Audiovisuel - Les nouvelles télévisions locales ne peuvent pas se passer des collectivités
L'Union des télévisions locales de service public (TLSP) publie les résultats d'une étude réalisée conjointement avec Didier Bailleux Consultant et consacrée aux "modèles économiques de la télévision locale hertzienne en France". Portant sur 20 chaînes en exercice et 14 chaînes en cours de montage, il s'agit en l'occurrence d'un état des lieux de la situation des télévisions locales au regard de leur financement et de leur équilibre financier. Cette étude tombe à pic, après que les chaînes ont connu à l'automne dernier une véritable série noire, qui fait douter de la viabilité de leur modèle économique (voir notre article ci-contre). Si l'étude montre que les télévisions locales sont dans des situations très différentes, elle confirme néanmoins que "le marché publicitaire qu'il soit local, régional ou national n'offre pas suffisamment de potentiel pour financer à 100% les chaînes locales". De façon plus précise, les recettes publicitaires couvrent - en moyenne - moins de la moitié des frais de fonctionnement. Ainsi, pour un coût d'exploitation des chaînes en exercice de l'ordre de 4 euros par mois et par habitant initialisé, les revenus publicitaires et divers sont en moyenne de 1,5 à 2 euros. Cette situation a une double conséquence. D'une part, elle fragilise les télévisions locales : sur la trentaine de chaînes locales hertziennes en exercice, seule une petite dizaine présentent aujourd'hui une exploitation en équilibre ou en voie de l'être. D'autre part, l'insuffisance des ressources publicitaires contraint les chaînes locales à trouver d'autres sources de financement. Et, en ce domaine, les collectivités territoriales figurent en première ligne.
L'étude fait néanmoins apparaître de fortes différences selon les types de télévisions locales. Les chaînes hertziennes "historiques" (Télé Lyon Métropole, Télé Toulouse, TV8 Mont-Blanc...) n'affichent ainsi que 11% de financement public. Il est vrai qu'elles bénéficient de bonnes audiences et qu'elles ont eu le temps de se forger un marché publicitaire et de développer d'autres partenariats. Les chaînes hertziennes récentes (TV Nantes, TV Tours...) présentent un taux de financement public très voisin (15%), mais une situation économique beaucoup plus fragile, faute d'une audience et de recettes publicitaires comparables - pour l'instant - aux chaînes hertziennes historiques. La situation est très différente pour les chaînes historiques du câble passées récemment en diffusion hertzienne (TV Rennes 35, Canal 15, Angers 7...), qui affichent 60% de financement public. Ce taux considérable s'explique par le fait que les collectivités ont souvent été à la fois à l'origine du câblage et de la création d'une chaîne pour alimenter le câble. Enfin, les nouvelles chaînes locales diffusées directement sur la télévision numérique terrestre (TNT), sans passer par le câble ou la diffusion analogique, se trouvent dans une situation intermédiaire. Elles affichent en effet, à leur démarrage, un taux de financement public de l'ordre de 35%. Ces chaînes sont représentatives du nouveau modèle qui semble émerger des appels à candidatures successifs du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) depuis novembre 2007 : celui de télévisions locales avec des budgets proportionnellement moins importants que les chaînes historiques, une diffusion souvent plus restreinte et des financements publics plus conséquents. Face à cette évolution, il reste aujourd'hui à inventer un modèle de télévision locale capable de préserver une indépendance éditoriale et de se créer une crédibilité, tout en dépendant fortement de subventions publiques (et non pas de recettes fiscales affectées, comme les chaînes publiques nationales).
Jean-Noël Escudié / PCA