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Social - Entre stages, grèves et réorganisations, les travailleurs sociaux ont du vague à l'âme

Le mouvement était déjà sensible au début de l'été (voir notre article ci-contre du 23 juillet 2009), mais il semble prendre de l'ampleur : le malaise des travailleurs sociaux se traduit de plus en plus par des mouvements... sociaux. Après la Moselle en juin dernier, plusieurs départements connaissent ou viennent de connaître des conflits sociaux. Une manifestation s'est ainsi tenue sous les fenêtres du conseil général des Hauts-de-Seine le 21 septembre, pendant une réunion de la commission permanente, et une autre est prévue le 23 octobre à l'occasion de la session de l'assemblée départementale. Dans les Bouches-du-Rhône, une partie des personnels sociaux vient de se mettre en grève pour protester contre le projet de réorganisation territoriale de l'action sociale et médicosociale. Dans la Manche, environ 400 agents du département ont manifesté, le 1er octobre, lors d'une session de l'assemblée départementale. Dans les Alpes-Maritimes, c'est une pétition qui a été mise en circulation au sein des services. Sans aller jusqu'au conflit social, d'autres départements connaissent également des tensions, comme le Pas-de-Calais ou les Pyrénées-Atlantiques.
Les raisons invoquées sont très diverses et témoignent davantage d'un malaise latent - et croissant - que de la montée en puissance d'une cause récurrente. Sont ainsi évoquées la réorganisation des services dans les Bouches-du-Rhône et dans la Manche, la qualité du management dans les Hauts-de-Seine, la "casse du service public" ou encore la difficulté à faire face à une demande sociale qui repart nettement à la hausse. La question des moyens est en effet présente dans tous les départements concernés. Même si la plupart des conseils généraux continuent de prévoir des créations de postes pour faire face aux besoins, les difficultés financières des départements pris en étau entre la hausse des dépenses sociales et la contraction des recettes - le président du Sénat évoquait, le 14 octobre, un quasi "dépôt de bilan" pour une quinzaine d'entre eux - pèsent lourdement sur les possibilités en la matière. Le secteur de l'enfance semble également concentrer les tensions. C'est le cas en particulier dans les Bouches-du-Rhône ou les Hauts-de-Seine.
De son côté, l'Association nationale des assistants de service social (Anas) fait monter la pression sur la question des stages en travail social. Un an et demi après le décret du 31 janvier 2008 relatif à la gratification des stages (qui visait les entreprises) et l'engagement pris par le gouvernement sur son extension au secteur public (voir notre article ci-contre du 7 mars 2008), la mise en oeuvre de ces dispositions semble pour le moins incertaine : absence d'instructions précises de la part de la direction générale de l'action sociale, réticences des organismes sociaux et médicosociaux à accueillir des stagiaires faute de pouvoir les rémunérer, différences de traitement selon les départements... Selon l'Anas, cette situation ajoute au "malaise grandissant dans lequel le travail social se trouve". L'association va même plus loin en évoquant - sans toutefois beaucoup d'éléments à l'appui - "de fortes inquiétudes sur le devenir de la profession d'assistant de service social, ainsi que sur celui des autres travailleurs sociaux". En attendant, l'Anas va se rapprocher des autres associations professionnelles et des organismes de formation concernés pour réclamer "dans les plus brefs délais une réunion de concertation avec les ministères concernés en vue de la création d'un comité de pilotage".
 

Jean-Noël Escudié / PCA