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Social - Les services à la personne réclament à nouveau une réforme de la tarification

Alors que le débat national sur la dépendance bat son plein, les acteurs de l'aide à domicile se rappellent au bon souvenir des pouvoirs publics. Le "collectif des 16" tenait ainsi, le 11 avril dernier, un point presse sur la situation et l'avenir du secteur, particulièrement malmené depuis plusieurs mois. Comme son nom le laisse entendre, le collectif regroupe tous les grands acteurs à but non-lucratif de l'aide à domicile : Unccas, Croix-Rouge Française, Uniopss, UNA, Mutualité Française, AD-PA, ADMR, Adessa... Le titre du communiqué publié par le collectif est en forme de question : "Se faire aider à domicile est-il devenu un luxe ?". Il s'accompagne d'un dossier de presse très fouillé, qui livre une présentation détaillée du secteur et de ses enjeux.

Les difficultés des financements publics menacent le secteur

Le communiqué du collectif affirme que "l’Etat reste sourd aux appels au secours répétés des professionnels et des bénéficiaires". Les signataires mettent notamment en cause les "difficultés des financements publics", ce qui vise le refus de l'Etat de mettre en place un fond d'urgence, mais aussi les départements (à travers l'allocation personnalisée d'autonomie) et l'assurance vieillesse (à travers l'aide ménagère pour les personnes classées en GIR 5 et 6, autrement dit faiblement dépendantes). Ils estiment notamment que "le transfert vers les départements des charges liées aux politiques sociales sans contrepartie financière, des choix politiques peu transparents dans le domaine de l’aide aux personnes fragiles et des choix budgétaires aveugles (suppression des exonérations 'services à la personne' dans la loi de finances 2011) mettent en danger les services d’aide à domicile publics et privés non lucratifs et leur mission d’utilité sociale" (voir nos articles ci-contre du 10 janvier et du 14 février 2011). Les organismes à but non-lucratif estiment, par conséquent, que "les coûts inhérents doivent être reconnus dans les prix de revient intégrés par l’Etat, les caisses de sécurité sociale et les collectivités locales".

La corde sensible de l'emploi

Pour se faire entendre, ils ne manquent pas de rappeler le rôle clé de ces services dans le maintien à domicile, avec 220 millions d'heures réalisées chaque année auprès de publics fragiles et plus de deux millions de personnes prises en charge. Mais ils jouent aussi sur la corde sensible de l'emploi, d'autant plus que ceux de l'aide à domicile ne sont pas délocalisables. Le communiqué rappelle ainsi que "les services solidaires font partie des premiers employeurs dans de nombreuses régions". Il cite en particulier l'exemple du Nord-Pas-de-Calais, région dans laquelle les emplois des services à la personne "représentent 70.000 personnes, soit le double de l’ensemble de la filière automobile". Pour sortir des difficultés actuelles, le collectif des 16 revient sur ses demandes de mise en place d'un fonds de soutien sur deux ans, d'un retour sur la suppression des exonérations (qui touchent le secteur de l'aide aux familles) et d'une révision du système de tarification, en partenariat avec les différents acteurs du secteur. Le collectif s'est d'ailleurs rapproché de l'Association des départements de France (ADF), afin d'engager une négociation sur ce dernier point.
Si aucun accord ne semble se dégager, pour l'instant, sur les solutions à apporter, la réalité de la crise de l'aide à domicile n'est, en revanche, plus discutée. Le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'Inspection générale des finances (IGF) en a confirmé l'ampleur (voir notre article ci-contre du 11 janvier 2011). Ce document pointe les causes évoquées par le collectif - à commencer par un niveau de tarification ne couvrant pas le coût de revient des services -, mais n'exonère pas les organismes gestionnaires de toute responsabilité. Ceux-ci présentent en effet de "grandes disparités" dans les coûts de revient et certains d'entre eux se sont lancés dans des rapprochements et des rachats hasardeux. Si le secteur est ainsi en difficulté, il n'est pas pour autant sinistré. Le 18 avril, le groupe Malakoff Médéric, spécialisé dans la protection sociale complémentaire, et Europe Assistance France, filiale de l'assureur italien Generali, ont ainsi annoncé leur association au sein d'une entreprise commune, en vue de développer des services à la personne, en particulier auprès des salariés.