Dépendance - Les Ehpad sont devenus des acteurs majeurs des soins aux personnes très âgées
Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) vient d'adopter, à l'unanimité, un avis intitulé "Vieillissement, longévité et assurance maladie : constats et orientations". La note et ses annexes sont centrées sur les dépenses de santé, mais les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) sont directement concernés. C'est en particulier le cas pour les personnes de 75 ans et plus, qui ne représentent que 8% de la population, mais concentrent environ le cinquième des dépenses de soins.
Le Haut Conseil commence par mettre à mal un certain nombre d'idées reçues. Ainsi, les dépenses de santé des moins de 60 ans (54% du total) sont supérieures à celles des plus de 60 ans et les dépenses du jeune âge (moins de 10 ans) représentent une somme équivalente à celles du grand âge (85 ans et plus). Enfin, les dépenses de la dernière année de vie ne représentent en réalité que 7 à 8% - en moyenne - de la dépense totale de santé d'une vie. Ces rappels posés, il reste que les personnes âgées bénéficient "plus que proportionnellement à leur nombre" de la couverture de l'assurance maladie, même si le HCAAM prend bien soin de rappeler que ceci "ne traduit rien d'autre que la solidarité fondamentale entre bien-portants et malades". Tout en reconnaissant l'impact du vieillissement sur la hausse des dépenses de santé, le Haut Conseil estime que celui-ci "n'a rien d'une déferlante". Le véritable enjeu concerne plutôt l'impact du vieillissement sur la répartition interne entre les différents types de dépenses de soins. Ceci se traduit notamment par la nette progression, qui s'accélère avec l'âge, des soins infirmiers et de ceux délivrés par les établissements et services médico-sociaux, dont les Ehpad. Ces dépenses prennent en effet "un poids tout à fait déterminant" au-delà de 80 ans. Le même phénomène pourrait d'ailleurs toucher également les journées d'hospitalisation de cette tranche d'âge, qui devraient croître de 28% à l'horizon 2030. Pour autant, le Haut Conseil ne trouve pas "d'explication épidémiologique évidente" qui pourrait, à elle seule, expliquer ces évolutions et recommande donc de développer les études en la matière.
Mais le HCAAM estime surtout "qu'une part importante de la dépense individuelle moyenne très élevée aux grands âges s'explique par des inadaptations structurelles". La note se fait alors plus critique en évoquant un certain nombre de phénomènes. C'est, par exemple, le cas de la surreprésentation des personnes très âgées dans les "lits-porte" des urgences hospitalières. Le Haut Conseil estime que cette surreprésentation offre "une sorte de mesure visible de leur prise en charge sous-optimale en amont de l'hôpital". Il pointe en particulier "le frein que peut constituer le poids du 'reste à charge' d'hébergement dans les situations où un accueil en Ehpad serait médicalement le plus indiqué". Il regrette à nouveau de ne pouvoir disposer d'un système d'information permettant une vision du "coût complet" des soins délivrés à une personne âgée accueillie en institution. Le Haut Conseil préconise donc - en s'inspirant du plan Alzheimer 2008-2012 - de mieux organiser les soins "autour de la personne âgée", en renforçant la coopération et la coordination entre les différents acteurs "avec une urgence et une force exemplaires". Ceci suppose notamment une plus grande ouverture de l'hôpital sur l'extérieur, mais aussi un développement de la contractualisation avec les établissements médicosociaux, ainsi qu'une meilleure information des personnes âgées et de leur famille. Sur ce point, le Haut Conseil attend beaucoup de la création - effective depuis le 1er avril - des agences régionales de santé (ARS), qui "constitue, si ces dernières se saisissent véritablement de cet enjeu en développant notamment des relations étroites et construites avec les conseils généraux, une réponse d'une extrême pertinence".
Jean-Noël Escudié / PCA