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Environnement - Préservation de la biodiversité : les collectivités font valoir leur compétence

En transférant la compétence en matière de préservation de la biodiversité aux collectivités locales, avec les régions comme chefs de file, l'orientation de l'acte III de la décentralisation est la bonne, a estimé Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale, en conclusion d'une table ronde sur le sujet le 21 novembre. Devant les députés de la commission, plusieurs élus locaux ont relaté leur expérience et se sont interrogés sur le rôle que pourrait jouer la future Agence nationale de la biodiversité dont la création a été annoncée lors de la conférence environnementale de septembre dernier. "Nous avons besoin que l'on nous éclaire sur son périmètre, ses ressources, ses moyens, ses champs de compétence pour voir quelle plus-value elle peut apporter aux politiques que nous menons déjà à nos échelles respectives", a résumé Daniel Béguin, vice-président de la commission développement durable et environnement de l'Association des régions des France (ARF) et vice-président de la région Lorraine. Car à condition que les élus fassent preuve de volontarisme en la matière, les collectivités ont déjà de quoi mener des actions efficaces. Damien Carême, maire de Grande-Synthe, près de Dunkerque, qui a accueilli en septembre dernier les deuxièmes Assises nationales de la biodiversité, a témoigné de la politique appliquée dans sa ville depuis…1971. Plantations d'arbres, canaux, vergers pédagogiques, jardin des plantes médicinales, circuit de la biodiversité, cantines scolaires servant 100% de repas biologiques… : dans cette ville ouvrière de 22.000 habitants, qui compte 64% de logements sociaux et se trouve aujourd'hui durement frappée par la crise avec un taux de chômage de 20%, la préservation de la nature est un travail de longue haleine qui implique tous les habitants. "Pour nous, une chose est sûre : on n'a pas à se poser la question de savoir comment faire coexister biodiversité et réalisme socio-économique car nous considérons que l'un ne va pas sans l'autre", a souligné Damien Carême.

Quelles ressources financières ?

Pour Corinne Casanova, administratrice de l'Assemblée des communautés de France (ADCF), en matière de préservation de la biodiversité, "la prise de conscience globale avance mais le bilatéral reste difficile, dans le dialogue élus-agriculteurs, par exemple". Les arbitrages financiers n'ont rien d'évident non plus. "Quand on dit d'investir dans la biodiversité, on fait souvent valoir d'autres priorités comme le social. Mais en la matière, les petites sommes suffisent à produire un fort effet de levier." Selon elle, l'Agence de la biodiversité pourrait permettre de lier davantage les politiques publiques entre elles et d'affirmer ainsi le caractère transversal de la problématique, tout en offrant un cadre national pour évaluer les politiques menées. Autres acteurs incontournables en matière de préservation de la biodiversité : les départements. 99 départements ont voté la taxe départementale sur les espaces naturels sensibles (TDENS) - remplacée par la taxe d'aménagement créée par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2010 - et les trois quarts des départements ont réalisé un schéma des ENS, qui représentent aujourd'hui 4.000 sites, a rappelé Eric Gautier, vice-président de commission de l'Assemblée des départements de France et président du conseil général des Deux-Sèvres. "Sans la taxe d'aménagement, une grande partie de nos actions dans ce domaine disparaîtraient, a-t-il souligné. Mais il y a aussi un outil encore trop peu utilisé pour protéger les espaces agricoles, les Paen [périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, ndlr], signés jusqu'alors par trois départements". Dans leurs différentes politiques (entretien des routes, aides à l'agriculture, énergie...), les départements jouent un rôle essentiel dans la préservation de la biodiversité ordinaire, a insisté Eric Gautier.
Les régions ont quant à elles une expérience déjà ancienne en la matière, a rappelé Daniel Béguin. Avant que le Grenelle de l'environnement qui leur a confié la coconstruction avec l'Etat des schémas régionaux de cohérence écologique, elles ont contribué depuis la loi sur la démocratie de proximité de 2004 à la création d'autant de réserves naturelles que l'Etat en quarante ans, a-t-il illustré. Elles fournissent aussi des aides à des mesures agro-environnementales, participent à la mise en place de labels d'éducation à l'environnement, peuvent agréer des conservatoires régionaux d'espaces naturels, etc. Mais ces engagements dans la préservation de la biodiversité risquent vite de buter sur les contraintes financières. "Les régions n'ont pas de ressources dédiées et cette politique n'est pas au coeur de leurs compétences, a pointé Daniel Béguin. Il faut donc s'interroger sur une fiscalité nouvelle, pérenne, sur l'artificialisation des sols qui ne pèse pas trop sur les acteurs publics et privés".

 

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