Transports / Sécurité - La proposition de loi sur la sécurité dans les transports définitivement adoptée
Par un ultime vote de l'Assemblée le 9 mars, le Parlement a adopté définitivement la proposition de loi PS sur la sécurité dans les transports, qui mêle des mesures de lutte contre la fraude et contre le terrorisme après l'attentat manqué dans un Thalys l'été dernier. Ce texte du socialiste Gilles Savary, qui avait fait l'objet d'un compromis entre sénateurs et députés mi-février, a été approuvé à l'unanimité, même si l'UDI et Les Républicains auraient souhaité aller plus loin dans les mesures sécuritaires.
"Il fallait adapter le droit aux circonstances et répondre à deux sujets distincts, la fraude et la lutte contre le terrorisme, par un arsenal législatif complémentaire", s'est félicité le secrétaire d'Etat aux Transports Alain Vidalies.
Le texte, qui a fait l'objet d'une procédure accélérée, compte au final 15 articles contre 9 à l'origine. Il vise notamment à autoriser les agents des services de sécurité de la SNCF et de la RATP "à procéder à des palpations de sécurité" et à la fouille des bagages, avec l'accord des passagers, ou à permettre aux policiers, sous conditions, l'inspection visuelle des bagages à main et leur fouille pour "prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens". Si le passager refuse de s'y soumettre, il pourra se voir refuser l'accès aux moyens de transport. Les entreprises pourront aussi exiger des billets nominatifs. Par ailleurs, les agents de sûreté pourront retenir une personne qui refuserait de se prêter à un relevé d'identité dans l'attente des policiers ou des gendarmes. Ils pourront également, pendant deux ans après la promulgation de la loi, expérimenter des "caméras piétons" dans l'exercice de leur mission. Les images captées par les opérateurs de transport pourront aussi être transmises en temps réel aux forces de l'ordre.
Tous les réseaux concernés
La proposition de loi pose également le principe selon lequel tous les exploitants de transports publics de personnes, notamment les réseaux de province, sont tenus d'assurer la sûreté des personnes et des biens en recourant à trois solutions laissées à leur libre choix : recourir à des sociétés de sécurité privées placées sous le contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps), comme c'est le cas actuellement ; créer leur propre service de sûreté interne, à l'instar de la SNCF et de la RATP, sous contrôle du cahier des charges du Cnaps ; ou donner compétence de police, sur tout ou partie d'un réseau local, aux polices municipales sous contrôle du préfet du département. Pour donner une cohérence d'ensemble à ces nouvelles dispositions, le texte prévoit leur mise en place sous une double garantie conventionnelle : d'une part, entre l'autorité organisatrice de transport (AOT) et l'exploitant dans le cadre du cahier des charges élaboré par l'AOT et d'autre part entre l'AOT opérant dans le même ressort départemental et le responsable de l'Etat dans le département au travers d'un contrat d'objectif départemental de sûreté dans les transports élaboré sous la responsabilité de ce dernier.
Pour ce qui est de la fraude, les "mutuelles de fraudeurs" (c'est-à-dire des systèmes permettant aux fraudeurs de ne pas à avoir à payer leur amende en échange de quelques euros par mois) seront interdites. Le délit de "fraude d'habitude", puni de six mois d'emprisonnement et 7.500 euros d'amendes, est abaissé de dix à cinq infractions. Le texte entend aussi faciliter la vérification de la domiciliation de tout contrevenant pour l'obliger à acquitter sa contravention et améliorer ainsi le taux de recouvrement des amendes, qui se situe actuellement autour de 10% tant pour la SNCF que pour la RATP. Un centre d'interrogation indépendant et assermenté, placé sous le contrôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), pourra transmettre aux agents de recouvrement d'un exploitant ses coordonnées après vérification sur des fichiers qui leur seront inaccessibles directement.
Ce renforcement de la sécurité ne se fera pas uniquement au niveau du contrôle des voyageurs. La SNCF et la RATP pourront solliciter des enquêtes administratives sur des personnes recrutées ou affectées à des postes portant sur la sécurité des personnes (aiguillage, conduite des trains, sécurité des systèmes d'information) pour vérifier qu'elles ne sont pas fichées "S".
Le texte comprend également un article contre les violences et harcèlements à caractère sexiste dans les transports, dont le Sénat ne voulait pas initialement. Cet article prévoit que ces faits fassent l'objet d'un rapport annuel qui sera transmis au Défenseur des droits, à l'Observatoire national de la violence faite aux femmes, et au Haut conseil de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Enfin, la version définitive du texte prévoit que le gouvernement produise un rapport sur les conditions de financement de la sûreté dans les transports terrestres car une nouvelle fois, la question du choix entre l'usager et le contribuable pour assumer le coût de ces nouvelles mesures va se poser.