Fonction publique / Emploi - Loi El Khomri : ce qui va changer pour les agents publics

Le projet de loi sur le travail, la modernisation du dialogue social et la sécurisation des parcours professionnels a été définitivement adopté jeudi 21 juillet 2016. Il fait toutefois l'objet de trois recours devant le Conseil constitutionnel. Plusieurs articles de ce texte porté par la ministre du Travail Myriam El Khomri concernent l'ensemble du secteur public, et quelques-uns spécifiquement la fonction publique territoriale.

Quatre mois après sa présentation en Conseil des ministres, le projet de loi Travail a été définitivement adopté jeudi 21 juillet 2016. Si l'essentiel des 123 articles du texte concerne le secteur privé, certains d'entre eux vont avoir des répercussions directes sur les agents publics.

Lutte contre le sexisme (article 7) : le projet de loi inscrit dans la loi sur les droits et obligations des fonctionnaires du 13 juillet 1983 la notion d'"agissement sexiste". "Aucun fonctionnaire ne doit subir d'agissement sexiste", prescrit l'article. Cependant, "des recrutements distincts pour les femmes ou les hommes peuvent, exceptionnellement, être prévus lorsque l'appartenance à l'un ou à l'autre sexe constitue une condition déterminante de l'exercice des fonctions".
Enfin, il est prévu qu'"aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération […] le fait qu'il a subi ou refusé de subir des agissements contraires aux principes énoncés aux deux premiers alinéas". Ainsi, "aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leur sexe".
L'article 36 ter du projet de loi "relatif à l'égalité et à la citoyenneté", adopté en première lecture à l'Assemblée nationale le 6 juillet 2016, prévoit les mêmes dispositions (voir ci-contre notre article du 23 juin).

Mise à disposition de locaux par les collectivités pour les syndicats (article 27) : "Les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent mettre à disposition des syndicats des locaux, lorsque ces derniers en font la demande", précise l'article. Le responsable de la collectivité "détermine les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés compte tenu des nécessités de l'administration des propriétés de la collectivité, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public". Parallèlement, les instances politiques fixent "en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation". La mise à disposition peut faire l'objet d'une convention entre le syndicat et la collectivité.
"Lorsque des locaux ont été mis à la disposition d'une organisation syndicale pendant une durée d'au moins cinq ans, la décision de la collectivité ou de l'établissement de lui en retirer le bénéfice sans lui proposer un autre local lui permettant de continuer à assurer ses missions lui ouvre le droit à une indemnité spécifique, sauf stipulation contraire de la convention" entre la collectivité et le syndicat. Ces dispositions sont applicables "aux locaux mis à disposition d'organisations syndicales avant la publication de la loi".
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 21 juillet d'un recours de députés Les Républicains contre cette mesure. Les auteurs de la saisine "s'interrogent sur la conformité de cette obligation de dédommagement avec le principe de libre administration des collectivités territoriales".

Financement du CPF des salariés de droit privé par les employeurs publics (article 40) : les conditions de financement du compte personnel de formation des salariés de droit privé employés par des personnes publiques (Etat, collectivités locales, établissements publics) sont précisées dans le projet de loi. Deux cas de figure seront possibles :  les employeurs publics ne contribuant pas auprès du CNFPT au titre du CPF de leurs salariés de droit privé devront prendre en charge directement les frais pédagogiques et annexes engendrés par la mobilisation du CPF ; les employeurs publics peuvent aussi choisir de verser au CNFPT "une cotisation assise sur les rémunérations des bénéficiaires des contrats de droit privé qu'ils emploient". L'établissement prendra alors en charge "les frais pédagogiques et les frais annexes" de ces salariés lorsqu'ils utilisent leur CPF. Le montant de la cotisation sera fixé par décret, dans la limite de 0,2% de la masse salariale concernée.
Les établissements relevant de la fonction publique hospitalière peuvent choisir de verser leur contribution CPF à l'organisme collecteur de fonds de formation pour la fonction publique hospitalière, et non au CNFPT.

CPA pour les agents publics (article 44) : le texte prévoit que le gouvernement légifère par ordonnance pour "mettre en œuvre" un CPA (compte personnel d'activité) pour chaque agent public. Il doit permettre "d'informer son titulaire de ses droits à formation et ses droits sociaux liés à sa carrière professionnelle, ainsi que de permettre l'utilisation des droits qui y sont inscrits".
L'ordonnance devra définir les conditions d'utilisation et les modalités de gestion de ce compte, mais aussi les règles de portabilité des droits lorsqu'un agent public change d'employeur, y compris lorsqu'il change de statut, et des droits inscrits sur le CPA des autres actifs acquérant la qualité d'agent public.
Le texte pourra également "renforcer les garanties en matière de formation des agents publics, notamment les droits et congés y afférents" et "les garanties applicables aux agents publics en matière de prévention et d'accompagnement de l'inaptitude physique, améliorer les droits et congés pour raisons de santé ainsi que le régime des accidents de service et des maladies professionnelles applicables aux agents publics".
Cette ordonnance permettra aussi d'adapter aux agents publics la future plateforme de services en ligne gérée par la Caisse des Dépôts.
Le texte réglementaire sera pris "dans un délai de neuf mois" à compter de la promulgation de la loi et le projet de loi de ratification sera "déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l'ordonnance".

Apprentissage (article 73) : cet article crée un nouveau chapitre dans le code du travail consacré au "développement de l'apprentissage dans le secteur public non industriel et commercial". Il s'agit d'intégrer les contrats d'apprentissage signés dans la fonction publique au droit commun de l'apprentissage fixé par le code du travail. Les modalités de mise en œuvre seront détaillées dans un décret en Conseil d'Etat.

Groupements d'employeurs (article 90) : l'article L.1253-19 du code du travail relatif aux groupements d'employeurs composés d'adhérents de droit privé et de collectivités territoriales est ainsi modifié : dans le but de favoriser le développement de l'emploi sur un territoire, des personnes de droit privé peuvent créer, avec des collectivités territoriales et leurs établissements publics "ou avec des établissements publics de l'Etat" des groupements d'employeurs constitués sous la forme d'associations.

Formation des bénéficiaires de contrat aidé (article 98) : le projet de loi modifie l'article 28 de la loi du 1er décembre 2008 réformant les politiques d'insertion. Ainsi, les actions de formation destinées aux personnes bénéficiant d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi et d'un contrat d'avenir peuvent être financées, pour tout ou partie par le CNFPT "ainsi que par une cotisation obligatoire assise sur les rémunérations des bénéficiaires" des CAE (contrats d'accompagnement dans l'emploi), dont le taux est fixé par décret. Pour mémoire, le CAE s'adresse aux employeurs du secteur non marchand.
 

 

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