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Financement du logement - "La dynamique de la collecte sur le livret A s'est maintenue en 2009"

L'Observatoire de l'épargne réglementée (OER) - créé par la loi de modernisation de l'économie (LME) du 4 août 2008 et rattaché à la Banque de France - publie son premier rapport annuel. Portant sur l'année 2009, il rend compte des effets de la mise en oeuvre de la réforme étendant la distribution du livret A à l'ensemble des réseaux bancaires. Pour Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France et président de l'OER, "la mise en place de la réforme s'est déroulée de façon satisfaisante". Il estime en effet que "la dynamique de la collecte totale sur le livret A s'est maintenue, la généralisation de la distribution n'ayant pas suscité, comme d'aucuns ont pu le craindre, de transfert vers d'autres produits de placement". De même, la banalisation du livret A n'a pas entraîné de changement brutal dans la répartition des parts de marché entre anciens et nouveaux distributeurs. Du côté de l'utilisation des fonds, Christian Noyer juge que "les fonds collectés ont été réemployés, semble-t-il, de façon équilibrée à la fois aux financements d'intérêt général pour la partie centralisée par la Caisse des Dépôts [pour le financement du logement social, NDLR] et au financement des petites et moyennes entreprises et du développement durable pour la partie conservée au passif des établissements bancaires".
Les chiffres présentés dans le rapport confirment les propos du gouverneur de la Banque de France. Ainsi, au 31 décembre 2009, il existait 59,3 millions de livrets A et bleu ouverts par des personnes physiques et 600.000 détenus par des personnes morales (essentiellement des associations, les organismes HLM ne détenant qu'une part marginale de livrets A). En outre, 18,1 millions de livrets ont été ouverts en 2009, contre 1,8 million l'année précédente. L'importance du nombre de livrets en circulation - qui représenteraient le taux improbable de 91% de la population française, tous âges confondus - montre qu'il existe encore de nombreux cas de multidétention, en dépit de leur interdiction. Il faut y ajouter 25,2 millions de livrets de développement durable (LDD). S'il est ainsi très répandu, le livret A est aussi très concentré : à la fin de 2009, 4,3 millions de livrets (7% du total) concentraient 42% des encours. Au total, les encours au 31 décembre sont de 175,5 milliards d'euros pour le livret A et bleu et de 69,1 milliards pour le LDD. Contrairement à certaines craintes exprimées lors de la mise en place de la réforme, les encours du livret A et bleu et du LDD ont progressé de 17,9 milliards d'euros l'an dernier. Ce chiffre global recouvre toutefois une forte poussée en début d'année suivie d'une modération en fin d'année. Il est vrai qu'au cours de 2009, le taux de rémunération du livret A est passé de 4% à 1,25%.
Ainsi que le souligne le rapport, il reste encore une réforme importante à accomplir : celle du mode de centralisation par la Caisse des Dépôts des fonds collectés via les livrets d'épargne réglementée. Celle-ci doit être adoptée avant le 30 septembre 2011, sous la forme d'un taux définissant la part de la collecte centralisée par la Caisse. Elle s'appliquera alors à compter du 1er janvier 2012. Jusqu'à cette date, la part centralisée est plafonnée à 160 milliards d'euros. Si la Caisse des Dépôts s'est déjà prononcée en faveur d'un taux de 70%, l'Observatoire de l'épargne réglementée préfère, pour sa part, attendre avant de prendre position. Il souhaite en effet observer la façon dont les banques utilisent la part des fonds collectés restant à leur bilan pour financer les PME.
A noter également : le premier rapport de l'OER propose un chapitre consacré au financement du logement social. Il s'y prononce notamment en faveur de "la nécessité de construire 120.000 logements sociaux par an pour combler le déficit actuel de l'offre" et souligne que "les projections des besoins en matière de construction [...] font ressortir un besoin de construction supérieur à celui observé en moyenne au cours des vingt dernières années".

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

L'USH n'est qu'à demi rassurée
L'Union sociale pour l'habitat (USH) - dont le président est Thierry Repentin, membre également de l'OER, qui fédère 800 organismes gérant 4,2 millions de logements - a aussitôt réagi à la publication du premier rapport de l'OER. Sans remettre en cause les chiffres présentés dans ce dernier, elle estime néanmoins, dans un communiqué du 29 juillet 2010, que "le faible recul que l'on a aujourd'hui sur l'application de cette réforme et le caractère forcément limité des informations qui ont pu être réunies sur cette période courte, ne permettent pas [...] de conclure sur les résultats obtenus". Renouvelant les craintes qu'elle avait déjà exprimées l'an dernier (voir notre article ci-contre du 12 novembre 2009), l'USH "rappelle le caractère essentiel du livret A pour le financement du logement social en France [et] ne peut que réaffirmer ses inquiétudes sur la pérennité de cette ressource au niveau nécessaire". L'enjeu est de taille puisque près des trois quarts du financement d'un programme "classique" de logement social reposent sur le prêt consenti par la Caisse des Dépôts. L'USH rappelle donc le gouvernement à son engagement, pris devant le Parlement, de centraliser au moins 70% de la collecte auprès de la Caisse des Dépôts, et donc au bénéfice du financement du logement social. Aussi entend-t-elle porter "une attention toute particulière à la concertation préalable au futur texte réglementaire qui arrêtera, avant le 30 septembre 2011, le taux de centralisation du livret A".