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Dépendance - Protection juridique des majeurs : plus que trois semaines et toujours pas de décrets

Le 1er janvier 2009, entrera en vigueur la réforme de la protection juridique des majeurs, instaurée par la loi du 5 mars 2007. Attendue depuis de longues années, cette réforme transforme en profondeur le dispositif traditionnel des tutelles et des curatelles. Elle donne aux départements un rôle inédit en la matière, en leur confiant notamment la mise en oeuvre d'un accompagnement social et budgétaire, en amont des décisions judiciaires. Le contenu de cette réforme fait l'objet d'un large consensus, même si les départements s'inquiètent de son impact potentiel sur leurs dépenses sociales.
Seul problème : à un peu plus de trois semaines de l'entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007, le dispositif réglementaire - nécessaire à sa mise en oeuvre - présente des lacunes considérables. A ce jour, seuls deux décrets ont en effet été publiés : celui du 30 novembre 2007 relatif au modèle de mandat de protection future sous seing privé et celui du 23 novembre 2007 modifiant le Code de procédure pénale et relatif à la poursuite, à l'instruction et au jugement des infractions commises par des majeurs protégés (dispositions judiciaires qui n'ont pas de véritable dimension sociale). Or la loi du 5 mars 2007 renvoie très exactement à 37 reprises à un décret pour la mise en oeuvre des dispositions qu'elle contient. Un même décret pouvant regrouper plusieurs de ces renvois, le Journal officiel recense huit décrets d'application dans son échéancier de mise en oeuvre de la loi du 5 mars 2007, publié sur son site Légifrance. Six textes réglementaires resteraient donc à publier, sans compter les arrêtés découlant des décrets et les traditionnelles circulaires d'application. L'échéancier de Légifrance mentionne le mois d'avril 2008 pour leur publication, une date aujourd'hui dépassée de plus de sept mois ! Parmi les dispositions qui restent ainsi en attente de leurs textes d'application figurent ainsi - entre autres - des éléments aussi essentiels que les modalités de financement des mesures, les conditions d'exercice des curateurs et des tuteurs des personnes hébergées en établissement sanitaire, social ou médicosocial, la liste des "actes graves" susceptibles d'être décidés par le tuteur ou curateur et soumis à une autorisation spéciale du juge, la liste des actes de gestion courante du patrimoine, le plafond de la contribution qui peut être demandé par les départements aux bénéficiaires d'un contrat d'accompagnement social personnalisé, les modalités de mise en oeuvre de "l'accompagnement de la personne en matière sociale et budgétaire" prévu par l'article 13 de la loi et confié aux départements...
Certes, plusieurs décrets sont actuellement en cours d'examen par le Conseil d'Etat. Mais même si une brusque accélération permettait leur publication avant la fin de l'année, une parution aussi tardive ne permettrait pas aux différents acteurs concernés - dont les départements - d'être opérationnel dès le 1er janvier, ni même dans les premières semaines de 2009. Cette situation, qui risque de peser fortement sur la mise en oeuvre de la réforme, au moins dans les premiers temps, n'a pas échappé au législateur. Dans le récent rapport du Sénat sur le contrôle de l'application des lois, Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, s'étonne ainsi que la loi du 5 mars 2007 "n'ait pas fait l'objet de tous les décrets d'application nécessaires, malgré le très long délai - 22 mois - accordé à cet effet par le législateur au gouvernement".

 

Jean-Noël Escudié / PCA


 

Référence : loi 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs (Journal officiel du 7 mars 2007).

 

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