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Habitat - Politiques du logement : la salade composée de l'été 2011

C'est une tradition à Localtis. Avant de partir en vacances, nous proposons à nos lecteurs préférés - dont vous êtes, naturellement - un point sur l'actualité de ces derniers mois. Une sorte de grande salade composée des sujets sur le logement.

Pour réussir une salade composée, il faut de bons ingrédients de base. En général, une loi fait l'affaire. En matière de logement, l'approvisionnement est régulier. Certes, on n'a pas toujours la chance d'avoir une loi SRU à se mettre sous la dent : du contenu, des débats politiques agités et, dix ans après… un bilan consensuel. Mais en 2004, on avait la délégation des aides à la pierre, dont la Cour des comptes a dressé un bilan plutôt positif récemment. En 2006, la loi Engagement national pour le logement. On disait alors de ce texte qu'il allait devenir "la nouvelle bible" du secteur, construire "des passerelles entre urbanisme et logement" et permettre aux maires de "mobiliser le foncier" à l'aide d'outils fiscaux. Trois ans après, bilan de la loi ENL.
En 2007, il y a eu la loi Dalo (droit au logement opposable). De quoi écrire un nombre infini d'articles sur le fonctionnement des commissions de médiation ou ses difficultés de mise en oeuvre. Dès l'été 2007, la ministre affirmait d'ailleurs que "son objectif principal" était l'application de ce texte. On s'interrogeait déjà : comment concilier la responsabilité de l'Etat sur le Dalo et le pouvoir grandissant des collectivités en matière de logement ? Certains dénonçaient une reprise en main de l'Etat. Quatre ans après, bilan de cette reprise en main par le Conseil économique et social, par le Comité de suivi de la loi Dalo, et point d'étape sur ce que font les intercommunalités pour le logement aujourd'hui.
Cependant, au lendemain de l'élection présidentielle de 2007, l'essentiel pour Christine Boutin était de donner de la perspective aux politiques du logement et de l'hébergement : la ministre insistait sur la "nécessaire cohérence et fluidité de toute la chaîne du logement, qui va de l'hébergement d'urgence à l'accession à la propriété". Cette "fluidité" préoccupe toujours, cinq ans après, et en dépit de la refondation, le secteur de l'hébergement.
Et puis la ministre avait été catégorique : elle ne "cherche pas à accrocher son nom à une loi". Heureusement, les ministres changent d'avis. Un projet de loi de mobilisation pour le logement et de lutte contre l'exclusion tout neuf était à l'ordre du jour du dernier Conseil des ministres de l'été 2008. Les médias, sensibles au goût ministériel pour l'anonymat, ont rapidement rebaptisé cette loi Boutin, loi "Molle". Après le baptême, les articles s'enchaînent : les péripéties parlementaires, la crise qui s'ajoute à tout cela (Noël 2008), puis le chapelet de décrets.

Un peu de vinaigrette budgétaire

Avec l'arrivée de Benoist Apparu en juin 2009, la pénurie menaçait à nouveau : la source inépuisable de décrets que constituait la loi du 25 mars 2009 commençait à se tarir et le jeune ministre jugeait qu'il y avait "trop de lois sur le logement", qu'il avait "tous les outils en main". Or, depuis deux ans, le secrétaire d'Etat a tenu parole. Toujours pas de "loi Apparu" dans nos colonnes. L'urbanisme de projet, qui aurait pu être une occasion, se fera essentiellement par ordonnances. La seule issue en la matière pour le ministre serait de revenir en deuxième semaine, après mai 2012.
Cependant, et même en l'absence de loi sur le logement, on ne s'est pas ennuyé ces derniers mois. Fin 2010, on a parlé de la réforme des aides de l'Anah, du plan de lutte contre la précarité énergétique, de la requalification des quartiers anciens dégradés, des rapprochements entre organismes HLM autorisés par la loi Warsmann. Autant de sujets qui n'ont pas trop fâché dans la grande famille du logement.
Comme dans toutes les familles cependant, certains s'aiment mieux de loin : les débats budgétaires de la fin 2010 autour du "prélèvement péréquatif" sur les organismes HLM et l'universalité du nouveau prêt à taux zéro en ont témoigné. On s'est disputé aussi au printemps, sur le décret concernant l'avenir du livret A. Tous ces dossiers sont désormais à peu près bouclés. Même si les décrets et arrêtés d'application du fameux prélèvement ne sont pas encore parus au Journal officiel.
A la rentrée, le décret sur l'utilisation des fonds du 1% devrait occuper le grand repas de famille que constitue traditionnellement le congrès HLM de fin septembre. Pris en application de la loi Molle, ce texte vise surtout à trouver des fonds pour l'Anru et l'Anah pour 2012, 2013 et 2014. Le gouvernement a fait connaître sa position fin juillet après plusieurs mois de discussions houleuses avec les partenaires sociaux.  Action logement est mécontent du projet gouvernemental et appelle le secteur HLM à se mobiliser. Mais cette fois, et contrairement à la fameuse affaire du prélèvement de l'an dernier, on est dans le domaine réglementaire : en adoptant la loi Molle, les parlementaires ont donné au gouvernement le pouvoir d'agir librement sur ce sujet. Certains pourraient cet automne ne plus se souvenir de leur vote d'hier. D'autres devraient avoir de la mémoire. Il n'est pas certain que tout le monde HLM (et les élus locaux) mouille sa chemise pour défendre le système du 1%. Certains en effet devraient mettre en balance le risque de se retrouver avec des factures sur les zones Anru payées tardivement ou des Opah au financement incomplet. D'autres encore se souviendront qu'après le premier PNRU (plan national de rénovation urbaine), il en faudra bien un deuxième, avec des crédits conséquents pour les copropriétés dégradées... et que si on n'arrive pas à payer le premier, c'est mal engagé pour le deuxième. Mais pour l'instant, c'est l'été, une salade composée, le soleil et... le reste attendra la rentrée.