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Environnement - Fiscalité de la biodiversité : un rapport esquisse les voies d'une prochaine réforme

Chargés en juin dernier par la ministre de l'Ecologie de mener une mission conjointe sur la fiscalité de la biodiversité, l'Inspection générale des finances (IGF) et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) proposent d'avancer prudemment dans ce domaine. "En l'absence d'une définition suffisamment précise de la politique en faveur de la biodiversité et de l'organisation institutionnelle permettant de la porter, la mission considère qu'une réforme en profondeur des outils fiscaux serait prématurée et risquerait de ne pas produire les effets escomptés en matière de préservation du patrimoine naturel", concluent-ils dans leur rapport daté d'octobre dernier mais rendu public le 9 février 2012. La mission avance cependant cinq pistes d'actions à mener "prioritairement" qui pourraient "constituer le fondement d'une prochaine réforme de la fiscalité de la biodiversité". La première serait d'"établir une chiffrage relativement fiable des besoins en matière de préservation de la biodiversité sur le territoire national" et de "disposer d'analyses permettant, comme l'a fait le rapport Stern pour le changement climatique, d'objectiver le coût économique de l'inaction". La deuxième piste, qui concerne directement les collectivités, consisterait à "concentrer les ressources fiscales locales sur l'échelon territorial le plus pertinent, la région apparaissant […] comme la collectivité la plus à même de mener une politique cohérente avec le développement de la TVB [trame verte et bleue, ndlr] ainsi qu'avec l'action des services déconcentrés de l'Etat et des acteurs locaux". Cela suppose, selon le rapport, "un transfert progressif de la TDENS [taxe départementale sur les espaces naturels sensibles, ndlr] des départements vers les régions", taxe qui au demeurant a déjà été remplacée, comme cinq autres, par la taxe d'aménagement créée par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2010. Il s'agirait donc, selon la mission, d'envisager un transfert progressif vers les régions de la part départementale de la nouvelle taxe d'aménagement. Dans cette optique, précise-t-elle, "il serait de bonne méthode d'établir un lien direct ente le taux de la taxe, qui pourrait alimenter les budgets des régions, et les SRCE [schémas régionaux de cohérence écologique, ndlr] dont la vocation est de décliner la TVB et d'établir un diagnostic régional actualisé des besoins financiers pour la politique de sauvegarde du patrimoine naturel régional".

Développer "une fiscalité très dissuasive"

La mission préconise en outre de "développer une fiscalité très dissuasive pour les activités ou comportements particulièrement néfastes à la biodiversité, tout en réallouant une partie des ressources budgétaires ainsi levées à des projets de préservation du patrimoine naturel". Le rapport propose également de "mieux prendre en compte par la réglementation et l'instauration d'une politique de compensation des externalités négatives de certaines activités professionnelles ou privées sur le patrimoine naturel" et d'"adopter des normes plus strictes pour limiter ces impacts, notamment en ce qui concerne les grands aménagements périurbains et les grandes infrastructures de transport dont la construction conduit à une artificialisation des sols". Depuis l'adoption de la loi de protection de la nature, en 1976, les maîtres d'ouvrage d'aménagement et de travaux doivent "supprimer, réduire et, si possible, compenser" les "conséquences dommageables pour l'environnement", mais force est de constater que cette obligation a du mal à être respectée car les aménageurs ne savent pas toujours acquérir, restaurer et gérer des espaces naturels sur le long terme. Enfin, la dernière "piste d'action" évoquée dans le rapport consiste à "disposer au niveau national de ressources budgétaires dédiées permettant de financer ou cofinancer des projets de sauvegarde, d'entretien ou de restauration de la biodiversité, ces ressources pouvant être gérées - dans l'attente de la création d'une Agence de la biodiversité - au sein d'un fonds national pour la préservation du patrimoine naturel disposant d'une gouvernance inspirée du 'Grenelle à cinq' (ONG, syndicats, patronat, Etat, collectivités territoriales)". A noter que cette mesure a déjà été retenue par le ministère de l'Ecologie qui a annoncé le 5 février la création d'un "fonds d'investissement pour la biodiversité et la restauration écologique", baptisé Fibre.