Personnes âgées - Le Conseil constitutionnel censure le renouvellement automatique de la CMU-C pour les titulaires de l'Aspa
Dans sa décision 2013-682 DC du 19 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a censuré l'article 58 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Celui-ci, introduit par amendement, s'inscrivait dans l'esprit des mesures de simplification administrative au bénéfice des allocataires de certains minima sociaux.
Une censure sur la forme et non sur le fond
Traitant du renouvellement de l'octroi de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), l'article censuré prévoyait en effet que "le droit à cette déduction est renouvelé automatiquement pour les personnes qui bénéficient de l'allocation mentionnée à l'article L.815-1 [du Code de la sécurité sociale, ndlr] ou d'une des allocations mentionnées à l'article 2 de l'ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse". En pratique, les titulaires de l'Aspa (Allocation de solidarité aux personnes âgées) et des autres composantes du minimum vieillesse se voyaient dispensés de toute démarche de renouvellement de la CMU-C, celui-ci leur étant assuré d'office du seul fait qu'ils restaient titulaires d'un des minima sociaux (et disposant par conséquent de très faibles revenus compatibles avec le bénéfice de la CMU-C).
Dans sa décision, le Conseil constitutionnel ne remet pas en cause le principe de cette mesure. Mais il a considéré - sans surprise, tant sa jurisprudence sur ce point est constante - "que ces dispositions n'ont pas d'effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement et ne relèvent pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l'article LO 111-3 du Code de la sécurité sociale ; que, par suite, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale". En d'autres termes, il s'agit d'un "cavalier social", une disposition sans rapport avec l'objet d'une loi de financement de la sécurité sociale.
Trois autres "cavaliers sociaux" censurés
Dans sa décision du 19 décembre 2013, le Conseil constitutionnel censure également trois autres articles au titre de cavalier social. Deux d'entre eux intéressent, directement ou indirectement, les collectivités territoriales. Le premier (article 34) imposait un réexamen des conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie et les représentants des centres de santé et les incitait à examiner les conditions de l'intégration dans ces accords des forfaits de rémunération. Le second (article 37) prévoyait la remise annuelle d'un rapport du gouvernement au Parlement sur la situation des zones médicalement sous dotées. Sur ce dernier point, le Conseil considère "que ces dispositions n'ont pas pour objet d'améliorer l'information et le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale" et que "par suite, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale".
Ces différentes dispositions, dont la constitutionnalité n'est pas remise en cause, devront donc trouver leur place dans d'autres textes plus adaptés, ce qui peut parfois prendre du temps avant que se présente le bon véhicule législatif. Au-delà de ces annulations, la permanence de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur les cavaliers sociaux - et sur les cavaliers budgétaires, nombreux à avoir été également censurés dans le projet de loi de finances pour 2014 (voir notre article de ce jour) - pose à nouveau la question d'un texte spécifique pour agréger toutes ces mesures ponctuelles, comme le faisaient autrefois les projets de loi portant diverses dispositions d'ordre social (DDOS).
Références : Conseil constitutionnel, décision 2013-682 DC du 19 décembre 2013 et loi du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 (Journal officiel du 24 décembre 2013).
Collectivités : que reste-il du PLFSS 2014 ?
La censure, par le Conseil constitutionnel, des différentes dispositions évoquées ci-dessus réduit la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2014 à la portion congrue, du moins pour ce qui concerne les mesures intéressant les collectivités territoriales. Ceci est d'autant plus vrai que le texte originel du projet de loi était déjà pauvre en mesures de ce type (voir notre article ci-contre du 26 septembre 2013).
Déduction faite des dispositions annulées par le Conseil constitutionnel, on retiendra bien sûr - comme chaque année - la
fixation de l'Ondam médicosocial (objectif national des dépenses d'assurance maladie) à +3% (contre 4% dans la LFSS 2013). Au-delà de cet exercice récurrent, la principale mesure de la LFSS 2014 intéressant les collectivités restera, à l'issue d'un bras de fer entre les parlementaires et le gouvernement,
l'affectation de 100 millions d'euros issus de la Casa (contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie, destinée à financer la future loi Autonomie)
au financement de la dépendance dès 2014 (voir notre article ci-contre du 16 octobre 2013).
Autre mesure importante : le geste du gouvernement, face à la grogne de sa majorité, sur
l'Aspa et l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS) : une double revalorisation de l'Aspa en 2014 (dont les taux restent à préciser) et une revalorisation de 10% du montant de l'ACS pour les personnes de plus de 60 ans, qui passera ainsi de 500 euros à 550 euros par an (voir notre article ci-contre du 27 novembre 2013).
Parmi les autres mesures, on retiendra notamment le - nouveau - relèvement de 8,3% du plafond d'accès à l'ACS, l'augmentation du complément familial pour les foyers sous le seuil de pauvreté, l'instauration d'un cadre juridique global pour les expérimentations de nouveaux modes d'organisation des soins ou encore l'assouplissement de la procédure d'évaluation externe des 40.000 établissements et services sociaux et médicosociaux.