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Lutte contre l'exclusion - La France se rallie au rattachement de l'aide alimentaire au FSE

Le 24 janvier 2013, l'Assemblée nationale a organisé un débat sur le projet de fonds européen d'aide aux plus démunis. Il s'agit là d'un sujet d'actualité, puisque le Conseil européen du 7 février doit discuter du montant du budget européen en la matière et définir les conditions de son affectation aux différentes politiques sociales de l'Union européenne. Ce débat - qui mobilise les associations et les banques alimentaires - trouve son origine dans une décision de la Cour de justice de l'Union européenne remettant en cause, non pas le principe de l'aide alimentaire, mais son adossement à la PAC (politique agricole commune), sous la forme d'une mise à disposition des excédents de production agricole (voir nos articles ci-contre). La proposition de la Commission consiste à déconnecter la PAC - promise à une réforme de fond - et l'aide alimentaire, et à faire de cette dernière l'un des programmes du fonds social européen (FSE).

Rejet de principe ou ralliement de raison ?

Grâce à un accord intervenu entre la France et l'Allemagne le 14 novembre 2011 (voir notre article ci-contre du même jour), le programme européen d'aide aux plus démunis (PEAD) - créé par Jacques Delors en 1987 - a finalement pu être prolongé en 2012 et en 2013. Mais cet accord a été obtenu en échange d'un abandon du programme à compter de 2014. Alors candidat aux présidentielles, François Hollande s'était vigoureusement élevé contre cette perspective, évoquant "un grave échec de l'Union européenne". Une position suivie depuis lors par le gouvernement, qui a toujours soutenu les associations et banques alimentaires dans leur demande de maintenir un dispositif articulé avec la PAC.
Lors du débat du 7 février à l'Assemblée, très consensuel dans la défense de l'aide alimentaire, Danielle Auroi, la présidente de la commission des affaires européennes, a jugé "vraiment pas satisfaisante" la solution du rattachement du PEAD au FSE. Pour sa part, Elisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères, s'est montrée plus mesurée, indiquant que le projet de règlement élaboré par la Commission "a un mérite : proposer une base juridique plus solide, en assumant pour la première fois la dimension sociale du programme". Elle a également rappelé que "la non-systématicité de la participation à l'aide alimentaire a créé une double fragilité : d'abord, d'un point de vue juridique [...] ; d'autre part, une fragilité politique, vu la non-participation de certains Etats, dont l'Allemagne, qui a saisi en ce sens la Cour de justice européenne".

Quel budget pour quelles actions ?

Une façon de préparer l'intervention, en clôture du débat, de Bertrand Cazeneuve, le ministre délégué chargé des Affaires européennes. Jusqu'alors, la France restait officiellement réservée sur le transfert au FSE, tout en n'étant pas parvenue à rassembler suffisamment de pays pour s'y opposer face aux Etats partisans de la mesure, comme l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suède, le Danemark ou la République tchèque. Bertrand Cazeneuve a indiqué qu'il avait reçu le matin même "l'ensemble des représentants des associations, qui sont mobilisées, pour leur expliquer où en était la négociation et pourquoi nous avions finalement intérêt, en dépit des inconvénients que cela représentait, à arrimer ce programme au fonds social européen" : "D'abord, c'est le pérenniser, parce que nous aurons la base législative garantissant qu'il ne sera pas remis en cause année après année. Par ailleurs, une négociation budgétaire au sein de l'Union européenne, ce sont des discussions sur un volume budgétaire [...]." Ainsi, "lors de l'élaboration des bases légales à partir desquelles on affectera ces sommes, nous pourrons donc prévoir des conditions de souplesse qui permettront aux associations de ne pas subir de préjudice en raison du rattachement de ces fonds au FSE".
Si le débat juridique et institutionnel semble en voie d'être clos, il devrait en revanche se déplacer sur le volet budgétaire. En rejoignant le FSE, le PEAD se banalise et entre "en concurrence" avec d'autres programmes sociaux. Dans sa proposition de création d'un fonds de 2,5 milliards d'euros sur cinq ans, la Commission européenne prévoit d'ailleurs que celui-ci pourra servir à "acheter des aliments ou des biens", alors que le PEAD était voué exclusivement à l'aide alimentaire (voir notre article ci-contre du 24 octobre 2012). La question du montant et de l'affectation de l'aide sera donc au cœur des débats du Conseil du 7 février.

 

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