Habitat - Le PTZ+ a favorisé l'accès au logement des plus modestes, mais au prix d'un fort endettement
L'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale (Onpes) publie les résultats d'une étude sur l'accession à la propriété des ménages pauvres et modestes. Ce travail a été réalisé par Michel Mouillart, professeur d'économie à l'université Paris-Ouest et spécialiste reconnu du logement, par ailleurs membre de l'observatoire. Ainsi que l'indique l'Onpes, le résultat de cette étude est "contre-intuitif". Il montre en effet que les ménages pauvres (premier décile de revenus disponible) et modestes (2e et 3e déciles) "accèdent à la propriété de manière relativement importante, comparativement au taux d'accès des autres catégories d'accédants".
Ce résultat s'explique essentiellement par les effets du prêt à taux zéro (PTZ). Dans les années 1995-2005, la réduction du nombre de PTZ accordés et la hausse du prix des logements a freiné l'accession à la propriété des ménages défavorisés. La part des catégories modestes parmi les accédants est ainsi tombée à 40,7% (dont 14,6% pour les ménages gagnant moins de deux Smic) au cours de la période 2002-2006, contre 48,5% au cours de la période précédente.
La réforme du PTZ engagée en 2005 - avec notamment l'ouverture à l'ancien sans travaux - et l'actualisation des plafonds de ressources du prêt à l'accession sociale ont très nettement inversé la tendance. Depuis 2006, la part des accédants modestes est légèrement supérieure à 50% (dont 23% pour les moins de deux Smic), "soit l'un des taux les plus importants depuis le début des années 1980".
Ce résultat positif possède toutefois quelques revers. Tout d'abord, l'accession se fait au prix d'un effort important, surtout pour les ménages pauvres. Leur taux d'effort est ainsi en moyenne de 36,8%, contre 30,9% pour les ménages aux revenus moyens et 32,1% pour l'ensemble des ménages.
Ensuite, les logements acquis par les ménages pauvres ou modestes présentent des caractéristiques particulières. Contrairement à une idée reçue, ils ne se différencient pas par la surface, ni par le type d'habitat. Les logements acquis ont même une surface légèrement supérieure (de 2 à 3 m2) à ceux des ménages moyens ou aisés (un écart qui s'explique par le fait que le nombre moyen de personnes dans la famille est, lui aussi, plus élevé). De même, les ménages pauvres et modestes accèdent plus fréquemment à des maisons individuelles que les ménages moyens ou aisés (l'écart étant toutefois très minime). La vraie différence tient au choix du lieu et du type de commune dans lesquels se déroule l'accession. L'accession des ménages pauvres ou modestes se fait en effet rarement sur Paris et l'agglomération parisienne. Elle est en revanche surreprésentée dans les communes rurales (moins de 2.000 habitants) et dans les villes de moins de 200.000 habitants.
Au final, le coût de l'accession pèse plus lourdement sur les ménages pauvres et modestes. Il représente ainsi 6,9 années de revenus pour les ménages modestes et 7,9 années pour les ménages pauvres, contre 5,2 années pour les ménages moyens et aisés. Cet écart s'explique notamment par un moindre apport personnel (19% contre 23%) et par le recours à des crédits de plus longue durée.