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Insertion - Evaluation du RSA : un impact, mais une forte marge d'incertitude

Le rapport final du comité d'évaluation des expérimentations du revenu de solidarité active affiche un taux de retour à l'emploi légèrement plus élevé sur les zones expérimentales. Le différentiel n'est toutefois pas spectaculaire et a été encore fragilisé par la crise.

A quelques jours de la généralisation du revenu de solidarité active (RSA), le comité d'évaluation des expérimentations publie le bilan de la phase expérimentale. François Bourguignon, président du comité, indique certes dans une interview au quotidien Les Echos qu'il aurait "souhaité disposer de plus de temps pour évaluer l'impact des expérimentations, travailler sur davantage de zones, pouvoir choisir de manière plus aléatoire". Mais, "conscient que la généralisation du RSA ne pouvait pas trop attendre", le directeur de l'Ecole d'économie de Paris affirme que le comité a "travaillé avec rigueur en prenant le maximum de précautions".
S'appuyant sur les expérimentations menées dans 33 départements et concernant un peu plus de 15.000 bénéficiaires, le comité d'évaluation - dans lequel siègent notamment les représentants de huit départements - se montre prudent. Il décerne néanmoins un satisfecit au RSA dans la mesure où "le taux d'entrée en emploi des allocataires [...] dans les zones expérimentales est en moyenne plus élevé que dans les zones témoins", même si "l'écart varie assez fortement entre départements et selon les périodes". Le taux moyen de retour à l'emploi des allocataires du RSA se révèle en effet, entre janvier 2008 et mars 2009, supérieur de 9% à celui observé dans les zones témoins. Cet écart de 9% porte toutefois sur un taux de retour à l'emploi très modeste : 3,38% dans les zones d'expérimentation contre 3,1% dans les zones témoins (soit un écart de 0,28 point qui correspond aux 9% évoqués par le rapport). Mais, pour François Bourguignon, "sur la longue période, le nombre de bénéficiaires de minima sociaux diminuerait ainsi d'environ 10% : 100.000 RMIstes de moins, ce n'est pas négligeable". Le rapport du comité souligne également l'existence d'écarts importants selon les localisations et rappelle que "l'incertitude sur le véritable effet du RSA reste donc très forte".

L'impact de la crise

Autre enseignement tiré du rapport du comité d'évaluation : en permettant de cumuler dans la durée la prestation et les revenus du travail, le RSA rend plus attractif les emplois n'offrant qu'un nombre réduit d'heures de travail. La part des personnes travaillant au plus neuf heures par semaine est ainsi de 11% dans les zones d'expérimentation, contre 6% en zones témoins. Le RSA semble également avoir un effet positif sur la qualité et la durabilité de l'emploi : la part des CDI et des CDD de plus de six mois est de 30% parmi les bénéficiaires du RSA en emploi. De même, le secteur marchand représente le principal débouché (61%) pour les allocataires du RSA. Au final, cet effet positif de 9% est inférieur à celui évoqué par le rapport intermédiaire du comité d'évaluation qui, en septembre 2008 et sur des bases beaucoup plus aléatoires, évoquait un chiffre de l'ordre de 30% (voir notre article ci-contre du 9 septembre 2008). Pour François Bourguignon, "le 9% est plus bas, mais plus solide".
Il reste que la mise en place du RSA intervient dans un contexte difficile qui, s'il justifie encore davantage sa mise en place, ne va pas manquer de peser sur ses effets. La rapport constate en effet qu'avec "l'impact de la crise économique sur la reprise d'emploi des plus démunis, à partir de mai 2008, en zone test comme en zone expérimentale, le taux d'entrée en emploi diminue presque continûment jusqu'en mars 2009". Si Martin Hirsch reconnaît que "la crise va jouer fortement", il estime néanmoins que "le RSA gardera un effet positif sur le retour à l'emploi". Ce dernier n'est d'ailleurs que l'un des deux objectifs visés par le RSA. Cette nouvelle prestation doit également contribuer à améliorer le niveau de vie des "travailleurs modestes", à hauteur d'environ 100 euros par mois en moyenne. Selon le haut-commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté, environ 700.000 personnes devraient, dès cette année, passer ainsi au-dessus du seuil de pauvreté.

Jean-Noël Escudié / PCA

Vers un RSA pour les moins de 25 ans ?

Intervenant à l'occasion de la présentation du rapport de l'OCDE "Des emplois pour les jeunes - France", Martin Hirsch a ouvert la porte à une éventuelle extension du RSA aux moins de 25 ans (en dehors de ceux ayant des charges de famille, qui peuvent déjà bénéficier du RMI). Pour le haut-commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté et haut-commissaire à la Jeunesse, la question de cette extension "peut susciter un débat qu'on ne peut occulter". La question est récurrente depuis la création du RMI en 1988, mais l'extension avait jusqu'à présent toujours été écartée. La raison la plus souvent avancée était alors la réticence à placer d'emblée les jeunes dans la situation de titulaires d'un minimum social. Mais, pour Martin Hirsch, le contexte change avec l'instauration du RSA : "On ne peut prendre la loi et supprimer le mot '25 ans' pour mettre '18 ans', en revanche, dans les différents scénarios sur les ressources et les activités (des jeunes), savoir s'il peut y avoir une adaptation sur le côté complément revenu, ce sont des choses qu'on regarde." En d'autres termes, dès lors que le RSA est ouvert - pour environ les trois quarts de ses futurs bénéficiaires - à des personnes en situation d'emploi, il n'y a plus lieu d'en refuser l'accès sur le seul critère de l'âge. Le rapport de l'OCDE sur l'emploi des jeunes en France plaide d'ailleurs très clairement pour une telle évolution, en indiquant qu'"à terme, il conviendrait d'envisager l'extension du RSA aux moins de 25 ans".

 

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