d'aggraver les sanctions à l'encontre de ceux qui ont commis une faute en portant l'amende maximale de 30.000 à 100.000 euros.

 

PPP : caractère ajustable des modalités de financement
Une mesure temporaire, applicable pour les seules années 2009 et 2010, devrait autoriser la personne publique à prévoir que "les modalités de financement indiquées dans l'offre finale présentent un caractère ajustable".

 

Rapport sur les mesures de publicité des Mapa
Afin de répondre aux difficultés des acheteurs publics face à l'absence de précisions sur les mesures de publicité requises dans le cadre des Mapa, le gouvernement est chargé d'étudier les moyens de remédier à cette incertitude juridique et d'adresser au Parlement, dans les six mois suivant la publication de la loi, un rapport destiné faciliter l'accès aux avis de publicité pour les entreprises candidates "tout en assurant la plus grande sécurité juridique possible aux acheteurs publics".

 

L'Apasp et C.Mallet

 

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