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Adoption - Le Conseil constitutionnel valide l'accouchement secret

Dans une décision du 16 mai relative à une question prioritaire de constitutionnalité sur les modalités d'accès aux origines des personnes nées "sous x", le Conseil constitutionnel ne remet pas en cause le droit reconnu à la mère de s'opposer à la révélation de son identité.

 

Dans une décision du 16 mai 2012 relative à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel - saisi par un particulier - a validé les articles L.147-6 et L.222-6 du Code de l'action sociale et des familles. Ces deux articles traitent respectivement des modalités d'accès aux origines des personnes nées "sous x" et de l'observatoire national de l'enfance en danger et du 119 (le service national d'accueil téléphonique pour l'enfance en danger). Le requérant faisait valoir qu'"en autorisant une femme à accoucher sans révéler son identité et en ne permettant la levée du secret qu'avec l'accord de cette femme, ou, en cas de décès, dans le seul cas où elle n'a pas exprimé préalablement une volonté contraire, les dispositions contestées méconnaissent le droit au respect de la vie privée et le droit de mener une vie familiale normale".
Dans sa décision, le Conseil constitutionnel ne suit pas ce raisonnement. Il considère notamment que le droit reconnu à la mère de s'opposer à la révélation de son identité - même après son décès - vise "à assurer le respect de manière effective, à des fins de protection de la santé, de la volonté exprimée par celle-ci de préserver le secret de son admission et de son identité lors de l'accouchement". Mais, pour le Conseil, ce droit est reconnu à la mère naturelle "tout en ménageant, dans la mesure du possible, par des mesures appropriées, l'accès de l'enfant à la connaissance de ses origines personnelles". Dans une formulation assez inhabituelle, la décision estime "qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur l'équilibre ainsi défini entre les intérêts de la mère de naissance et ceux de l'enfant". Elle en conclut "que les dispositions contestées n'ont pas privé de garanties légales les exigences constitutionnelles de protection de la santé ; qu'elles n'ont pas davantage porté atteinte au respect dû à la vie privée et au droit de mener une vie familiale normale".
Si la décision du Conseil constitutionnel ne modifie pas l'ordre juridique et laisse ouvert le débat éthique sur le droit aux origines, elle a au moins le mérite de stabiliser le cadre dans lequel ce droit est aujourd'hui mis en œuvre. En ce sens, elle devrait faciliter la tâche des services de protection de l'enfance des départements, chargés de la mise en œuvre de l'accès aux origines personnelles et qui se trouvent souvent placés dans des situations délicates, voire douloureuses. En revanche, en semblant donner raison aux familles adoptantes plutôt qu'aux enfants adoptés à la recherche de leurs origines naturelles - même si ce n'est pas la finalité de la décision du Conseil, qui se contente de dire le droit -, elle pourrait bien relancer le conflit entre les deux parties, qui n'a jamais vraiment cessé depuis la loi du 22 janvier 2002 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l'Etat.

Références : décision n°2012-248 QPC du 16 mai 2012 (Journal officiel du 17 mai 2012).