PLF 2017 - Le Sénat juge "toujours incertain" le financement de l'accueil des demandeurs d'asile
Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2017, Esther Benbassa, sénatrice (Ecologiste) du Val-de-Marne, a remis son rapport, fait au nom de la commission des lois, sur les crédits du programme "Asile". Ces crédits ont fait l'objet, suivant en cela la position de la rapporteure, d'un avis favorable de la commission de lois. Ceci n'empêche pas Esther Benbassa et la commission de formuler un certain nombre de remarques, voire d'inquiétudes, sur les crédits correspondants et sur les perspectives d'évolution des dépenses.
L'hébergement en Cada est "loin d'être la norme"
Le PLF 2017 prévoit une enveloppe de 280 millions d'euros - en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP) - pour financer 40.000 places de centres d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada). Pour sa part, l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile (Huda) bénéficiera de 245,76 millions d'euros en AE et de 118 millions d'euros en CP (la différence s'expliquant par le lancement d'un appel à projets pour la création de 5.351 places relevant du dispositif AT-SA, accueil temporaire - service de l'accueil). Ce montant doit financer 21.200 places réparties en places AT-SA - pour un peu plus de la moitié - et en places d'hébergement gérées au niveau déconcentré par les préfets.
Malgré ces efforts budgétaires, le rapport observe que "l'hébergement des demandeurs d'asile en Cada est loin d'être la norme". Au 31 décembre 2015, 61.018 personnes étaient ainsi susceptibles d'être hébergées en Cada, mais seules 22.524 l'étaient effectivement, soit un taux de 36,9% (contre 39,4% en 2014). Par ailleurs, environ 3.800 personnes étaient hébergées en AT-SA et 18.868 en Huda.
Du coup, "une part non négligeable des demandeurs d'asile est hébergée soit chez l'habitant, soit plus probablement dans le dispositif d'hébergement d'urgence généraliste", ce qui renvoie au débat récurrent sur la "concurrence" entre les deux dispositifs.
Inquiétude sur le niveau des crédits, mais pérennisation de l'aide aux communes
En termes budgétaires, le rapport "s'interroge à nouveau sur le réalisme de la dotation prévue par le projet de loi de finances eu égard à la consommation de crédits sur ce poste au cours des dernières années". En particulier, les crédits consacrés à l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile (hors Cada) sont certes en légère augmentation (118 millions d'euros) par rapport à ceux prévus en loi de finances initiale (LFI) pour 2016 (111,5 millions d'euros).
Mais, selon la rapporteure, "ils apparaissent toutefois insuffisants par rapport aux crédits consommés par le passé, quand bien même le nombre de places en Cada aurait augmenté". A l'exception de l'exercice 2015, les résultats en exécution sont d'ailleurs systématiquement supérieurs à ceux votés en LFI (jusqu'à +270% en 2010 et +236% en 2011).
De même, le PLF 2017 prévoit une dotation de 220 millions d'euros au titre de l'allocation temporaire d'attente (ATA), correspondant au versement d'une allocation d'un montant journalier par ménage de 8,50 euros pour 70.000 personnes sur douze mois. Si l'effort budgétaire est réel, le rapport estime néanmoins que "les versements mensuels devraient s'établir à 26 millions d'euros en moyenne pour 2016, soit sur douze mois un montant total de 312 millions d'euros. En dépit de l'augmentation de la prévision, de nouveaux abondements en cours d'exercice pour faire face à l'augmentation de la demande sont donc à craindre".
En revanche, la rapporteure se félicite de la consécration budgétaire de l'aide aux communes de 1.000 euros par place d'hébergement créée en Cada ou en AT-SA ou par place dans un logement mis à disposition. L'ouverture d'une ligne budgétaire de 4 millions d'euros en AE et en CP permettra de pérenniser cette aide aux communes en 2017.
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : Sénat, projet de loi de finances pour 2017, avis de la commission des lois sur les crédits du programme "Asile".