Petite enfance - Les modes de garde, une dépense qui rapporte
Dans le dernier numéro de sa revue "Politiques sociales et familiales", la Caisse nationale d'allocations familiale (Cnaf) consacre un article aux "Retombées économiques des politiques d'accueil de la petite enfance". S'il s'agit d'une revue de littérature sur le sujet et non pas d'une étude originale, ce texte n'en apporte pas moins plusieurs enseignements intéressants sur une prestation pensée le plus souvent en termes de charge pour la collectivité. Parmi les différentes études passées au crible, les auteurs retiennent en particulier ce qu'ils appellent "l'effet papillon". Celui-ci se traduit en particulier par un impact positif des modes de garde sur les résultats scolaires ultérieurs voire - selon certaines études américaines - sur les taux de délinquance futurs. Ce retour serait particulièrement important pour les classes moyennes. Mais l'effet le plus évident concerne l'impact sur les revenus. L'article reprend en particulier une étude française menée sur la région de Grenoble (voir notre article ci-contre du 31 juillet 2008). Celle-ci démontre l'effet bénéfique de l'obtention d'une place en crèche sur le taux d'activité des femmes et, par conséquent, sur le revenu des ménages. Cet effet positif est nettement supérieur au coût acquitté par les parents pour leur mode de garde. Si la création de places de crèches est ainsi favorable au retour à l'emploi et aux revenus, plusieurs études démontrent au contraire le caractère désincitatif à l'emploi de l'allocation parentale d'éducation, puis du complément de libre choix d'activité.
L'un des intérêts de cette revue de littérature réalisée par la Cnaf est d'aborder la même question des retombées économiques des politiques d'accueil de la petite enfance sous l'angle des financeurs. Les auteurs s'attardent ainsi sur une étude menée par la CAF d'Ille-et-Vilaine sur la ville de Saint-Malo. Elle a consisté à mettre en mettre en parallèle les dépenses de la branche Famille dans la petite enfance et les emplois directs et indirects induits par cette politique. Ainsi, les 1,35 million d'euros versés par la CAF pour les différents modes de garde sur Saint-Malo se traduisent par 323 emplois, à temps plein ou à temps partiel : 14 encadrants à temps plein, 33 encadrants à temps partiel et 276 assistantes maternelles. D'autres études étrangères retiennent une approche davantage macroéconomique. Une étude suédoise démontre ainsi qu'un investissement de la collectivité de 72.850 euros pour assurer la garde d'un enfant en crèche engendre un gain salarial de 314.400 euros pour la mère (qui peut ainsi travailler) et un retour fiscal de 110.000 euros, autrement dit supérieur à l'investissement public initial... Une étude suisse sur le même sujet donne des résultats très voisins.
Conclusion de l'article de la Cnaf : "On peut noter qu'un grand nombre de travaux, situés dans des pays aux caractéristiques différentes en termes institutionnels, soulignent que, plus qu'un coût, les dépenses en direction des jeunes enfants peuvent être considérées comme un investissement."
Jean-Noël Escudié