Elections - La proposition de loi sur les sondages ira bien à l'Assemblée
Le 14 février, le Sénat adoptait à l'unanimité, en première lecture, la proposition de loi sur les sondages "visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral". Ce vote constitue un fait rare à double titre : outre l'unanimité du Sénat, il a en effet été obtenu contre l'avis du gouvernement, qui faisait valoir - non sans quelques arguments - un risque d'inconstitutionnalité au regard de la liberté de la presse (voir notre article ci-contre du 16 février 2011). Lors des débats, Patrick Ollier n'avait pas caché un très net manque d'enthousiasme à l'idée d'inscrire rapidement ce texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Le ministre chargé des relations avec le Parlement avait ainsi affirmé : "Le gouvernement s'oppose au point essentiel de la proposition de loi : c'est pour cela qu'il n'a pas déposé d'amendement ! Laissons à la navette et au temps qui passera le soin de régler le problème."
Course de lenteur ou de vitesse ?
Face à ces craintes sur un possible enlisement de la proposition de loi, l'opposition et la majorité parlementaires ont toutes deux réagi. Il est vrai que le texte a été présenté à la fois par Hugues Portelli, sénateur (UMP) du Val d'Oise, et Jean-Pierre Sueur, sénateur (PS) du Loiret (voir notre article ci-contre du 4 février 2011). Le groupe socialiste à l'Assemblée a ainsi demandé "solennellement l'inscription de cette proposition de loi à l'ordre du jour prioritaire de l'Assemblée", menaçant - en cas de refus du gouvernement - de l'inscrire lui-même "dans le cadre de [ses] niches parlementaires". De son côté et après avoir hésité, Christian Jacob, le président du groupe UMP, a écrit - toujours dans une démarche inhabituelle - à Jean-Luc Warsmann, le président de la commission des lois, pour lui demander expressément de désigner un rapporteur. Ce devrait être chose faite très bientôt, puisque la commission des lois doit désigner son rapporteur dès le 16 mars. Ce revirement n'est évidemment pas étranger à la polémique sur le récent sondage qui plaçait Marine Le Pen en tête des candidats du premier tour de la prochaine présidentielle. Cette désignation d'un rapporteur n'emporte pas inscription automatique à l'ordre du jour, mais elle en constitue un signe avant-coureur fort. Il reste néanmoins à fixer une date et rien ne dit encore qu'elle interviendra au premier semestre.
Par ailleurs, la majorité parlementaire à l'Assemblée nationale - qui n'est à l'origine ni de la proposition de loi, ni du rapport qui l'a précédée (voir notre article ci-contre du 27 octobre 2010) - pourrait se montrer plus sensible que le Sénat aux arguments du gouvernement. Christian Jacob doit d'ailleurs bientôt rencontrer le sénateur Hugues Portelli, l'auteur UMP du texte. Une modification substantielle des règles applicables aux sondages - à quelques mois de la présidentielle - pourrait en effet être mal perçue par l'opinion, malgré l'unanimité du Sénat. En outre, les instituts de sondages, pris de court par le résultat du Sénat, ne vont pas manquer de réagir. On ne devrait donc pas tarder à voir apparaître des sondages montrant à quel point les Français sont attachés... aux sondages.
Référence : proposition de loi sur les sondages visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral (adoptée en première lecture par le Sénat le 14 février 2011).