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PLF 2011 - Aide à domicile : fronde contre la suppression de l'exonération des cotisations employeurs

Dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances (PLF) pour 2011, l'Assemblée nationale doit examiner l'article 90 qui supprime les exonérations ou réductions de cotisations patronales de sécurité sociale, pour certains emplois à domicile, mises en place en 2005 à l'occasion du plan Borloo de développement des services à la personne. L'article 90 supprime ainsi l'abattement forfaitaire de 15 points sur les cotisations sociales dues par les particuliers employeurs cotisant sur l'assiette réelle. Mais, en supprimant le III bis de l'article L.241-10 du Code de la sécurité sociale, il met également fin à la franchise de cotisations patronales (à l'exclusion des cotisations accidents du travail et maladies professionnelles) dans la limite du Smic, sans plafond de rémunération, dont bénéficient les prestataires agréés ou déclarés intervenant auprès de publics dits "non fragiles". Les services prestataires se contenteront donc désormais des dispositifs de droit commun d'allègement des charges sociales sur les bas salaires.

Pour justifier cette mesure, le gouvernement fait valoir la nécessité, "dans un contexte budgétaire particulièrement contraint", de cibler les avantages accordés "sur les publics qui en ont le plus besoin". Il indique également que "la mesure proposée n'affecte pas les exonérations de cotisations sociales spécifiques, ni les aides fiscales, dont bénéficient les publics dits 'fragiles' (les personnes de plus de 70 ans, dépendantes, invalides, handicapées ou ayant un enfant handicapé, ainsi que les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie) lorsqu'ils recourent à une aide à domicile, que ce soit en emploi direct ou par l'intermédiaire d'une entreprise ou d'une association agréée". Les incitations fiscales (réduction ou crédit d'impôt) au recours aux services à la personne sont également maintenues (elles ont finalement échappé au "coup de rabot" sur les niches fiscales). L'opération n'est cependant pas neutre, puisque le gouvernement attend de cette suppression d'exonérations une économie de l'ordre de 460 millions d'euros en 2011.

Mais les associations regroupant les services prestataires d'aide à la personne ne l'entendent pas de cette oreille. Elles ont ainsi publié un communiqué rassemblant la quinzaine de grands acteurs du secteur : Unccas, Uniopss, Mutualité  Française, Croix-Rouge, APF, UNA... Les signataires affirment notamment que "la suppression de cette exonération [...] touchera bien les publics dits 'fragiles'". Elles rappellent également que la mesure ne pénalisera pas uniquement les services prestataires mais aussi les services d'aide au domicile auprès des familles en difficulté, financés en particulier par les départements et les caisses d'allocations familiales.

Mais la principale inquiétude des fédérations signataires se situe ailleurs. Elles estiment en effet que, lors de la mise en place des exonérations, "les conseils généraux et les caisses de sécurité sociale (CAF, Cram) ont rapidement intégré cette nouvelle exonération de cotisations, ce qui a conduit à une baisse de leur participation financière". Elles craignent aujourd'hui "que la suppression de cette exonération en 2011 ne soit pas compensée par une hausse des financements accordés aux associations et aux entreprises". Alors que les services d'aide à domicile connaissent de sérieuses difficultés, les organisations concernées estiment "que l'impact de cette suppression sur le coût de revient des structures est de 1,5 à 2% sur les services 'personnes âgées et personnes handicapées', et de 10 à 15% sur les services 'familles' et les interventions sans prise en charge". Elles demandent donc le retrait de l'article 90, ce qu'elles ont toutefois peu de chances d'obtenir a priori.


Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : projet de loi de finances pour 2011 (examiné par l'Assemblée nationale du 18 octobre au 17 novembre 2010).