Santé - Les critères de fermeture des petits hôpitaux se précisent
Après une période d'apaisement, la question de la fermeture des services de court séjour de certains petits hôpitaux locaux est brusquement revenue sur le devant de la scène, à l'occasion de la publication, par le Journal du Dimanche du 4 juillet, d'une carte indiquant les établissements qui seraient menacés de fermeture. Environ 70 hôpitaux seraient ainsi concernés.
Tout en démentant fermement la validité de cette carte, le ministère de la Santé a été contraint de confirmer un certain nombre d'informations. La principale d'entre elles concerne la préparation d'un décret qui fixera les seuils d'activité minimale pour justifier le maintien d'un service de chirurgie. Ce texte, qui devrait être publié à la fin du mois de juillet ou au début du mois d'août, fixerait ce plancher à 1.500 interventions par an (avec sans doute des précisions sur la nature de ces interventions à travers la cotation des actes pratiqués). Seraient ainsi visés les services de chirurgie ayant réalisé moins de 1.500 interventions par an entre 2007 et 2009. Cela ne signifierait pas nécessairement une fermeture des services concernés. En effet, le décret devrait prévoir une période probatoire pour les établissements dont l'activité au cours de cette période aura représenté au moins 70% du seuil de 1.500 interventions (soit 1.050 opérations). Ceux-ci auraient alors trois ans pour atteindre le seuil minimal, soit en développant leur activité, soit en s'associant à d'autres établissements. Ils peuvent notamment, pour cela, intégrer une communauté hospitalière de territoire (CHT) entre établissements publics ou un groupement de coopération sanitaire (GCS) entre structures publiques et privées.
Fidèle à une ligne maintes fois répétée, le ministère de la Santé met en avant la sécurité des malades, en considérant qu'un faible nombre d'interventions ne permet pas aux équipes médicales de disposer de l'expérience et de la pratique indispensables. Cette position rejoint celles du rapport Vallancien de 2006 ou du rapport de l'Académie nationale de chirurgie. Le ministère rappelle également qu'il ne s'agit pas de fermer des services, mais de les restructurer ou - à défaut - de les reconvertir (en moyen ou long séjour ou en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes).
APVF : une approche "purement comptable"
Bien que représentant l'ensemble des établissements hospitaliers, la Fédération hospitalière de France est sur la même longueur d'ondes. Son président Jean Léonetti - qui a succédé à l'ancien ministre Claude Evin et est également praticien hospitalier et député (UMP) des Alpes-Maritimes - indique ainsi, dans une interview au Journal du Dimanche, que "lorsque les médecins opèrent peu, le geste est moins sûr. Les statistiques des sociétés savantes sont implacables". Il rappelle aussi que "dans certains cas, les blocs opératoires concernés fonctionnent à un rythme très ralenti avec moins d'un séjour dans le service par jour", ce que confirment certains chiffres publiés : par exemple, 114 interventions par an en moyenne au CH du Chinonnais (Indre-et-Loire), 122 au CH de Le Cateau (Nord), 129 au CH de Saint-Tropez (Var) ou encore 181 au CH de Vire (Calvados).
L'Association des petites villes de France (APVF), en revanche, ne l'entend pas de cette oreille. Dans un communiqué du 5 juillet, elle fait part de sa "très vive inquiétude" et dénonce "l'application mécanique et purement comptable du nombre d'actes réalisés dans les centres hospitaliers", qui "méconnaît tout à la fois les réalités géographiques et d'aménagement du territoire et tout simplement l'intérêt des patients qui habitent dans les petites villes et dans les zones rurales". Confortée par des décisions juridiques récentes (voir notre article ci-contre du 21 avril 2010), l'APVF va donc réunir à Paris, "dans les prochains jours", l'ensemble des maires concernés et demande à être reçue en urgence par la ministre de la Santé.
La coordination nationale des Comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité a elle aussi réagi lundi "Ceux qui font trop d'actes n'ont parfois pas le temps de bien s'occuper des patients concernés", estime-t-elle, dénonçant une politique qui vise à "restreindre le service public et à favoriser le privé lucratif" et stigmatisant des "annonces centralistes".
Jean-Noël Escudié / PCA