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Lutte contre l'exclusion - La France décidée à ne pas céder sur le financement européen de l'aide alimentaire

Pas moins de trois ministres étaient réunis, le 2 octobre, pour recevoir les quatre organisations caritatives bénéficiaires du programme d'aide aux plus démunis (PEAD) : Fédération française des banques alimentaires, Secours populaire, Croix-Rouge française et Restos du cœur. Lancé en 1987, le PEAD attribue à des associations caritatives agréées des stocks alimentaires issus des excédents de la politique agricole commune (PAC). L'an dernier, plus de 18 millions de personnes, réparties dans 19 des 27 Etats de l'Union européenne, ont ainsi bénéficié des stocks distribués. En France, le PEAD représente environ un tiers des denrées distribuées par les banques alimentaires.
Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture, Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l'exclusion, et Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé de l'Agroalimentaire, ont ainsi affirmé que le PEAD "doit rester la première manifestation du droit à l'alimentation" et que "les éventuels surplus de la PAC doivent pouvoir continuer à être mobilisés pour aider les Européens les plus démunis". Les trois ministres ont fait part aux associations de leur intention d'"interpeller Dacian Ciolos, commissaire européen chargé de l'Agriculture et Laszlo Andor, commissaire européen chargé de l'Emploi, des Affaires sociales et de l'Inclusion, en réaffirmant la nécessité de maintenir les crédits du PEAD. Ceux-ci devront être gérés dans un souci de justice et de solidarité par le Fonds social européen (FSE) à la place de la PAC".
La crise actuelle (voir nos articles ci-contre) vient d'un arrêt de la Cour européenne de justice (CEJ), rendu le 13 avril 2011. Cette décision ne condamne pas le PEAD en lui-même, mais le fait d'avoir, en 2009, abondé l'aide alimentaire par un financement direct et non par le recours aux excédents de la PAC, insuffisants à l'époque. Grâce à un accord intervenu entre la France et l'Allemagne le 14 novembre 2011 (voir notre article ci-contre du même jour), le PEAD a finalement pu être prolongé en 2012 et en 2013. Mais cet accord a été obtenu en échange d'un abandon du programme à compter de 2014. François Hollande, alors candidat à l'élection présidentielle, avait vu dans cette décision "un grave échec de l'Union européenne". Une position très proche de celle de Manuel Barroso, le président de la Commission européenne, qui déclarait, lors de la visite d'une banque alimentaire en Alsace : "Ce serait un scandale que l'Union européenne supprime, comme certains le voudraient, des programmes de lutte contre la pauvreté". Mais il semble peu probable que l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suède, le Danemark et la République tchèque reviennent sur leur position, consistant à considérer que les fonds alloués au PEAD - issus du budget de la PAC - ne doivent pas servir à financer des politiques sociales relevant, selon eux, des politiques nationales.
Avant même la question de la survie du PEAD, se pose aussi celle de ses moyens. Pour se conformer à l'arrêt de la CEJ, la Commission a dû en effet, dans un premier temps, ramener le budget du fonds de 480 millions d'euros à 113,5 millions, montant déterminé par le volume des excédents alimentaires disponibles. Un accord transitoire a finalement été trouvé pour abonder le fonds, mais sa base juridique et financière reste fragile.
Plus qu'une avancée concrète, la réunion du 2 octobre entre les ministres et les associations caritatives concernées illustre donc la volonté de la France de relancer, au niveau européen, la question politique du financement de l'aide alimentaire.
 

 

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