Habitat - Accession à la propriété : le PTZ nouveau est arrivé
Lors d'un déplacement à Thiais (Val-de-Marne), ce mardi 14 septembre, Nicolas Sarkozy a présenté une réforme des aides à l'accession à la propriété. Celle-ci est destinée à augmenter la proportion de Français propriétaires – qui s'élève actuellement à 58% contre une moyenne européenne de 66% - conformément à ce qui avait été annoncé lors de la campagne présidentielle de 2007. La réforme repose principalement sur un nouveau prêt à taux zéro, baptisé "PTZ+", qui va remplacer le PTZ actuel, le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt de la loi Tepa et le Pass-foncier. Ce nouveau PTZ sera "ciblé sur les primo-accédants", "universel, c'est-à-dire accordé sans condition de revenus" et "plus favorable pour les familles avec enfants", a déclaré le président de la République.
Si le ciblage sur les primo-accédants et le caractère universel avaient déjà fait l'objet d'annonces au cours de l'été (voir nos articles ci-contre), les zonages, les taux et les modulations en fonction de la taille de la famille et de la performance énergétique du logement ont été présentés lors d'une conférence de presse ce même jour par Benoist Apparu. Trois principes sont au fondement de la réforme, a expliqué le secrétaire d'Etat au Logement : "Simplifier les aides, mieux cibler les zones tendues, encourager la construction de logements." Sur le caractère simple du dispositif, le lecteur jugera de cet article. Le ciblage sur les zones tendues (A et B1) et sur le neuf est en tout cas incontestable.
Le montant du prêt : encourager le neuf en ville, l'ancien à la campagne
Première étape : déterminer le montant du prêt. Celui-ci est égal à un pourcentage du montant de l'opération, dans la limite d'un plafond. Jusqu'à présent, le PTZ représentait (hors doublement dans le cadre du plan de relance) 20% du montant de l'opération sur l'ensemble du territoire. Désormais, ce taux dépend de la localisation et des caractéristiques du bien. Pour une acquisition dans le neuf, il varie de 40% en zone A (Paris et proche banlieue) pour un logement respectant la norme BBC, à 15% en zone C (villes de moins de 50.000 habitants) pour un logement non BBC. Pour une acquisition dans l'ancien, le taux est de 20% pour un logement ayant une bonne performance énergétique (étiquette "énergie" A, B, C ou D) et de 10% pour les autres (E, F, G). Cette variation de taux se combine avec une forte évolution des plafonds d'opérations : ils augmentent dans toutes les zones, mais plus fortement en zone A et B1 (parfois de plus de 50%).
Un exemple ? Jusqu'à présent (hors doublement du PTZ dans le cadre du plan de relance), un couple avec deux enfants souhaitant acheter un appartement neuf à Paris (zone A) pouvait bénéficier d'un PTZ s'élevant à 20% d'un montant plafond de 137.500 euros, soit 27.500 euros, à condition d'avoir des revenus inférieurs à 57.000 euros par an. Désormais, quels que soient ses revenus, s'il choisit un logement neuf BBC, ce couple pourra bénéficier d'un prêt à taux zéro d'un montant de 124.800 euros.
Pourquoi ces nouveaux modes de calcul ?
L'objectif de ces nouvelles formules est d'encourager la construction dans le neuf en zone tendue (Ile-de-France et grandes villes de province), d'inciter à l'acquisition dans l'ancien et à la réalisation de travaux en zone C. Pour la zone C, dans laquelle étaient distribués plus de la moitié des PTZ ces dernières années, Benoist Apparu a indiqué qu'il était "important de faire attention à ne pas trop construire, afin d'éviter que les centres-bourg se dégradent". Pour cela, et contrairement à la situation antérieure, les nouveaux PTZ seront cumulables avec les différentes aides aux travaux (éco-PTZ, aides de l'Anah aux propriétaires occupants, aides du plan de lutte contre la précarité énergétique). Autre différence avec le PTZ actuel : il ne semble pas que des bonifications pour les zones franches urbaines (ZFU), les zones urbaines sensibles (ZUS) ou lorsque les collectivités apportaient une aide soient prévues. En revanche une bonification est actée pour encourager les ventes de logements sociaux.
