Lutte contre l'exclusion - La conférence de consensus formule 50 propositions pour les sans-abri
Les 29 et 30 novembre, la Fnars (Fédération nationale des associations d'accueil et de réadaptation sociale) organisait la première conférence de consensus consacrée à la réinsertion durable des personnes sans-abri. A l'issue de deux jours de débats réunissant de nombreux participants, un jury d'audition présidé par Jean-Marie Delarue - conseiller d'Etat et ancien délégué interministériel à la Ville - et composé de professionnels sanitaires et sociaux, de chercheurs, de responsables d'établissements, de magistrats, de responsables associatifs et syndicaux et de représentants de la société civile, s'est réuni pour finaliser un ensemble de propositions remis le 5 décembre au chef de l'Etat et au gouvernement. Intitulé "Sortir de la rue", le rapport entend reprendre à la base la question de la réinsertion des personnes sans-abri. Ainsi que l'expliquait le président du jury d'audition lors de la conférence de presse, "le dispositif actuel fonctionne comme des portes tournantes. On prend quelqu'un dans la rue, on le met dans un centre pour quelques jours, puis on le remet à la rue".
Le rapport essaie de sortir de cette logique, en estimant "qu'une politique ambitieuse de réduction drastique du nombre des personnes vivant sans toit est possible".
Pour cela, il formule un certain nombre de propositions, à commencer par l'instauration d'un droit à un accueil "immédiat, inconditionnel [et] dans le respect de la dignité des personnes". Sur ce point, le jury d'audition s'est félicité de l'intervention de Nicolas Sarkozy en faveur de l'abandon de l'amendement Mariani, qui aurait limité la durée d'hébergement des sans-abri dénués de titre de séjour. Outre des mesures techniques visant à l'amélioration des conditions matérielles d'accueil - rénovation des locaux, renforcement de la sécurité et de l'intimité, habilitation et financement des nouvelles structures d'hébergement conditionnés par la mise en oeuvre de chambres individuelles - le rapport recommande d'adapter l'hébergement aux évolutions sociologiques : création de CHRS (centres d'hébergement et de réadaptation sociale) spécialement dédiés aux familles, mise en place d'une politique d'aide aux toxicomanes sans-abri...
De façon plus large, il propose de créer des "bassins de vie" qui offriraient aux sans-abri l'ensemble des services nécessaires. Le jury fait également preuve d'originalité pour tout ce qui concerne la citoyenneté des personnes sans-abri. Il préconise ainsi de les insérer dans les conseils et les comités de quartier, d'aider les associations ou collectifs de personnes sans-abri à se structurer, de mobiliser leur expertise dans la définition des politiques, mais aussi de développer des "pactes de voisinage" et des système de "parrainage", permettant de mobiliser les habitants d'un quartier autour d'un sans-abri. Conscient que l'hébergement en structure d'accueil n'est pas toujours la solution, le rapport suggère une mesure qui devrait donner lieu à débat : "Reconnaître des groupes et lieux regroupant des sans-abri auto-organisés (squats par exemple) avec la définition de conditions et de critères satisfaisants."
Enfin, le rapport s'attarde sur la coordination des politiques en faveur des sans-abri. Ainsi que l'explique le président du jury, "vous ne pouvez pas imaginer le nombre d'acteurs chargés d'intervenir sur la question des sans-abri. C'est comme si on leur avait réservé la politique la plus compliquée". Aussi le jury d'audition propose-t-il de mettre en place une "conduite interministérielle de la politique en direction des personnes sans-abri", en créant un comité interministériel, lui-même épaulé par une mission interministérielle. Il suggère également de procéder à une évaluation régulière des dispositifs, en y associant les personnes chargées de les mettre en oeuvre, mais aussi les intéressés eux-mêmes.
Jean-Noël Escudié / PCA