Commande publique - Précisions du Conseil d'Etat sur la notion d'offre incomplète
Dans un arrêt du 12 janvier 2011, le Conseil d’Etat a apporté des précisions intéressantes sur la notion d’offre incomplète et sur les obligations qui pèsent sur les acheteurs confrontés à des offres irrégulières. Il s’agissait en l’espèce d’un marché à bons de commande allotis relatif au service hivernal de salage et de déneigement des routes départementales. Le règlement de la consultation prévoyait notamment que la valeur technique des offres serait appréciée au regard des renseignements fournis par les candidats sur les caractéristiques du véhicule qu’ils envisageaient de mettre à disposition.
Après avoir écarté l’offre d’un des candidats, le département du Doubs a attribué le marché à une entreprise qui, ne disposant pas encore d’un véhicule de salage et de déneigement, avait fourni un simple devis signé par un garagiste et revêtu de la mention "lu et approuvé". Le juge des référés précontractuels et le Conseil d’Etat ont tout d’abord rappelé que si les candidats n’étaient pas tenus de justifier qu’ils disposaient déjà du matériel à la date de remise des offres, "ils leur appartenaient toutefois, à cette même date, de justifier qu’ils en disposeraient pour l’exécution du marché." Or, selon les juges, le fait de fournir un "simple devis" ne permet pas à une entreprise candidate à un marché public de garantir et de justifier qu’elle a entrepris des démarches suffisantes en vue de disposer effectivement du matériel nécessaire. Par conséquent, conformément aux termes de l’article 53-III du Code des marchés publics, le département du Doubs était tenu d’éliminer l’offre incomplète - et donc irrégulière - de ce candidat.
En revanche, le Conseil d’Etat estime que ce type de manquement ne peut pas conduire le juge des référés à annuler l’ensemble de la procédure et à enjoindre au département de la reprendre dans son intégralité. Les juges de la Haute Juridiction administrative ont en effet considéré "qu’eu égard au stade auquel est prononcé l’annulation de l’ordonnance du juge des référés, il appartiendra au département du Doubs, s’il entend conclure le marché en cause, de reprendre la procédure au stade de la sélection des offres".
Référence : Conseil d’Etat, 12 janvier 2011, département du Doubs, n° 343324
Offres irrégulières, inacceptables ou inappropriées
L’article 53-III du Code des marchés publics prévoit que les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. L’article 35 du Code des marchés publics précise qu’une offre est "inappropriée" lorsqu’elle apporte une réponse sans rapport avec le besoin du pouvoir adjudicateur et qui peut en conséquence être assimilée à une absence d'offre ; qu’une offre "irrégulière" est une offre qui, tout en apportant une réponse au besoin du pouvoir adjudicateur, est incomplète ou ne respecte pas les exigences formulées dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans les documents de la consultation ; enfin, qu’une offre est "inacceptable" si les conditions qui sont prévues pour son exécution méconnaissent la législation en vigueur, ou si les crédits budgétaires alloués au marché après évaluation du besoin à satisfaire ne permettent pas au pouvoir adjudicateur de la financer.