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Habitat indigne : le HCLPD pointe la "passivité" de certaines communes, la mission parlementaire plaide pour un rôle accru de l'État

Lors d'un point presse le 27 mars, le Haut Conseil pour le logement des personnes défavorisées a estimé que trop de communes ne faisaient pas assez pour s'attaquer à la résorption du logement insalubre. La mission parlementaire chargée par le Premier ministre de travailler sur le sujet vient pour sa part de dévoiler certaines pistes de son futur rapport.

Déjà très présente dans la loi Elan (portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique) du 23 novembre 2018, la question de l'habitat indigne ne quitte plus le devant de la scène depuis le drame de la rue d'Aubagne à Marseille, le 5 novembre dernier (voir nos articles ci-dessous). Deux initiatives récentes contribuent à relancer le débat. La première est le point presse organisé, le 27 mars, par Marie-Arlette Carlotti, la présidente du Haut Conseil pour le logement des personnes défavorisées (HCLPD). La seconde est la longue interview donnée, le 26 mars, au site spécialisé Batiactu par Alexandra Louis, députée (LREM) chargée avec Guillaume Vuilletet, député du Val-d'Oise, d'un rapport sur l'habitat indigne qui doit être remis en mai prochain (voir notre article ci-dessous du 12 décembre 2018). Précision importante : Marie-Arlette Carlotti et Alexandra Louis sont toutes deux élues de Marseille, la première comme conseillère municipale (PS), la seconde comme députée de la 3e circonscription des Bouches-du-Rhône.

"La réponse n'a pas été à la hauteur de l'enjeu"

Lors de son point presse, Marie-Arlette Carlotti a expliqué que le Haut Comité a entamé ses travaux à Marseille, quatre mois après l'effondrement de la rue d'Aubagne, et que "c'est à Marseille que le zoom s'est porté sur le logement insalubre, qui tue en s'effondrant, et tue par la maladie". Pour Christophe Robert, membre du HCLPD (et délégué général de la fondation Abbé-Pierre), "il y a trop de communes où il ne se passe rien, dans lesquelles les moyens ne sont pas utilisés". Il estime le nombre de logements concernés entre 450 et 650.000, soit "un million de personnes concernées par ce fléau". Dans le cas particulier de Marseille, Christophe Robert considère que "la réponse n'avait pas été à la hauteur de l'enjeu, de l'urgence sociale" et appelle à "des mesures extraordinaires" de la part de l'État, de la ville et de la métropole, comme l'hypothèse d'un moratoire sur les expulsions au-delà de la fin de la trêve hivernale, le 31 mars.

En revanche, pour Christian Nicol, également membre du HCLPD et directeur du logement et de l'habitat de la ville de Paris - et auteur en 2015 d'un rapport sur l'habitat insalubre à Marseille -, "la boîte à outils est suffisante pour traiter le problème", mais "la ville s'est défaussée sur les associations" et "tous les moyens n'ont pas été utilisés pour reloger les 700 ménages" évacués de leur logement. Il pointe notamment la construction d'un nombre insuffisant de logements sociaux, car "la loi SRU n'est pas appliquée".

"Un déséquilibre, voire une forme de paralysie"

De son côté, Alexandra Louis, députée (LREM) des Bouches-du-Rhône, dévoile, dans une longue interview au site spécialisé Batiactu, certaines pistes qui devraient figurer dans le futur rapport sur l'habitat indigne, confié par Édouard Philippe et rédigé avec le député du Val-d'Oise Guillaume Vuilletet (Alexandra Louis se chargeant plus particulièrement des aspects concernant Marseille).

Sans s'avancer encore sur les conclusions définitives du rapport qui doit être remis en mai, Alexandra Louis estime néanmoins qu'"il faut remettre à plat tout ce qui relève du signalement et du diagnostic de l'habitat insalubre". Elle juge notamment que "nous avons désormais besoin d'un rôle de coordination, et de permettre à l'État d'avoir un rôle plus opérationnel sur l'insalubrité. La compétence juridique relève du préfet, mais c'est le maire qui détient le pouvoir opérationnel. Cela crée un déséquilibre voire une forme de paralysie, puisque l'État peut prendre des décisions mais n'a pas les moyens d'agir. Il faut sortir de cette situation afin d'arriver à des diagnostics qui soient réalisés rapidement après les signalements".

La députée des Bouches-du-Rhône pointe également les défaillances d'un outil qui "fonctionne très mal et n'est toujours pas opérationnel", même si "l'ambition est louable" : l'Orthi (outil de repérage et de traitement de l'habitat indigne). Pour Alexandra Louis, "nous avons besoin d'un outil qui soit le plus simple possible, et ne multiplie pas le travail des différentes parties prenantes".

Sur le rôle des communes, la députée estime que "les services communaux d'hygiène et de santé (SCHS) sont en charge du diagnostic, ce qui est bien en théorie, mais pas tellement en pratique. L'objectif consisterait éventuellement à avoir une réflexion sur cette compétence". A défaut d'avancées sur ce point, il faudra "faire en sorte que l'État puisse se substituer au SCHS lorsque les diagnostics ne sont pas réalisés".

 

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