Enfin, la réforme vise également à prendre davantage en compte la taille des familles. Dans le PTZ ancienne formule, la taille de la famille n'intervenait qu'au niveau du montant du prêt. Désormais, ce facteur aura un impact sur la durée de remboursement : celle-ci variera toujours en fonction des revenus et de la localisation du bien, mais les grandes familles auront des remboursements plus étalés que les petites. La réforme ne prolonge pas le Pass-foncier dont l'échéance est prévue pour fin 2010, mais le principe de "prêt différé" devrait être conservé et intégré dans le nouveau dispositif. On ignore pour l'instant les modalités de cette intégration.
Quel coût ?
Outre l'encouragement à la propriété et la construction de logements en zone tendue, la réforme des aides à l'accession doit permettre à l'Etat de faire des économies. Le crédit d'impôt Tepa, le Pass-foncier et l'ancien PTZ sont supprimés à partir du 1er janvier prochain. Ces trois mesures coûtent, par génération (c'est-à-dire pour tous les gens qui s'engagent dans les dispositifs une année donnée), 4,2 milliards d'euros à l'Etat. Après la réforme, chaque génération de primo-accédants qui concluera des PTZ+ coûtera à l'Etat 2,6 milliards d'euros. Enfin, Benoist Apparu a souligné que pour sécuriser les accessions, le gouvernement souhaite "conserver les APL accession" (1 milliard d'euros par an). Les aides à l'épargne-logement (PEL, 1,8 milliard d'euros) seront pour leur part "conservées mais modifiées à la marge dans les prochains mois".
Réactions très positives du secteur du bâtiment, mais des interrogations sur la zone C
Le secteur du bâtiment s'est dit globalement satisfait de cette réforme. Cela se comprend : la suppression du crédit d'impôt Tepa assure l'augmentation des fonds publics ayant un impact direct sur ce secteur économique. Ainsi, Didier Riboret, président de la Fédération française du bâtiment, s'est "réjoui de cette indéniable avancée qui devrait éviter que l'arrêt de la mesure de majoration du PTZ ne provoque un trou d'air". Même satisfecit chez les promoteurs-constructeurs. A l'Union des maisons françaises, on s'interroge cependant "sur l'efficacité du dispositif en zone C notamment, zone qui regroupe les territoires où résident et travaillent 48% des accédants à la propriété". Enfin, la Fédération des coopératives HLM estime que la réforme "est de nature à favoriser l’accès à la propriété des ménages à revenus modestes et moyens, en particulier sur les territoires connaissant une forte pression de la demande". Marie-Noëlle Lienemann, présidente de la fédération, s’interroge toutefois "sur le sort réservé aux territoires connaissant une moindre pression". Elle juge par ailleurs "indispensable la mise en cohérence du nouveau prêt à taux zéro avec les dispositifs instaurés ces dernières années par les collectivités locales pour soutenir l’accession sociale à la propriété".
Si les parlementaires adoptent le projet du gouvernement en l'état dans le budget 2011, les premiers prêts nouvelle formule devraient pouvoir être distribués par les banques dès le 1er janvier 2011. Un outil de simulation est d'ores et déjà en ligne sur le site du ministère de l'Ecologie. Le dossier de presse en lien ci-dessous comprend les nouveaux plafonds, taux et zonages.
Hélène Lemesle
Références : ministère de l'Ecologie, dossier de presse "Réforme de l'accession à la propriété", du 14 septembre 2010 ; pour des informations sur le dispositif en vigueur jusqu'au 31 décembre 2010, consulter la page PTZ du site de l'Anil.