Finances publiques - La réforme des finances locales repoussée...
"Il ne sert à rien de désendetter l'Etat et de faire baisser les impôts si c'est pour que les taxes locales augmentent par ailleurs." Pour Dominique de Villepin, qui animait la deuxième conférence des finances publiques qui se tenait le 12 février, le conseil d'orientation des finances publiques devra rendre un rapport sur le sujet "dans le courant de l'année 2007, afin que des décisions opérationnelles puissent être prises dès 2008 ou 2009". Mais à deux mois et dix jours du premier tour de l'élection présidentielle, le gouvernement n'est plus en mesure de lancer de nouveaux chantiers. Il se contente d'établir des "propositions". Depuis la première conférence des finances publiques, qui s'était déroulée le 11 janvier 2006, les intentions du gouvernement sont cependant connues. Il veut faire participer les collectivités locales à l'effort de réduction de l'endettement de la France, même s'il est vrai que la dette des administrations publiques locales ne représente que 10% de la dette publique du pays.
Pour une progression des dotations limitée à l'inflation
Le rapport de Gilles Carrez, député et président du Comité des finances locales, examiné par la deuxième conférence des finances publiques lundi matin, préconise de modifier les règles du jeu : alors que l'évolution des dotations de l'Etat était jusqu'à présent indexée sur l'inflation et un tiers de la croissance du PIB, elles devraient parvenir au rythme de progression des dépenses de l'Etat, qui est limité à l'inflation. Le rapporteur de la commission des finances à l'Assemblée nationale suggère de soumettre également à cette règle les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux pris en charge par l'Etat, qui ont représenté 11 milliards d'euros en 2007. Autre préconisation : la mise en place de "référentiels de coûts standard" qui, diffusés sur le site internet de l'Observatoire des finances locales, permettraient de comparer les performances des collectivités locales. En contrepartie, celles-ci disposeraient de marges de manoeuvre renforcées, notamment pour fixer les rémunérations de leurs agents. Reprenant une préconisation d'évaluation, Dominique de Villepin propose que "l'ensemble des administrations publiques" s'inspire de la pratique des audits de modernisation conduite par l'Etat. Le chef du gouvernement a aussi proposé que la dette de l'Etat ne finance que l'investissement. Il veut en faire une règle absolue, comme c'est déjà le cas pour les collectivités locales, en l'inscrivant la Constitution. La France pourrait parvenir à cet objectif dès 2010, estime le Premier ministre.
Un accord pluriannuel : pourquoi pas ?
Les associations d'élus, présentes à la conférence des finances publiques, ont réagi à l'issue de la rencontre. L'APVF exprime son accord sur la proposition de pluriannualité "dont elle souhaite qu'elle régisse à nouveau les relations financières Etat-collectivités locales dans une optique de sécurité financière et de prévisibilité dont les collectivités locales ont avant tout besoin et réitère sa proposition de création d'une conférence territoriale, instance pérenne de concertation, de négociation et de décision". Pour Jacques Pélissard, président de l'Association des maires de France, tout nouveau contrat entre l'Etat et les collectivités locales devrait nécessairement comporter une clause d'évolution des concours de l'Etat prenant en compte l'augmentation des charges supportées par les collectivités locales.
L'absence du rapport Valletoux
Les associations d'élus ont pris acte de l'annonce d'une réflexion sur une réforme de la fiscalité locale mais rappellent leurs conditions. Philippe Laurent, président de la commission Finances de l'Association des maires de France, regrette que "le rapport Valletoux n'ait jamais été évoqué par les participants à la conférence des finances publiques, sauf une fois par Dominique de Villepin"(...) "Par ailleurs, je constate qu'il n'y a pas de consensus sur notre proposition d'un partage des impôts d'Etat avec les collectivités locales. C'est à mon avis, le point dur de la réforme." Plaidant aussi pour la réforme de la fiscalité locale, Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, a rappelé que "les trois associations d'élus (AMF, ADF, ARF) ont l'intention d'élaborer des propositions de réforme, dans le droit fil des conclusions de l'avis approuvé par le Conseil économique et social". Le débat est donc loin d'être clos.
Thomas Beurey / Projets publics, et C.V.