Social / Santé - PLFSS 2014 : c'est - presque - la rigueur pour le médicosocial
Marisol Touraine, la ministre des Affaires sociales et de la Santé, et Bernard Cazeneuve, le ministre du Budget, ont présenté, le 26 septembre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 (PLFSS). L'exercice intervient dans un contexte de lent redressement des comptes et de rigueur budgétaire accrue. La commission des comptes de la sécurité sociale, qui s'est réunie le matin même, a en effet estimé le déficit 2013 à 16,2 milliards d'euros, contre une prévision de 17,3 milliards six mois plus tôt et un déficit 2012 constaté de 17,5 milliards d'euros. Pour 2014, la commission des comptes prévoyait un déficit en forte progression - à hauteur de 21,5 milliards d'euros -, avant prise en compte des mesures prévues par le projet de loi de finances (voir notre article ci-contre du 25 septembre 2013) et par le PLFSS pour 2014. Celles-ci devraient le ramener à 12,8 milliards d'euros en 2014, y compris les économies sur le Fonds de solidarité vieillesse.
Un Ondam médicosocial en hausse de 3%
Dans un tel contexte, l'heure n'est pas vraiment aux mesures nouvelles, si ce n'est des mesures de rigueur ou de redéploiement. Même s'il participe à l'effort de rigueur - ce qui n'était pas le cas pour le PLFSS 2013 -, le secteur médicosocial n'est pas vraiment maltraité. L'Ondam médicosocial 2014 (objectif national des dépenses d'assurance maladie, pour le secteur médicosocial) est ainsi fixé à 3%, contre 4% dans le PLFSS 2013. Ce taux de 3% est supérieur de 0,6 point à celui de l'Ondam général, qui couvre essentiellement les dépenses de santé (2,4%). On relèvera toutefois que l'écart en faveur de l'Ondam médicosocial se réduit nettement, puisqu'il était l'an dernier de 1,3 point (respectivement 4% et 2,7%).
Pour le gouvernement, ce taux de 3% "traduit le maintien de la priorité donnée à ce secteur au sein des dépenses de santé". Mais la présentation du PLFSS prend soin de préciser aussitôt que "le secteur contribuera toutefois à la maîtrise des dépenses d’assurance maladie par une évolution de l’Ondam médicosocial calculée au plus près des engagements". Petit bonus toutefois : l'utilisation des réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) permettra d'abonder les moyens à hauteur de 70 millions d'euros, ce qui équivaut à 0,4 point d'Ondam médicosocial.
Santé : des mesures nouvelles au coût très limité
Après l'état des lieux des comptes sociaux, le PLFSS se transforme traditionnellement en un catalogue de mesures nouvelles. Dans le secteur de la santé, l'essentiel réside dans la mise en oeuvre des premières mesures de la stratégie nationale de santé, présentée tout récemment par Marisol Touraine (voir notre article ci-contre du 23 septembre 2013). Il s'agit en l'occurrence d'un ensemble de mesures souvent intéressantes, mais à l'impact budgétaire très limité.
On y retrouve notamment les deux annonces récentes de Marisol Touraine sur la généralisation du tiers payant et celle de la couverture complémentaire santé, mais à un format réduit. La généralisation du tiers payant figurant dans le PLFSS se cantonne ainsi à sa mise en oeuvre pour le remboursement des actes en lien avec la prescription d'un contraceptif à une mineure de plus de quinze ans (coût : 2 millions d'euros). Pour sa part, la mesure sur la couverture complémentaire santé est présentée comme "une nouvelle étape" dans la généralisation de la complémentaire santé. Il ne s'agit pas, en effet, de la mesure annoncée par Marisol Touraine et visant à couvrir tous les salariés, mais de la mise en oeuvre d'une disposition prévue dans le programme pluriannuel de lutte contre la pauvreté : le relèvement de 8,3% (7% + 1,3% pour l'inflation) du plafond d'accès à l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (coût : 64 millions d'euros).
Les autres mesures sont plus ponctuelles, à l'image de l'amélioration de l'aide au sevrage tabagique chez les jeunes. D'autres mesures - importantes - sont davantage tournées vers l'organisation et la gouvernance de la santé, et certaines pourraient donc se voir qualifier - comme chaque année - de "cavalier social" par le Conseil constitutionnel. Il s'agit notamment du renforcement des soins de premier recours, de la rénovation de la stratégie de soutien aux investissements des établissements de santé, ainsi que de l'engagement de la réforme du financement des établissements de santé.
18,8 milliards d'euros pour l'OGD des établissements et services médicosociaux
Du côté des établissements pour personnes âgées ou handicapées, les enveloppes sont nettement plus conséquentes. Dans le cadre de l'objectif global de dépenses (OGD) du secteur médicosocial, le PLFSS 2014 prévoit ainsi une enveloppe de 18,8 milliards d'euros, en hausse de 3,2% (soit 584 millions d'euros supplémentaires), dont 17,6 milliards apportés à la CNSA par l'assurance maladie, 1,1 milliard venant de l'affectation d'une fraction du produit de la contribution solidarité autonomie (CSA) et 70 millions d'euros issus des réserves de la CNSA. Les 580 millions supplémentaires permettront notamment de financer des créations de places (dont la répartition n'est pas indiquée), de revaloriser de 1% les moyens dévolus au titre des places et des services existants et de mettre en oeuvre les engagements du plan Alzheimer et ceux relatifs à la médicalisation des Ehpad.
La famille à la portion congrue
Rigueur oblige, la politique familiale est réduite à la portion congrue. Seules quatre mesures sont en effet présentées à ce titre dans le PLFSS. La première consiste - toujours dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté - à majorer le complément familial pour les foyers sous le seuil de pauvreté (coût : 64 millions d'euros).
Deux autres mesures visent au contraire des économies, tout en redéployant les aides. En premier lieu il s'agit de la modulation de l’allocation de base de la Paje (prestation d'accueil du jeune enfant) et de l'alignement progressif de son montant sur celui du complément familial (économie attendue de 40 millions d'euros). Au-delà de l'économie réalisée, cette mesure participe du recentrage de la Paje sur les familles les plus modestes. En second lieu il s'agit de la suppression du CLCA majoré (complément de libre choix d'activité) et de la modification des conditions d’accès au CLCA à taux partiel pour les non salariés (économie attendue de 30 millions d'euros). Ces deux mesures d'économie s'appliqueront aux enfants nés à compter du 1er avril 2014.
Enfin, la dernière mesure a un coût anecdotique (un million d'euros). Elle consiste à plafonner le complément mode de garde (CMG) structure - pour les parents qui font garder leur enfant par le bais d'une entreprise mandataire ou au sein d'une micro-crèche - et à supprimer la condition d'un revenu minimal d'activité pour l'accès au CMG.