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Personnes âgées - Vers un compromis sur les médecins coordonnateurs en Ehpad

Un décret du 26 avril 1999 ainsi que la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médicosociale ont instauré l'obligation, pour les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) signataires d'une convention tripartite (établissement, département et Etat pour l'assurance maladie), de s'adjoindre les services d'un médecin coordonnateur. Celui-ci est notamment chargé d'élaborer le projet général de soins, d'organiser la coordination des professionnels de santé salariés et libéraux exerçant dans l'établissement, d'évaluer et de valider l'état de dépendance des résidents et de contribuer à l'évaluation de la qualité des soins. Si l'intérêt de la présence d'un médecin coordonnateur en Ehpad n'est pas contesté, sa mise en place s'est heurtée à de nombreuses difficultés. La moindre n'est pas la tension qui survient souvent dans les relations entre les médecins libéraux qui interviennent dans l'établissement et le médecin coordonnateur, qui est lui aussi un médecin libéral. Les conflits en la matière ont conduit récemment le conseil de l'ordre des médecins à hausser le ton sur le respect du principe du libre choix de leur médecin par les résidents (voir notre article ci-contre 12 juin 2009).  
Intervenant, le 24 novembre, devant les 7es Assises du médecin coordonnateur, Nora Berra a cherché à calmer le jeu. La secrétaire d'Etat chargée des Aînés a notamment pris position sur les préconisations du rapport du groupe de travail animé par le professeur Claude Jeandel, président du Collège professionnel des gériatres français. Le rapport correspondant ne lui sera toutefois remis officiellement que le 14 décembre. Evoquant "un diagnostic partagé", la ministre a d'ores et déjà retenu plusieurs mesures issues du rapport. Elle a ainsi annoncé la création au sein de chaque Ehpad d'une commission de coordination gériatrique (CCG), présidée par le médecin coordonnateur et rassemblant l'ensemble des parties concernées par le projet de soins, y compris les professionnels libéraux. De même, un contrat devrait être signé par les professionnels libéraux de santé intervenant au sein de l'Ehpad. Ce contrat type, qui doit faire l'objet d'une concertation avec les ordres professionnels et les différentes parties concernées, définira les droits et obligations réciproques du médecin coordonnateur et des autres intervenants extérieurs, mais aussi les conditions de rémunération. Nora Berra a indiqué qu'"en tout état de cause, l'existence d'un tel contrat et son caractère opposable pour dispenser les soins en Ehpad [lui] paraissent incontournables". Elle a également tenu à réaffirmer le principe du libre choix de son médecin traitant par le résident, répondant ainsi aux demandes du conseil de l'ordre des médecins. Elle a notamment indiqué que "cette liberté de choix doit être garantie par des informations précises qui devront être communiquées au résident". Elle a également suggéré que "dans le cas où le résident n'aurait pas de médecin traitant, l'Ehpad lui propose, à titre informatif, la liste des professionnels médicaux et paramédicaux exerçant dans l'établissement et signataires de ce contrat". En complément du contrat passé avec l'établissement, la secrétaire d'Etat chargée des Aînés propose aussi de formaliser une charte de bonnes pratiques entre le médecin traitant et le médecin coordonnateur.
Enfin, deux autres mesures concernent plus spécifiquement le seul médecin coordonnateur. L'une concerne la reconnaissance d'un "périmètre de prescription" pour ce dernier. En d'autres termes, le médecin coordonnateur aurait la possibilité de prescrire "pour faire face aux situations de risque vital ou de pandémie, et dès lors que les médecins traitants, dûment informés, ne seront pas en mesure de répondre dans les délais nécessaires". La seconde mesure consiste à renforcer le rôle des médecins coordonnateurs dans la gouvernance de l'outil Pathos (méthode de mesure de la prise en charge nécessaire aux polypathologies de personnes âgées, en complément de la grille Aggir sur la dépendance). La plupart de ces mesures, issues du rapport Jeandel et reprises par le gouvernement, devront toutefois faire l'objet de textes réglementaires avant d'entrer en vigueur.  

 

Jean-Noël Escudié / PCA