Enfance - Une étude précise le profil des femmes qui accouchent "sous X"
Dans le dernier numéro de sa revue "Population", l'Institut national d'études démographiques (Ined) publie une étude sur un sujet assez peu exploré : les accouchements sous X en France (terme au demeurant impropre dans la mesure où l'identité de la mère est conservée, et qu'il convient donc de remplacer par "accouchement secret"). Ce dernier concerne environ 600 à 700 femmes chaque année. L'étude de l'Ined, réalisée dans 83 départements et menée en partenariat avec le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (Cnaop), porte sur la période 2007-2009 et a permis de recueillir des informations administratives sur 835 accouchements secrets, mais aussi des caractéristiques sociodémographiques et des informations sur le contexte de la grossesse pour 739 femmes.
Il en ressort un portrait assez éloigné des stéréotypes sur le sujet. Tout d'abord, l'étude permet de dégager trois profils principaux. On y trouve certes des jeunes femmes dépendantes de leurs parents (25% du total), mais aussi des femmes indépendantes (25%) et des femmes seules en situation de précarité (15%). L'image de la très jeune fille abandonnée par son partenaire et forcée elle-même d'abandonner son enfant - issue tout droit des mélodrames du 19e siècle - est également mise à mal. Le tiers des accouchements secrets concerne en effet des femmes de plus de 30 ans et 16% avaient même au moins 35 ans. L'âge moyen des femmes concernées est ainsi de 26 ans.
En revanche, la situation matérielle semble bien être un facteur important dans la décision des femmes. Ainsi, les trois quarts des femmes concernées ne disposent pas de leur indépendance financière (étudiantes, chômeuses, inactives...). Ce sont d'ailleurs les femmes qui mettent en avant les difficultés financières qui reviennent le plus souvent sur leur décision initiale d'abandon (14% des mères reprennent l'enfant dans le délai légal de deux mois après la naissance). Parmi les autres explications avancées - qui peuvent être plurielles - figure en premier lieu la situation du partenaire (43% de citations), un âge jugé trop jeune ou encore la crainte d'un rejet par la famille. Une femme concernée sur dix évoque aussi des problèmes de santé chez elle (dépression, maladie grave ou handicap, addiction...) ou chez son partenaire (toxicomanie, alcoolisme).
En termes de comportement vis-à-vis de l'enfant, il apparaît que 10% des femmes établissent la filiation au moment de la naissance (inscription sur l'acte de naissance), ce qui amène à s'interroger sur la pertinence de la notion d'accouchement secret dans ce cas de figure. En matière d'accès futur aux origines, 13% des femmes mentionnent leur identité dans le dossier de l'enfant et 29% y font figurer un pli fermé, qui pourra être ouvert ultérieurement sous certaines conditions. A l'inverse, 47% des femmes concernées ne laissent aucun renseignement susceptible de les identifier dans leur dossier.
Le dernier enseignement est d'ordre plus général et peine à trouver une explication. Alors que le nombre d'accouchements secrets recule régulièrement depuis la fin des années soixante, il a connu en 2009 une assez nette remontée. De l'ordre d'un millier par an au milieu des années 90, il était passé aux alentours de 600 au milieu des années 2000. Mais ce chiffre devrait finalement être de l'ordre de 680 pour l'année 2009.