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Enseignement primaire - Le fichier "Base élèves" doit être modifié, selon le Conseil d'Etat

Dans une décision du 19 juillet, le Conseil d'Etat "a invalidé sur plusieurs points les traitements de données 'Base élèves 1er degré' et 'BNIE', utilisés par les services du ministère de l’Education nationale".
"Base élèves", mis en place à partir de 2004 et généralisé en 2009, "n’est accessible dans son ensemble qu’aux directeurs d’école, et pour partie, dans la limite de leurs attributions, aux agents des services communaux gérant les inscriptions scolaires", rappelle le Conseil d'Etat. "A la suite de la décision du ministre d’en supprimer certaines catégories de données sensibles (notamment relatives à la nationalité), il ne renferme plus que les renseignements administratifs ordinaires nécessaires à l’inscription scolaire (nom de l’élève, adresse, personne à prévenir en cas d’urgence, données relatives à la scolarité, activités périscolaires…)", explique la plus haute juridiction administrative (lire : "La mention de la nationalité sera supprimée de la base élèves" et "Base élèves : un arrêté précise les données accessibles aux maires"). "BNIE" (base nationale identifiant élèves), fichier créé en 2006, recense l'ensemble des numéros uniques, internes au ministère, qui sont attribués aux élèves lors de leur première inscription, afin de faciliter la gestion administrative de leur dossier tout au long de leur scolarité. Néanmoins, "pour que ces deux traitements puissent, compte tenu de leur utilité, continuer à être mis en œuvre, il appartient au ministère de l’Education nationale de procéder aux régularisations requises", précise la décision du Conseil d'Etat.
Il est demandé, d'une part, la suppression de données relatives à la santé des élèves affectés en classes d'insertion scolaire (Clis) collectées dans la première version de "Base élèves". L'explication en est la suivante "par leur précision, ces données permettent de connaître la nature de l'affection ou du handicap dont souffrent les élèves concernés et constituent par conséquent des données relatives à la santé, dont le traitement aurait dû être précédé d'une autorisation de la Cnil" (Commission nationale de l'informatique et des libertés). D'autre part, pour le fichier BNIE, "une nouvelle durée de conservation" des données doit être fixée, la durée actuelle de 35 ans étant jugée "irrégulière" car trop longue et injustifiée. Pour autant, le Conseil d'Etat ne remet pas en cause l'utilisation de ces fichiers. Sa décision du 19 juillet fait suite au recours, déposé en décembre 2008, par deux particuliers demandant l'annulation de l'arrêté de création de "Base élèves", en se fondant sur de nombreux motifs liés à des vices de procédures et à la violation de la loi ou de conventions internationales. Depuis quelques années, cette base de données est contestée par plusieurs organisations : des syndicats d'enseignants, la fédération de parents d'élèves FCPE, la Ligue des droits de l'homme et le Collectif national de résistance à "Base élèves" (CNRBE). Ce dernier a demandé, en novembre 2009, à l'ONU, d'intervenir en faveur des directeurs d'écoles primaires qui refusent d'enregistrer les enfants dans ce fichier informatique (lire nos articles ci-contre).
Ce 19 juillet, le ministre de l'Education nationale, Luc Chatel, a pris acte avec "satisfaction" du rappel par le Conseil d'Etat de l'importance des fichiers de recensement des élèves du primaire, en assurant qu'il répondrait aux demandes d'adaptation du Conseil. "L'Education nationale suivra bien entendu l'injonction du Conseil d'Etat concernant les données relatives au handicap collectées avant 2008", a-t-il ajouté, tout en rappelant que "ces informations ne sont plus demandées lors de l'inscription des élèves". Au sujet de BNIE, le ministère "répondra bien entendu à la demande du Conseil d'État de proposer, dans les trois mois, une nouvelle durée de conservation des données d'identification des élèves". De son côté, le syndicat enseignant du primaire SNUipp-FSU a estimé que la décision du Conseil d'Etat montrait un manque "de garanties en termes éthiques" sur ce sujet et a demandé "la création d'un observatoire indépendant".

Catherine Ficat avec AFP