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Fonction publique territoriale - En attendant la loi relative au statut...

Dans l'attente d'une loi sur le statut devant être dévoilée l'année prochaine, les DRH ne chôment pas : les élections professionnelles, les nouvelles formations et la mise en oeuvre de la Gipa sont quelques-uns de leurs chantiers. En parallèle, ils ont un véritable travail de pédagogie à effectuer auprès des élus, qui ne sont pas toujours initiés aux subtilités du statut.

 

De nouveaux acteurs

Récemment, un cadre territorial comparait les élections locales au CAC 40. Lorsque les indices de la bourse passent au rouge, les sociétés en difficulté redressent la barre en annonçant un plan de restructurations. Dans le secteur public, les élus et leurs collaborateurs sont fixés sur leur sort dès que le verdict des urnes est connu. Quant aux dirigeants territoriaux, ils sont, bon gré mal gré, pris dans un jeu de chaises musicales. C'est le fameux "mercato" que les dernières élections municipales ont ancré un peu plus dans le paysage local. Ces changements constatés à la tête des collectivités descendent aussi parfois dans les étages inférieurs de la hiérarchie, semant un vent de panique. "Dans une collectivité où j'ai travaillé, les services ont brûlé leurs dossiers en raison du changement de maire", se souvient notre cadre territorial. Heureusement, le passage de témoin d'un élu à son successeur ne se passe pas toujours dans des circonstances aussi dramatiques. Le témoignage révèle cependant la profondeur du bouleversement que peut engendrer une élection. Bien sûr, ce climat est loin d'être neutre pour le responsable du personnel - dont le sort est parfois aussi suspendu au résultat de l'élection.
La nouvelle photographie des acteurs locaux ne sera en réalité complète qu'après l'élection professionnelle du 6 novembre, à l'occasion de laquelle les agents désigneront leurs représentants syndicaux. Pour les DRH chargés de l'organisation du scrutin, l'enjeu est double : il s'agit de mobiliser le personnel dès le premier tour - sous peine de second tour le 11 décembre - et d'éviter les contentieux en prenant soin de déminer les sujets sensibles (la notion complexe de représentativité syndicale, par exemple).

 

Changement de décor ?

L'adaptation du système de formation de la collectivité aux nouveaux textes constitue un enjeu beaucoup plus structurel. Le nouveau dispositif s'est mis en place progressivement : les compteurs du nouveau droit individuel à la formation (DIF) ont démarré fin février, tandis que les formations obligatoires sont entrées en vigueur le 1er juillet. La nouvelle donne en matière de formation peut être l'occasion d'améliorer l'efficacité du dispositif de formation, de le rendre plus cohérent avec les objectifs de management de la collectivité. Si c'est le souhait des élus et des responsables du personnel, un vaste chantier s'est donc ouvert.
Pour le président du CNFPT, la loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale a introduit un "nouveau modèle" marqué notamment par un dialogue plus grand entre l'employeur et l'agent. Le projet de loi attendu pour le premier semestre 2009, qui sera issu du livre blanc sur l'avenir de la fonction publique remis en avril par le conseiller d'Etat Jean-Ludovic Silicani modifiera-t-il la donne dans de telles proportions ? Ni révolution, ni conservatisme : le rapporteur conseille en fait d'emprunter la voie médiane. Le statut "demeurerait la modalité principale de l'emploi public", mais il serait "profondément modernisé", de même que le contrat qui "compléterait" toujours le statut, indique-t-il. La balle est en ce moment dans le camp du gouvernement.
La loi du 19 février 2007 a doté les collectivités locales de nouveaux outils de gestion des ressources humaines (congés pour bilan de compétences et validation des acquis de l'expérience, prise en compte de l'expérience professionnelle dans les parcours de formation, gestion active du déroulement de carrière des agents, etc.). Il n'est pas certain que la loi de 2009 sur le statut soit aussi généreuse, sauf si les parlementaires l'enrichissent. La loi vise plutôt à harmoniser les trois fonctions publiques et à moderniser la fonction publique d'Etat pour la faire évoluer vers une fonction publique de métiers. La présentation du projet de loi sera précédée à l'automne par l'adoption définitive du projet de loi relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, dont l'examen a été interrompu avec les congés. La principale nouveauté du texte, à savoir l'autorisation pour les employeurs publics de recourir à l'intérim, ne fera certainement pas l'unanimité. Enfin, le décret relatif à la protection sociale complémentaire des agents territoriaux devrait, sauf nouveau report, paraître d'ici la fin de l'année. Le texte pourrait fixer le montant minimum de la participation des employeurs qui veulent aider leurs agents à souscrire une mutuelle. Les attentes des collectivités locales sont fortes, l'enjeu étant de prévenir ou de réduire la précarité dans laquelle se trouvent certains fonctionnaires.

 

Rester attractif tout en maîtrisant la masse salariale

Une précarité liée à des situations de maladie et d'une manière générale à la faiblesse des salaires, puisque près de 80% des agents territoriaux appartiennent à la catégorie C. Or, les organisations syndicales estiment que depuis 2000, les fonctionnaires ont perdu plus de 6% de pouvoir d'achat. Rejetant ces chiffres, le gouvernement a cependant souhaité qu'aucun agent ne soit lésé. Il a proposé une garantie individuelle du pouvoir d'achat (GIPA).  En fonction de savants calculs, une infime minorité d'agents empochera ainsi d'ici la fin de l'année les quelques centaines d'euros en jeu. La refonte des grilles indemnitaires qui sera amorcée à la rentrée par les partenaires sociaux concernera en revanche tous les agents.
Alors qu'un grand nombre de collectivités éprouvent des difficultés de recrutement, l'équation emplois/salaires/indemnités devrait donner des cheveux gris aux DRH, car ils devront compter sans doute sur des arbitrages très serrés. L'année prochaine, les dotations de l'Etat aux collectivités locales évolueront en effet à un rythme inférieur à l'inflation. De plus, en juin, la Cour des comptes montrait du doigt le dérapage des dépenses de personnels des collectivités  locales, en hausse de 9,5% en 2007 - un phénomène que les transferts de compétences expliquent très partiellement - et suggérait de fixer des objectifs de dépenses (lire notre article). Dans ce contexte, les syndicats soupçonnent certains élus de vouloir mettre en œuvre, à l'exemple de l'Etat, une "RGPP" à l'échelle de leur collectivité. Un nouveau calibrage des dépenses qui passera parfois par le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

 

Thomas Beurey / Projets publics