Services à la personne - L'arrivée de l'intérim inquiète un secteur en crise
Le ministère du Travail a confirmé avoir mis à l'étude une modification législative qui autoriserait les sociétés d'intérim à intervenir dans le secteur des services à la personne. Le gouvernement répondrait ainsi à une demande pressante du Prisme (Professionnels de l'intérim, services et métiers de l'emploi), qui représente les entreprises de la branche. Si la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale a élargi le champ de l'intérim, il reste néanmoins interdit à une agence d'intérim de proposer des services à la personne, sauf dans l'hypothèse où il s'agit de remplacer temporairement un salarié d'une structure agréée de services à la personne ou un salarié employé directement par un particulier. Avec ses 900.000 emplois en équivalent temps plein et sa croissance quasi continue (à l'exception d'une pause en 2008), les services à la personne intéressent fortement - en dépit des difficultés actuelles du secteur - les sociétés d'intérim. La principale d'entre elles - Adecco - a d'ailleurs monté une structure spécifique (hors activité d'intérim) pour prendre pied sur ce marché. Mais la séparation imposée entre ces deux activités pèse sur la rentabilité et la filiale spécialisée d'Adecco n'affiche qu'une activité très modeste. L'ouverture des services à la personne aux sociétés d'intérim passerait vraisemblablement par une loi, même si le Prisme estime que ce changement serait possible par un simple décret. En tout état de cause, une loi serait bien nécessaire pour étendre aux entreprises d'intérim le bénéfice des exonérations fiscales et sociales dont bénéficient les actuels prestataires de services à domicile.
Même si le ministère du Travail prend bien soin de préciser que le dossier ne devrait pas déboucher à court terme, cette annonce n'est pas vraiment une bonne nouvelle pour les actuels prestataires de services à la personne disposant d'un agrément qualité, c'est-à-dire habilités à intervenir auprès de publics fragiles (personnes âgées, enfants de moins de trois ans, personnes handicapées...). La crise du secteur va en effet plutôt en s'aggravant (voir nos articles ci-contre). D'après l'OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques), l'année 2009 pourrait se traduire par un coup de frein plus appuyé que celui de 2008, qui avait déjà vu la croissance du secteur passer d'une moyenne de 8% par an à 1,8%. Cette analyse de l'OFCE confirme d'ailleurs les chiffres avancés en novembre dernier par l'Agence nationale des services à la personne (ANSP), qui s'attendait à 16.000 créations d'emploi en 2009, contre 23.000 en 2008. Cette situation inquiète de plus en plus les syndicats. En février, l'ensemble des organisations syndicales de retraités (CFDT, CFTC, CFE-CGC, CGT, FO, Unsa, ainsi que la Fédération générale des retraités de la fonction publique) ont ainsi publié un communiqué commun, dans lequel elles "s'inquiètent vivement du nombre croissant d'associations de services à la personne qui sont en difficulté financière".
Jean-Noël Escudié / PCA