Culture - Frédéric Mitterrand favorable à l'interdiction de photographier dans les musées
En juin dernier, la décision du musée d'Orsay d'interdire aux visiteurs de filmer ou de photographier les oeuvres présentées - dans les collections permanentes comme dans les expositions temporaires - avait suscité une polémique (voir notre article ci-contre du 29 juin 2010). Patrick Beaudouin, député du Val-de-Marne, avait alors adressé une question écrite au ministre de la Culture. Il l'interrogeait notamment sur "la légitimité d'interdire la reproduction d'oeuvres appartenant au patrimoine public, par des visiteurs ayant payé leur billet" et sur d'éventuelles arrière-pensées commerciales des musées ayant décidé une interdiction. Il estimait en effet que "si la possibilité demeure d'obtenir des musées et monuments des reproductions photographiques, leur coût, souvent très élevé, peut conduire à remettre en cause la diffusion du patrimoine artistique auprès d'un large public [...]". Dans ces conditions, le député du Val-de-Marne souhaitait connaître les mesures envisagées par le ministre de la Culture face à ces interdictions, "susceptibles d'aller à l'encontre de l'objectif de démocratisation culturelle".
A chaque musée de décider
Dans sa réponse - qui devrait intéresser tous les musées -, le ministre de la Culture soutient très clairement la position du musée d'Orsay, sans pour autant envisager une mesure généralisée d'interdiction. Il se fonde notamment sur le fait que la diffusion croissante des appareils photographiques numériques - en particulier ceux incorporés aux téléphones portables - "a amené des changements dans les pratiques des visiteurs des musées et monuments". Ces pratiques portent "préjudice au confort de la visite de l'ensemble des publics", en particulier devant les œuvres les plus emblématiques, et l'usage des flashes - théoriquement interdit - est "nuisible pour la conservation des œuvres" (le problème ne se posant toutefois pas pour les photos prises par les téléphones portables). De plus, certains clichés sont ensuite diffusés sur des blogs ou des sites internet. Dans sa réponse, le ministre indique également que plusieurs grands musées européens ont pris des mesures d'interdiction comme le Prado, le Rijksmuseum ou la Tate Modern. Il rappelle que les sites internet des musées proposent des images en ligne des oeuvres de leurs fonds et que le ministère met lui-même à disposition la base Joconde (catalogue des collections des musées de France), ainsi que le portail thématique et le moteur de recherche des collections, sans oublier désormais le portail Europeana. Enfin, le ministre de la Culture indique que la décision d'interdiction prise par le musée d'Orsay "a été bien accueillie par les agents de surveillance". Une affirmation qui passe sous silence le fait que le syndicat CGT du musée avait au contraire vivement protesté contre cette mesure (voir notre article ci-contre du 29 juin 2010).
Au final, loin de condamner la position du musée d'Orsay, le ministre de la Culture estime au contraire que "la possibilité de prendre des photographies apparaît [...] comme une question relevant du fonctionnement quotidien des musées et monuments nationaux, qui sont à même d'apprécier les questions de sécurité des collections et de confort de la visite, leur mise en cause pouvant les conduire à interdire les prises de vue par les visiteurs".
Jean-Noël Escudié / PCA
Référence : question écrite numéro 81937 de Patrick Beaudouin, député du Val-de-Marne, et réponse du ministre de la Culture et de la Communication (JOAN du 8 mars 2011).