Sécurité - Les policiers municipaux réclament un meilleur échange d'informations
Un effet d'annonce ? C'est un peu le sentiment des syndicats de policiers municipaux suite à la signature par Brice Hortefeux du décret sur l'utilisation du pistolet à impulsion électrique Taser. Cette décision intervient en effet à un moment délicat dans les relations entre la police municipale et le gouvernement. Le drame de Villiers-sur-Marne qui, le 20 mai, a coûté la vie à une policière municipale, a mis la profession à cran alors que, depuis plusieurs mois, elle est en conflit ouvert avec le secrétaire d'Etat aux Collectivités, Alain Marleix, au sujet d'un protocole d'accord sur l'avenir statutaire de la filière. Un appel à la grève générale a été lancé pour le 1er juin pour réclamer un volet social mais le calendrier s'est un peu précipité. Le 20 mai, une proposition de loi a été déposée à l'Assemblée par le député Patrick Balkany sur l'intégration des primes dans le calcul des pensions de retraite. Par ailleurs, Brice Hortefeux a convié les syndicats à Beauvau jeudi pour évoquer les conditions de travail et de sécurité. Et le lendemain, la réunion tripartie demandée depuis plusieurs semaines par les syndicats aura bien lieu : l'intersyndicale rencontrera le cabinet d'Alain Marleix en présence de l'Association des maires de France pour discuter du fameux protocole… Deux réunions clés dont dépendra le climat des jours à venir et le maintien ou non de la journée du 1er juin.
Dans ce contexte, l'utilisation du Taser, qui n'était pas une demande formelle des syndicats, apparaît un peu comme une mise en bouche. Les vrais plats sont attendus pour la suite. La publication du décret était une affaire de jours. Une réunion du 23 avril avec les syndicats avait permis de peaufiner sa rédaction, notamment sur les garanties en matière de formation. C'est en effet sur ce point que le Conseil d'Etat s'était arrêté en septembre dernier pour demander de suspendre l'utilisation du Taser accordée aux policiers municipaux depuis un décret de 2008. Le nouveau texte qui sera publié au Journal officiel dans les prochains jours corrigera donc ce manque en matière de formation. Les nombreuses communes, comme Nice, qui avaient commencé à s'équiper, pourront ainsi ressortir les pistolets du placard.
L'accès aux fichiers amélioré
Au-delà du Taser, les policiers réclament une remise à plat de leurs prérogatives, du "mode opératoire", au moment où la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi 2) vient encore leur donner de nouvelles compétences, se surajoutant à sept textes pris en une dizaine d'années. "Notre métier est en cours de professionnalisation, la formation s'est nettement améliorée, nous exerçons un métier de police à part entière, mais en même temps, on nous demande toujours plus alors que la situation sur la voie publique est de plus en plus tendue", constate Patrick Carballo, le secrétaire national de la FA-FPT. Et l'affaire de Villiers-sur-Marne ne fait que conforter ce sentiment. L'une des revendications des syndicats tient à l'amélioration des échanges d'informations avec leurs homologues nationaux. Les policiers municipaux se plaignent souvent de ne pas être suffisamment tenus informés de ce qui se passe sur leur commune. Prenant en compte "la place croissante des polices municipales dans la chaîne de la sécurité", une circulaire du 25 février 2010 leur a ouvert l'accès aux fichiers de personnes recherchées et des véhicules volés, condition nécessaire pour procéder à la mise en fourrière par exemple. De même avaient-ils déjà accès aux fichiers relatifs aux permis de conduire ou aux immatriculations de véhicules. En revanche, les données d'antécédents judiciaires (fichiers Stic et Judex) leur restent fermées. Par ailleurs, pour des raisons de confidentialité, les policiers municipaux ne peuvent pas être connectés au réseau Acropol de la Police nationale. Les syndicats profiteront de la réunion du 27 mai pour demander au ministre une circulaire clarifiant les modalités de communication entre les différents corps. "Nous pouvons aujourd'hui avoir des moyens de communication de qualité numérique tels qu'ils garantissent les conditions de confidentialité, mais il faut une directive claire du ministre pour que localement cela suive", estime Patrick Carballo. Déjà, certains services de police ont pris les devants. Dans le cadre de la convention de coordination qui lie la commune au préfet, la police de La Grande-Motte a mis à disposition des gendarmes et pompiers son réseau radio. "Cet été, nous souhaitons également associer les CRS qui assurent la sécurité des plages", explique Jean-Michel Weiss, le patron de la police grand-mottoise.
Michel Tendil