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Communication - Le Sénat veut un "encadrement pragmatique" de la propagande électorale

Le Sénat s'intéresse décidemment de très près à la communication en période électorale. Il y a quelques semaines, sa commission des lois publiait ainsi un rapport d'information intitulé "Sondage et démocratie : pour une législation plus respectueuse de la sincérité du débat politique", rédigé par Hugues Portelli, sénateur (UMP) du Val-d'Oise, et Jean-Pierre Sueur, sénateur (PS) du Loiret (voir notre article ci-contre du 27 octobre 2010). La commission des lois publie aujourd'hui un second rapport consacré, cette fois-ci, à l'évolution de la législation applicable aux campagnes électorales. Ce document est issu des réflexions d'un groupe de travail rassemblant toutes les sensibilités politiques et porte la signature de cinq rapporteurs, représentant les cinq groupes politiques du Sénat (hors non-inscrits).

La cohérence perdue du Code électoral

Le caractère très consensuel de l'exercice ne favorise pas nécessairement l'éclosion de propositions audacieuses, mais le rapport - qui formule 40 recommandations - n'en présente pas moins un réel intérêt. Il est d'ailleurs très loin de se limiter au seul champ de la communication, puisque le document s'attarde longuement sur des sujets comme le financement des campagnes électorales, les règles applicables aux comptes de campagne, le rôle du mandataire financier ou les sanctions susceptibles d'être appliquées. Le rapport aborde également les règles spécifiques aux campagnes des élections sénatoriales, avec en particulier une proposition consistant à inclure ces dernières dans le champ d'application de la législation sur les comptes de campagne. De façon globale, il confirme l'inadaptation du cadre juridique actuel, les multiples modifications du Code électoral intervenues depuis sa codification en 1956 et 1964 (pour la partie réglementaire) lui ayant fait "perdre progressivement de sa cohérence d'origine et de sa clarté, sans pour autant garantir son actualisation".
En matière de communication proprement dite - ou de propagande, pour reprendre l'expression du Code électoral -, le rapport constate qu'"il existe des dispositions communes à l'élection des députés, des conseillers généraux et des conseillers municipaux". Par exemple, il est possible, pour toutes ces élections, de distribuer des documents jusqu'à la veille du scrutin à minuit. En revanche, les dates d'ouverture de la campagne électorale - qui conditionnent un certain nombre de règles applicables à la communication - varient fortement selon le type d'élections. Le rapport estime aussi que "même si, sur le fond, les règles en matière de période électorale sont dans l'ensemble similaires, leur rédaction et leur insertion dans le code sont assez variables". Il constate notamment que "selon le type d'élection, elles relèvent alternativement de dispositions législatives ou réglementaires, sans que cette différence puisse être expliquée rationnellement".

Mieux prendre en compte les NTIC

La commission des lois se prononce donc pour "un encadrement pragmatique de la propagande électorale". La principale proposition en la matière consiste en une meilleure prise en compte par le Code électoral des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) afin "qu'il n'y ait pas de doute sur le fait que la législation générale en matière de propagande leur est pleinement applicable". Le rapport préconise également d'interdire la pratique du "phoning" après la fin de la campagne électorale, alors qu'elle est aujourd'hui possible le jour même du scrutin. De même, le Code électoral devrait mentionner plus clairement l'interdiction de diffuser en fin de campagne électorale, sous quelque forme que ce soit, tout élément nouveau n'ayant pu faire l'objet d'un débat. Pour éviter les contentieux de plus en plus fréquents sur les documents de propagande officielle (les fameuses "professions de foi"), la commission des lois préconise de rendre obligatoire la validation de ces documents par la commission de propagande. Sur les dates de campagne, elle recommande à la fois de faire coïncider le début de la campagne électorale officielle avec la clôture du délai de dépôt des candidatures et d'aligner la durée couverte par les interdictions en matière de propagande électorale sur la durée couverte par le compte de campagne. Enfin, le rapport rappelle que le Code électoral (articles L.211 et L.215) interdit d'imprimer et d'utiliser, sous quelque forme que ce soit, des circulaires, tracts ou tout autre document de propagande électorale pendant la campagne électorale, sous peine d'une amende de 3.750 euros (pour les élections cantonales). Une disposition superbement ignorée de tous les candidats et totalement inappliquée, que la commission des lois propose donc de supprimer, en la maintenant toutefois pour l'affichage sauvage hors des panneaux électoraux.

Référence : rapport d'information de Nicole Borvo Cohen-Seat et plusieurs de ses collègues, fait au nom de la commission des lois sur l'évolution de la législation applicable aux campagnes électorales.