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Communication - Le Sénat adopte la proposition de loi sur les sondages contre l'avis du gouvernement

Le Sénat a adopté à l'unanimité en première lecture, le 14 février, la proposition de loi sur les sondages "visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral". Ce texte introduit un ensemble de modifications dans la loi du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion, qui vont toutes dans le sens d'un renforcement de l'encadrement - sinon d'une restriction - des sondages à caractère électoral (voir notre article ci-contre du 4 février 2011 pour le contenu détaillé de la proposition de loi). Cette dernière est issue du rapport d'information sur la question, remis en octobre dernier par Hugues Portelli, sénateur (UMP) du Val-d'Oise, et Jean-Pierre Sueur, sénateur (PS) du Loiret (voir notre article ci-contre du 27 octobre 2010). L'examen de ce texte a poussé très loin le consensus, au point de tuer tout débat. Présentée par Hugues Portelli, la proposition de loi a été rapportée en commission des lois par Jean-Pierre Sueur, dont tous les amendements ont été adoptés. En séance, seuls trois amendements avaient été déposés, qui ont finalement été retirés, avant que le texte soit adopté à l'unanimité, à l'issue de brefs échanges.

Un texte inconstitutionnel ?

La seule opposition est finalement venue du gouvernement, qui a déclaré "ne pouvoir accepter la proposition de loi en l'état". Patrick Ollier, ministre chargé des Relations avec le Parlement, a ainsi indiqué que "certaines dispositions posent problème sur le plan constitutionnel, pratique, ou en opportunité". Plus précisément, il a même estimé que la proposition de loi "semble inconstitutionnelle au regard de la liberté de la presse, consacrée par l'article 11 de la déclaration de 1789". Outre divers arguments tirés de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d'Etat, le ministre chargé des Relations avec le Parlement s'est également prononcé sur l'article qui entend interdire les sondages relatifs au second tour qui ne tiennent pas compte du premier tour, autrement dit les sondages du type "qui serait le mieux placé au second tour pour battre Untel" (voir notre article ci-contre du 4 février 2011). Il a estimé qu'une telle interdiction, "c'est nier la possible émergence d'un troisième homme". Tout en se disant " défavorable à l'ensemble des articles de la proposition de loi", il s'est néanmoins déclaré prêt à travailler avec le Sénat pour trouver une solution.
C'est peu dire que les objections du gouvernement n'ont pas été entendues. Les différents orateurs qui se sont succédé ont au contraire souligné le caractère "bienvenu" de la proposition de loi et dénoncé les dangers de l'évolution vers "la démocratie d'opinion". Jean-Pierre Sueur a, pour sa part, affirmé que "la sincérité du scrutin est une obligation constitutionnelle. Pour la garantir, il faut garantir la transparence ; ainsi sera respectée la liberté d'expression à laquelle nous tenons comme à la prunelle de nos yeux". Le gouvernement n'a toutefois pas dit son dernier mot. Comme l'a indiqué Patrick Ollier, "le gouvernement s'oppose au point essentiel de la proposition de loi : c'est pour cela qu'il n'a pas déposé d'amendement ! Laissons à la navette et au temps qui passera le soin de régler le problème". Une déclaration qui ne laisse pas augurer une inscription rapide à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : proposition de loi sur les sondages visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral (adoptée en première lecture par le Sénat le 14 février 2011).

 

 

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