Accès aux soins - Permanence des soins ambulatoires : l'Assemblée propose des solutions
La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité, le 3 juin, le rapport d'information sur la permanence des soins ambulatoires (PDSA), également adopté à l'unanimité, le 27 mai, par les membres de la mission. Sa rapporteure - Catherine Lemorton, présidente (PS) de la commission (et pharmacienne) - en a présenté le contenu à cette occasion. La mission avait été lancée en novembre 2013. Depuis cette date, elle a procédé à 41 auditions et tables rondes et entendu 47 organismes et parties prenantes : représentants des professions de santé, administrations concernées de la sécurité sociale ou de l'Etat, acteurs du dispositif... Elle a également effectué plusieurs visites sur place, notamment en Seine-Saint-Denis et en Picardie.
"Une réelle difficulté à se faire soigner"
Le constat ne surprendra pas vraiment (voir nos articles ci-contre) : "Il existe une réelle difficulté à se faire soigner aux heures de la permanence des soins ambulatoires, c'est-à-dire en dehors des heures d'ouverture des cabinets médicaux. Si ces difficultés constituent la caisse de résonance des difficultés ordinaires de notre système de soins, elles sont également propres au système de la permanence, qui repose sur le volontariat des médecins libéraux depuis 2003." Cette "obligation collective fondée sur le volontariat individuel" s'applique également aux chirurgiens-dentistes, infirmiers et pharmaciens.
Le rapport d'information met en avant trois constats principaux. Tout d'abord, "l'organisation de la permanence des soins ambulatoires est complexe et illisible pour beaucoup d'acteurs, professionnels et patients". Plusieurs phénomènes y contribuent : la baisse du volontariat, le cercle vicieux de la diminution du nombre des territoires de garde (faute de volontaires, on en réduit le nombre mais, en augmentant leur taille, on dissuade encore davantage les candidats), mais aussi des éléments extérieurs qui pèsent sur la PDSA (non-rémunération des certificats de décès, absence d'infirmières la nuit dans les Ehpad)...
Une "double peine" pour les médecins dans les déserts médicaux
Le deuxième constat résulte du premier, puisqu'il s'agit de "la nécessité d'améliorer l'organisation du dispositif et de mettre en place des outils d'évaluation pour le rendre économiquement plus efficient et surtout garantir la qualité de l'accès aux soins". Il ne s'agit pas uniquement d'une question de moyens, puisque les crédits consacrés à la PDSA sont passés de 280 millions d'euros en 2005 à 380 millions en 2013.
Enfin, le troisième constat est celui "d'une aggravation, qu'il convient de corriger, des inégalités territoriales et sociales dans l'accès à la permanence des soins ambulatoires". Le rapport considère en effet qu'il existe "une forme de double peine" pour les médecins qui acceptent de s'installer dans les déserts médicaux, "puisqu'ils devront en sus s'engager dans la permanence des soins ambulatoires, faute d'un centre hospitalier universitaire à proximité". Le rapport pointe également certaines populations défavorisées au regard de la PDSA : les personnes modestes (du fait de la nécessité de l'avance de frais, contrairement à l'hôpital), les détenus, les personnes âgées en Ehpad (amenées en urgence au CHU au risque de les fragiliser encore davantage)…
Seize propositions pour relancer la PDSA
Face à ce constat, la mission d'information formule seize propositions, que l'on peut résumer en quatre grands thèmes. Le premier vise l'amélioration de la gouvernance de la PDSA. Il s'agit notamment de mettre en place des outils de suivi et de diffuser les bonnes pratiques.
Le deuxième concerne l'information des professionnels de santé et des patients. La réponse passe en particulier par le numéro national de permanence des soins - gratuit et distinct du 15 - prévu par le projet de loi Santé. Mais le rapport évoque également, du côté des professionnels de santé, la sensibilisation des étudiants, la mise en place d'un module de formation spécifique, ou encore la possibilité - pour les praticiens remplaçants et pour les médecins salariés des centres de santé - de participer à la PDSA.
Troisième axe : l'amélioration de la structure de l'offre de soins. Contrairement au souhait de la ministre de la Santé, la mission ne s'est pas prononcée pour une extension du recours aux hélicoptères, qui "doivent chauffer avant de pouvoir décoller". Elle préconise plutôt des solutions plus classiques, comme le développement des maisons médicales de garde, le développement de la délégation des tâches et la coopération entre professionnels de santé, ou encore l'amélioration de la régulation médicale téléphonique.
Enfin, le quatrième axe concerne la clarification du périmètre de la permanence des soins ambulatoires. Il s'agit en l'occurrence de mieux articuler la garde des médecins avec celle des pharmaciens ou encore d'étendre la PDSA aux transports sanitaires, afin de garantir à chacun l'accès à un médecin de garde sans recourir à un véhicule du Samu. Mais il importe aussi de régler définitivement la question de l'indemnisation de l'établissement d'un certificat de décès aux heures de la PDSA, l'absence actuelle de solution constituant "une insulte à la dignité de l'homme et à la douleur des familles".