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Habitat - Le secteur du logement victime d'une "addiction à la dépense fiscale"

Après l'Assemblée nationale, le 27 juin, le Sénat a adopté à son tour en première lecture, le 7 juillet, le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2010. Le rapport établi par la commission des finances du Sénat à cette occasion retrace l'exécution des principaux programmes et missions du budget de l'Etat et les enseignements qu'il convient d'en tirer. Elaboré sous l'égide de Philippe Marini - rapporteur général de la commission des finances -, ce document consacre notamment un chapitre très instructif à la mission "Ville et logement". Rédigé par Philippe Dallier, sénateur (UMP) de Seine-Saint-Denis et spécialiste des questions de logement, il se penche en particulier sur "l'addiction à la dépense fiscale" de ce secteur. Il est vrai que les chiffres sont éclairants.
Ainsi, la dépense fiscale liée à la mission "Ville et logement" a progressé de 27% entre 2007 et 2010. Encore ce chiffre ne retient-il que les dépenses sur impôts d'Etat et sur impôts locaux, pris en charge par l'Etat, qui sont rattachées à titre principal à la mission. Si l'on s'en tient au seul programme 135 ("Développement et amélioration de l'offre de logement") - qui regroupe 96% des dépenses fiscales de la mission, avec 11,5 milliards d'euros en 2010 -, la hausse est même de 32%.

Une capacité de pilotage limitée par le poids du financement fiscal

Cette progression ne correspond que très partiellement à un effort fiscal supplémentaire en faveur du logement. Il s'agit en effet, pour l'essentiel, d'un transfert de la dépense budgétaire vers la dépense fiscale : sur la même période (2007-2010), les crédits budgétaires de la mission "Ville et logement" ont ainsi diminué de 18% en autorisations d'engagement (AE) et ont été stabilisés en crédits de paiement (+1%). Au final, les dépenses de la mission - budgétaires et fiscales - ont progressé de "seulement" 6% sur quatre ans. Conséquence pointée par le rapporteur au regard du nécessaire redressement des comptes publics : "le 'gain' réalisé en économies sur la mission s'est trouvé plus que compensé par la multiplication des mesures fiscales". De plus, selon Philippe Dallier, "la dépense fiscale présente le triple inconvénient d'être mal estimée, moins maîtrisable et d'échapper au contrôle du Parlement". Il reprend également l'argument de la note d'exécution budgétaire (NEB) établie par la Cour des comptes, faisant valoir que le poids des dépenses fiscales dans le financement du logement limite la capacité de pilotage du responsable de programme.
Sur le programme 109 ("Aide à l'accès au logement") - qui représente 5,561 milliards d'euros en AE et CP consommés, correspondant à la contribution de l'Etat aux 12 milliards d'euros de dépenses du fonds national d'aide au logement (Fnal) -, le rapport constate que la sous-budgétisation des crédits reste "importante en valeur absolue", mais tend néanmoins à diminuer. En revanche, il se montre critique sur le doublement de la dotation de l'Anil (Association nationale d'information sur le logement) entre 2009 et 2010, estimant qu'"aucun élément dans le rapport annuel de performances ne justifie l'utilisation de ces crédits supplémentaires".
Le jugement est beaucoup plus positif sur le programme 135 ("Développement et amélioration de l'offre de logements"), qui - sous l'effet de transferts de crédits en provenance d'autres programmes - a consommé, en 2010, 740,6 millions d'euros en AE (+45%) et 804 millions en CP (+28%). Le rapport estime notamment que "l'apport du plan de relance peut [...] être considéré comme déterminant dans les résultats remarquables de production de logements enregistrés en 2010", soit 131.509 logements, contre 119.842 en 2009 et 104.441 en 2008.

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : Projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2010 (adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 28 juin 2011 et par le Sénat le 7 juillet 2011).

 

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