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Aide sociale à l'enfance - Le Sénat adopte la proposition de loi sur la protection de l'enfant

Le Sénat a adopté en première lecture, le 11 mars 2015, la proposition de loi de Michelle Meunier, sénatrice (PS) de Loire-Atlantique, et Muguette Dini, sénatrice (UDI) du Rhône, relative à la protection de l'enfant (pour le contenu du texte, voir notre article ci-contre du 25 septembre 2014). Ce texte avait auparavant été examiné - et amendé - par la commission des affaires sociales du Sénat (voir notre article ci-contre du 5 décembre 2014). Il s'inspire très directement des conclusions du rapport d'information "Protection de l'enfance : améliorer le dispositif dans l'intérêt de l'enfant", présenté par les deux sénatrices en juin dernier (voir notre article ci-contre du 25 juin 2014).

Pas de "Conseil national de la protection de l'enfance"

La discussion en séance publique aurait dû intervenir dès le 11 décembre, mais l'encombrement du calendrier parlementaire a conduit à interrompre la séance avant la fin de la discussion générale. L'examen du texte a repris le 28 janvier, avant de s'interrompre à nouveau pour s'achever finalement le 11 mars avec une adoption à l'unanimité...
Au fil de ces séances, le Sénat a adopté plusieurs amendements importants. Il a ainsi supprimé l'article 1er, qui instaurait un Conseil national de la protection de l'enfance. L'exposé des motifs précise en effet "qu'il est illusoire d'imaginer qu'une nouvelle instance nationale va permettre de piloter un dispositif de protection de l'enfance entièrement décentralisé et de la compétence des départements depuis 1983".
Sur amendement du gouvernement, les sénateurs ont également introduit un article supplémentaire (avant l'article 5), qui ajoute dans les missions de l'aide sociale à l'enfance (ASE) celle de "veiller à la stabilité du parcours de l'enfant confié et à l'adaptation de son statut sur le long terme". Un amendement de principe, dont les conséquences pratiques n'apparaissent toutefois pas très évidentes.

Obligation d'accompagnement et kafala

Un autre amendement, déposé au nom de la commission des affaires sociales, modifie la rédaction de l'article 13. Il prévoit qu'en cas de restitution à l'un de ses parents d'un enfant né sous le secret ou pupille de l'Etat, il appartient au président du conseil général de proposer "un accompagnement médical, psychologique, éducatif et social du parent et de l'enfant pendant les trois années suivant cette restitution afin de garantir l'établissement des relations nécessaires au développement physique et psychologique de l'enfant ainsi que sa stabilité affective".
Les sénateurs ont adopté - malgré l'avis défavorable du gouvernement - un article additionnel (après l'article 21) qui traite du cas des enfants recueillis en kafala (procédure d'adoption propre aux pays musulmans, qui interdit l'adoption plénière et pose donc des problèmes récurrents pour sa reconnaissance en droit français). Reprenant une proposition du rapport Gouttenoire (voir notre article ci-contre du 22 avril 2014), cet article additionnel réduit de cinq ans à deux ans le délai permettant à un "enfant qui, depuis au moins deux années, est recueilli en France et élevé par une personne de nationalité française ou est confié au service de l'aide sociale à l'enfance" d'acquérir la nationalité française. Dès lors qu'il a acquis cette nationalité, l'enfant peut en effet faire l'objet d'une adoption plénière. Lors de la discussion en séance, les auteurs de l'amendement ont fait valoir "qu'il n'y a qu'en France que l'on respecte la kafala. Dans tous les autres pays européens, les enfants adoptés sous ce régime prennent la nationalité des parents adoptifs dans les deux ans".

Opposition entre commissions sur l'inceste

Enfin, un amendement présenté au nom de la commission des lois supprime l'article 22 qui introduisait l'inceste dans le Code pénal, car la notion "n'y figure pas textuellement". A l'encontre de l'avis de la commission des affaires sociales, le rapporteur de la commission des lois estime en effet qu'"il nous faut une réflexion plus approfondie. Des questions complexes se posent. Quid des cousins germains, par exemple ? Ils ont le droit de se marier et pourtant ils seraient considérés comme incestueux ! L'inceste n'est pas forcément lié à une violence".
Le Conseil constitutionnel ayant déjà censuré une loi introduisant la notion d'inceste dans le Code pénal, l'article risquait de s'exposer à une nouvelle censure. A l'occasion de cette divergence de position entre les deux commissions, Laurence Rossignol - secrétaire d'Etat chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie - s'est déclaré favorable à une réflexion plus approfondie et a indiqué que le gouvernement a "saisi le Conseil d'Etat pour trouver une rédaction adaptée".

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : proposition de loi relative à la protection de l'enfance (adoptée par le Sénat en première lecture le 11 mars 2015).

 

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