Emploi - Proch'emploi : fiasco ou début prometteur ?
Le 5 janvier 2016, la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie a lancé Proch'emploi, un nouveau dispositif destiné aux demandeurs d'emploi. Il s'agissait d'une promesse de campagne de Xavier Bertrand, le président de la région. Objectif : faire le lien entre les offres d'emploi disponibles et les chômeurs. La région affiche un taux de chômage de plus de 12%, au-dessus de la moyenne nationale, avec 570.000 demandeurs d'emploi. Et d'après les données de Xavier Bertrand, 120.000 offres d'emploi ne sont pas pourvues dans la région. Même si pour Pôle emploi le chiffre est plus limité (voir notre encadré ci-dessous), l'idée est de trouver des solutions en mettant en relation employeurs et demandeurs d'emploi. Le dispositif s'appuie sur une plateforme téléphonique existante et mise en place par l'ex-région Picardie pour aider les administrés dans leurs démarches administratives. Une quinzaine de personnes y travaillent de 8h à 18h, cinq jours par semaine.
Le principe est simple : les chômeurs appellent le numéro vert 800 02 60 80 et donnent des précisions sur leur parcours professionnel (les secteurs dans lesquels ils recherchent un emploi, formation, …). Leur demande est enregistrée et ils sont recontactés dans un délai de quinze jours maximum pour un rendez-vous.
D'après l'entourage de Xavier Bertrand, dès le début, 1.500 appels en 48 heures ont été reçus. Depuis le lancement, quelque 5.000 à 6.000 personnes ont contacté la plateforme et 200 entreprises ont également pris contact pour trouver des profils correspondant à leurs demandes. Plusieurs centaines d'offres sont dores et déjà disponibles, mais ce chiffre devrait augmenter grâce à un partenariat signé avec Randstad, une agence de recrutement, et avec Pôle emploi. Des rencontres ont également eu lieu avec Le bon coin, dont le site est fortement utilisé pour la recherche d'emploi.
Pôle emploi et Proch'emploi : une logique de complémentarité
Une vingtaine de personnes seulement auraient trouvé un emploi grâce au dispositif. Un résultat jugé "lamentable" par les auteurs du blog www.ProchEmploi-fiasco.fr. Ne souhaitant pas dévoiler leur identité, ces auteurs mènent actuellement une enquête en direction des usagers du service. Les premiers retours confirment selon eux l'échec du dispositif, et notamment son incapacité à proposer des offres d'emploi. Ils critiquent le mode de réception des demandeurs d'emploi, réalisé "tantôt par des agents de la région qui n'ont pas vraiment été formés, tantôt par des professionnels du réseau d'insertion (maisons de l'emploi, missions locales), tantôt par des élus !". En revanche, un point positif est mis en avant : l'accueil très bien réalisé des demandeurs d'emploi. Le facteur humain et le temps consacré aux demandeurs jouent en effet beaucoup. "Le temps peut vraiment faire la différence, avec une vraie dimension humaine, explique-t-on dans l'entourage de Xavier Bertrand, les appels durent entre 15 et 20 minutes, puis l'entretien permet d'être efficace dans la définition des besoins."
Les craintes de doublon et de gaspillage de l'argent public qui reviennent dans le blog ne sont pas partagées par Pôle emploi. "Le défi est tellement important qu'il n'y a jamais trop d'énergie", assure-t-on ainsi à Pôle emploi. Et les échanges entre l'organisme public et la région se multiplient. "L'objectif est de voir comment on peut travailler ensemble", assure-t-on chez Pôle emploi.
Même son de cloche du côté de la région. "On est sur une logique de complémentarité, l'indemnisation des chômeurs, le cœur de métier de Pôle emploi, on n'y touche pas, en revanche sur l'accompagnement des chômeurs à travers la formation, cela fait partie des compétences des régions. L'idée n'est pas de devenir le patron de Pôle emploi, mais bien d'avoir une vision complémentaire," explique la région. Au-delà de ce dispositif, la région a demandé au gouvernement de pouvoir expérimenter d'autres actions, notamment sur l'apprentissage, et s'est portée volontaire pour le projet "Territoires zéro chômeur de longue durée" d'ATD Quartmonde, qui a fait l'objet d'une loi adoptée en février 2016.
Emilie Zapalski
Près de 190.000 offres non pourvues en France en 2015
Selon Pôle emploi, près de 190.000 offres d'emplois n'ont pas été pourvues en 2015 en France. Le sujet est toujours source de polémique et la note de Pôle emploi, publiée fin février 2016, précise les données prises en compte : les emplois non pourvus incluent les offres abandonnées faute de candidats, mais aussi celles qui pourraient encore trouver preneur. Et selon les calculs de l'organisme public, au total, seules 43.000 offres sont annulées par les recruteurs : 34% pour disparition du besoin, 50% pour manque de candidats adéquats, et 16% pour faute de budget. D'après l'étude, ce sont les régions Ile-de-France (38.300 offres non pourvues), Auvergne-Rhône-Alpes (28.200) et Provence-Alpes-Côte d'Azur (20.500) qui concentrent le plus grand nombre d'offres non pourvues. La région Nord-Pas-de-Calais-Picardie n'en compte que 8.900. Les abandons concernent plus souvent les petits établissements, ceux du secteur de la construction, et les postes de cadres ou d'ouvriers qualifiés.
E.Z.