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Communication / Culture - Le refus de laisser photographier des oeuvres d'art ne porte pas atteinte à la liberté du commerce

Un arrêt du Conseil d'Etat du 29 octobre 2012 apporte des précisions importantes sur le droit à photographier. Il ne s'agit pas, cette fois-ci, du droit à l'image des individus, mais du droit, pour un professionnel, de photographier des oeuvres du patrimoine exposées dans un musée. En l'espèce, le maire de Tours avait refusé, par une décision implicite (absence de réponse), à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Photo Jousse le droit de photographier certaines des oeuvres exposées dans le musée des beaux -rts de la ville.
Saisi d'un recours de l'intéressé demandant l'annulation de la décision de refus implicite du maire de Tours, le tribunal administratif d'Orléans avait, dans un premier temps, rejeté cette requête dans un jugement du 20 janvier 2009. Saisie à son tour, la cour administrative d'appel de Nantes avait au contraire, dans un arrêt du 4 mai 2010, fait droit à l'appel du requérant.
Selon l'arrêt de la cour, le maire de Tours avait méconnu le principe de la liberté du commerce et de l'industrie, en opposant "un refus pur et simple à la demande de l'entreprise sans examiner avec elle la possibilité d'exercer son activité dans des conditions compatibles avec les nécessités de la gestion du musée municipal et du respect de l'intégrité des oeuvres, alors que des autorisations de photographier des oeuvres de ce musée avaient auparavant, et à plusieurs reprises, été délivrées à des photographes professionnels dans le cadre de conventions particulières fixant les conditions des prises de vues et de leur utilisation".
Mais dans son arrêt du 29 octobre 2012, le Conseil d'Etat annule la décision de la cour administrative d'appel et donne raison à la ville de Tours. L'arrêt rappelle certes que "l'autorité chargée de la gestion du domaine public peut autoriser une personne privée à occuper une dépendance de ce domaine ou à l'utiliser en vue d'y exercer une activité économique, à la condition que cette occupation ou cette utilisation soit compatible avec son affectation et sa conservation". Mais le Conseil d'Etat juge en revanche "que la décision de refuser une telle autorisation, que l'administration n'est jamais tenue d'accorder, n'est pas susceptible, par elle-même, de porter atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie, dont le respect implique, d'une part, que les personnes publiques n'apportent pas aux activités de production, de distribution ou de services exercées par des tiers des restrictions qui ne seraient pas justifiées par l'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi et, d'autre part, qu'elles ne puissent prendre elles-mêmes en charge une activité économique sans justifier d'un intérêt public". Dans ces conditions, la cour administrative d'appel de Nantes a commis une erreur de droit en fondant sa décision sur une méconnaissance supposée du principe de la liberté du commerce et de l'industrie.