PLF 2012 - Logement : réforme à tous les étages
Le projet de loi de finances (PLF) pour 2012 est - à nouveau - l'occasion d'un grand remue-ménage dans le secteur du logement. Celui-ci se joue à deux niveaux : les crédits budgétaires de la mission "Ville et logement" bien sûr, mais aussi la fiscalité. Sur ce dernier point, l'objectif affiché par le PLF 2012 est de "renforcer l'efficacité de la politique fiscale en faveur du logement".
Le Scellier à nouveau réformé
Quatre mesures sont prévues à ce titre. La première consiste à "proroger en les adaptant les mesures de soutien à l'investissement locatif". D'un côté, les dispositifs "Scellier" et "Censi-Bouvard" sont prorogés jusqu'au 31 décembre 2015, soit une durée supplémentaire de trois ans. Mais, en contrepartie de cette "visibilité ainsi apportée aux opérateurs et aux investisseurs", le Scellier fait l'objet d'une nouvelle réforme. Pour Benoist Apparu, le secrétaire d'Etat chargé du Logement, "on revient à un niveau à peu près équivalent au dispositif Robien". En pratique, la "niche" Scellier fait l'objet du coup de rabot standard - le ministère préfère parler de "réduction homothétique" - de 10%, ramenant ainsi le taux de la réduction d'impôt à 14%, "ce qui permet de maintenir un niveau de rentabilité suffisante pour inciter à l'investissement dans le neuf, et soutenir ainsi la construction et le développement d'une offre locative bien située et de qualité". Le Scellier dit "intermédiaire" bénéficierait pour sa part du taux de réduction d'impôt de 22%, en contrepartie de plafonds de loyers réduits et de durées de location plus longues. Benoist Apparu a également confirmé qu'un décret viendra prochainement instaurer des plafonds de prix différenciés par zone géographique, afin "de limiter l'impact du dispositif sur le prix des logements neufs et de recentrer l'offre sur les zones les plus tendues". Enfin, l'avantage Scellier sera réservé, dès l'an prochain, aux logements BBC (bâtiments basse consommation), alors que ce classement ne deviendra la norme qu'en 2013. Dans un souci de cohérence, l'avantage fiscal du dispositif "Censi-Bouvard" sera, pour sa part, ramené à 12%.
Un Cidd recentré et des étudiants mieux logés
Ce recentrage fiscal vaut aussi pour le crédit d'impôt sur le développement durable (Cidd). La logique est la même : une prorogation du dispositif - pour atteindre l'objectif du Grenelle II d'une réduction de 38% de la consommation d'énergie dans l'habitat -, mais en contrepartie d'un aménagement. Celui-ci ne consiste pas en une réduction des taux, mais passe par une modification des modalités du dispositif : priorité donnée aux bouquets de travaux (avec une majoration de dix points des taux de Cidd) et possibilité de cumuler - sous condition de ressources - le Cidd et l'éco-PTZ (prêt à taux zéro), tandis qu'à l'inverse, les taux du Cidd seraient réduits - voire l'aide supprimée - pour les travaux isolés. L'objectif affiché est de "lutter contre les effets d'aubaine et viser à une meilleure efficience de la dépense publique". Enfin, dans le même esprit d'encouragement aux investissements à fort retour énergétique (et donc généralement coûteux), l'éco-PTZ devrait voir sa durée de remboursement passer de dix à quinze ans.
Le PLF 2012 prévoit également deux autres mesures fiscales, de portée toutefois plus anecdotique. Tout d'abord, comme annoncé, le texte prévoit l'instauration d'une taxe sur les loyers abusifs des chambres d'étudiants, un phénomène essentiellement francilien, sinon même parisien. Tout logement d'une surface de moins de 13 m2 dont le loyer dépasse un seuil fixé par décret sera ainsi taxé, avec une forte progressivité pour ramener les propriétaires récalcitrants à des comportements raisonnables. Le seuil de déclenchement de cette taxation devrait être de 40 euros mensuels par mètre carré. Enfin, le PLF 2012 prévoit de proroger le crédit d'impôt sur le revenu instauré sur les dépenses d'équipement de l'habitation principale et destiné à favoriser le maintien à domicile des personnes âgées, handicapées ou dépendantes.
Crédits en hausse ou en baisse ?
Qu'en est-il du côté budgétaire ? Globalement, les crédits de paiement de la mission "Ville et logement" progressent légèrement, à hauteur de 1,16%, atteignant ainsi un total de 7,721 milliards d'euros. Cette enveloppe recouvre quatre programmes : "Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables" (1,204 milliard d'euros) - qui couvre notamment l'hébergement d'urgence -, "Aide à l'accès au logement" (5,603 milliards), "Développement et amélioration de l'offre de logement" (365 millions d'euros) et "Politique de la ville et Grand Paris" (548 millions). Mais cette légère hausse recouvre des évolutions qui ne vont pas manquer de faire grincer quelques dents. La progression résulte en effet d'une hausse de 300 millions d'euros des crédits destinés à financer l'aide personnalisée au logement (APL), soumise à condition de ressources. Si les aides à la personne sont ainsi préservées, les aides à la pierre connaissent en revanche un coup de frein. C'est le cas des aides directes aux organismes HLM, qui passent de 500 à 450 millions d'euros. Pour Benoist Apparu, le budget logement - dans son ensemble (c'est-à-dire y compris les aides fiscales comme l'exonération de taxe foncière ou la TVA à taux réduit) - permettra néanmoins de financer l'an prochain les 120.000 logements sociaux annoncés. Un argument qui n'a pas vraiment convaincu l'Union sociale pour l'habitat, qui tient congrès à Bordeaux. Thierry Repentin, son président, estime en effet qu'"en réalité, le budget est en forte diminution".