Mobilisation nationale pour les quartiers : les travaux se poursuivent
La "mobilisation nationale" en faveur des quartiers lancée par Emmanuel Macron le 14 novembre 2017 à Tourcoing ne fait pas beaucoup de bruit mais avance. Le "Conseil présidentiel des villes" s'est réuni pour la première fois le 13 mars à l'Elysée. Deux jours plus tard, les dix groupes de travail nationaux installés par Jacques Mézard ont présenté au ministre de la Cohésion des territoires leurs propositions, en présence de Jean-Louis Borloo qui poursuit de son côté sa mission confié par Emmanuel Macron. En région, les préfets de 63 départements ont organisé 117 ateliers thématiques territoriaux. La date de la présentation du "Plan de bataille" en faveur des quartiers n'est pas encore fixée.
Le Conseil présidentiel des villes s'est réuni pour la première fois le 13 mars à l'Elysée, selon un article du Bondyblog. La création de cette instance avait été annoncée par Emmanuel Macron le 14 novembre 2017 à Tourcoing, dans son discours fondateur sur la politique de la ville qu'il entend mener durant le quinquennat. Il avait alors appelé à une "mobilisation nationale" pour les quartiers afin de mettre en œuvre le "plan de bataille" dont il avait tracé les contours au travers une quarantaine d'engagements (voir notre article du 16 novembre 2017). Il avait alors indiqué vouloir "réunir tous les trois mois à l'Elysée non seulement ceux qui auront conduit ce travail mais des acteurs multiples de la politique de la ville, des acteurs de terrain". Dans ce cadre, le "Conseil présidentiel des villes" devait réunir "des représentants des quartiers, des femmes et des hommes qui ne sont pas là pour administrer la politique des quartiers (...) mais qui y vivent." Il y aurait ainsi "une quinzaine d’engagés auprès de moi", avait-il précisé.
Mohamed Mechmache, Laëtitia Nonone, Yassine Bellatar
Le Bondyblog donne une liste de six "engagés" sollicités par l'Elysée : Saïd Hammouche, président et fondateur du cabinet de recrutement Mozaïk RH spécialisé dans le recrutement de jeunes diplômés issus des quartiers populaires, qui avait déjà séduit la ministre de la politique de la ville Najat Vallaud-Belkacem (voir notre article du 18 juin 2014) ; Mohamed Mechmache, fondateur de la coordination Pas sans nous et co-auteur d'un rapport au ministre de la ville François Lamy sur la participation des habitants dans les quartiers intitulé "Pour une réforme radicale de la politique de la ville" (voir notre article du 9 juillet 2013) ; Majid El Jarroudi, fondateur de l’Adive, l’Agence pour la diversité entrepreneuriale, qui a participé à la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron ; Laëtitia Nonone, présidente de l’association locale “Zonzon93” qui milite en faveur de la prévention de la délinquance, membre de la coordination Pas sans nous ; Anne Charpy, fondatrice des “Voisins Malins“ (voir notre article du 8 décembre 2014) ; l'humoriste et animateur de radio Yassine Bellatar. Adile Farquane, journaliste et producteur, était également présent à l'Elysée.
A noter que trois d'entre eux - Laëtitia Nonone, Anne Charpy et Saïd Hammouche - sont aussi membres du Conseil national des villes (CNV), instance interministérielle jusqu'à présent placée auprès du Premier ministre.
Une première restitution des dix groupes de travail nationaux au ministère
Dans son discours de Tourcoing, Emmanuel Macron avait prévu que son "plan de mobilisation générale" serait défini en février et qu'il y aurait ensuite, "tous les trois mois", des "réunions de chantier" à l'Elysée avec les élus et les associations pour suivre l'état d'avancement des dossiers et des expérimentations. Il faudra sans doute encore attendre un peu.
Une première restitution des travaux s'est tenue le 15 mars au ministère de la Cohésion des territoires*. Ces travaux visant à la "co-construction de la feuille de route pour la politique de la ville" ont été menés par plus de 200 personnalités réunies en dix ateliers thématiques (vie associative, image des quartiers, entreprises et quartiers, apprentissage/formation professionnelle, culture, sport...). Mis en place "à la demande" du ministère, les dix groupes de travail sont suivis par le CNV et par les associations d’élus, et soutenus par le CGET (Commissariat général à l'égalité des territoires).
Doubler le nombre d'apprentis QPV, promouvoir le mécénat, organiser des "cités éducatives"...
Parmi les centaines de propositions issues de ces dix groupes de travail, on notera : faciliter l'accès au service civique pour les jeunes des quartiers, soutenir l'emploi associatif au sein des QPV (quartiers prioritaires de la politique de la ville), définir un "plan d'action pour le développement des compétences dans les QPV", doubler le nombre d'apprentis QPV, lancer un "grand plan de mentorat" d'entreprise, promouvoir le mécénat en faveur des quartiers, enrichir les stages de 3e en REP et REP+, jumeler des QPV avec des équipements culturels, instaurer un contrat "territoire lecture" dans chaque QPV, étendre les horaires d'ouverture des bibliothèques, organiser une "cité éducative" autour des établissements scolaires, renforcer l'offre sportive des QPV carencés en équipements sportifs, développer la formation et le recrutement de 5.000 "éducateurs sportifs de prévention" (voir aussi notre article du 16 février 2018), créer un "fonds national pour le développement du sport dans les QPV" alimenté par un prélèvement sur les salaires et les transferts des joueurs professionnels, ...
117 groupes de travail territoriaux ont été organisés à l'initiative des préfets
Des ateliers thématiques territoriaux ont également été organisés par les services de l'Etat dans le but d'alimenter les groupes de travail nationaux, mais aussi de repérer des actions "innovantes" susceptibles d'être labellisées "40 ans de la politique de la ville – inventons les territoires de demain", ainsi que le demandait la circulaire du 22 décembre 2017 relative à l'association des parties prenantes à la co-construction de la politique de la ville (voir notre article du 15 janvier 2018). Selon nos informations, 63 préfectures ont répondu à l'appel, réunissant près de 10.000 participants au sein de 117 groupes de travail. La problématique de l'emploi et du développement économique est apparue la plus urgente, suivie de l'éducation puis de la culture. Quatre sujets "transversaux" seraient ressortis particulièrement : la parentalité, l'accès aux stages de 3e, la maîtrise de la langue française et le numérique.
Quant aux actions susceptibles d'être labellisées, 250 auraient été à ce jour identifiées provenant de 60 départements.
Sans oublier que Jean-Louis Borloo poursuit la mission que lui a confiée le président de la République, consistant à dresser un état des lieux et à faire des propositions d'amélioration des outils existants "dont les résultats seraient visibles dans les cinq ans". L'ancien ministre de la ministre de la Ville, père de l'Anru et ex-maire de Valenciennes, doit participer ce 21 mars à Paris à un atelier de travail organisé par l'ADCF et France urbaine en vue d'enrichir le futur "Manifeste pour une nouvelle politique de cohésion urbaine" en cours de rédaction par les deux associations d'élus.
* Selon un article du Monde publié le 19 mars, une cinquantaine d’élus et de représentants d’associations de banlieue seraient ressortis "furieux" de cette réunion, avec le sentiment que le ministre de la Cohésion des Territoires se désintéressait de la problématique.