Emploi - Emploi des jeunes : la Cour des comptes propose plus de garanties jeunes et moins de contrats aidés
Une "sélectivité des publics insuffisante", des "dispositifs lâches", un "contenu de formation limité"… dans un rapport publié le 5 octobre 2016 sur "L'accès des jeunes à l'emploi", la Cour des comptes critique sévèrement les politiques publiques destinées à l'insertion des jeunes. Au total, Etat, collectivités locales et opérateurs ont consacré près de 10,5 milliards d'euros à ces dispositifs en 2015 dont plus de la moitié est destinée à l'apprentissage (5,95 milliards d'euros), 19% aux contrats aidés (2 milliards), 14% à l'accompagnement (1,45 milliard) et 10% à la formation professionnelle continue (1 milliard). Le coût pour ce système d'aides publiques est élevé et croissant, et pourtant "les résultats obtenus du point de vue de l'accès à un emploi durable ne sont à la mesure, ni des objectifs affichés, ni des moyens mobilisés", signale la Cour des comptes dans son rapport. Seuls la garantie jeunes et les dispositifs de la deuxième chance trouvent grâce aux yeux de l'institution. La garantie jeunes, qui offre aux plus précaires une allocation financière et un accompagnement renforcé vers l'emploi et qui sera généralisé en 2017, affiche un taux de sorties vers l'emploi de 49,9%.
La Cour des comptes estime que ces solutions, parmi les plus intensives et courtes, "s'avèrent relativement plus efficaces que l'accompagnement de longue durée par Pôle emploi ou les missions locales". Et pourtant, moins d'un tiers des crédits d'accompagnement sont aujourd'hui orientés vers les modalités les plus intensives et les plus efficaces du point de vue de l'accès à un emploi durable.
En ce qui concerne les contrats aidés, la Cour des comptes estime que l'insertion des bénéficiaires est bien meilleure dans le secteur marchand que dans le secteur non marchand et que les bons taux d'accès à l'emploi (67% dans le marchand et 52% dans le non marchand) pour les moins de 28 ans "résultent d'importants effets d'aubaine" et d'un "ciblage insuffisant" vers les jeunes les plus en difficulté. Elle critique aussi le manque de formation dans ces contrats : 23% seulement des anciens bénéficiaires déclarent avoir suivi la formation prévue dans leur contrat. D'après la Dares (ministère du Travail), "trois jeunes sur quatre en emploi d'avenir ont reçu une formation", a affirmé Myriam El Khomri, ministre du Travail, à l'occasion d'une rencontre organisée le 5 octobre par l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis), en réaction aux critiques. La ministre a également précisé que "les contrats aidés dans le secteur non marchand permettent à la fois de redonner confiance à leurs bénéficiaires et d'acquérir une qualification".
Redéployer les crédits des contrats aidés vers les dispositifs les plus intensifs
Sur la question spécifique des emplois d'avenir, dont les données de sortie vers l'emploi des premiers bénéficiaires ne sont pas encore disponibles, la Cour des comptes reste aussi critique : "la priorité budgétaire qui leur a été attachée a été décidée sans que l’on sache si leurs caractéristiques de contenu et de durée, qui entraînent des coûts supplémentaires, étaient de nature à les rendre plus efficaces que les contrats aidés de droit commun", précise ainsi l'institution dans son rapport.
La Cour des comptes préconise de redéployer progressivement les effectifs et crédits des contrats aidés, et en particulier des emplois d'avenir, vers les dispositifs les plus intensifs comme la garantie jeunes, les dispositifs de deuxième chance et l'alternance. Elle propose aussi de réduire la durée des contrats aidés et de les recentrer sur les jeunes les plus éloignés de l'emploi.
"Les dispositifs sont devenus trop nombreux", assure aussi la Cour des comptes, estimant que "les différents acteurs territoriaux doivent s'unir et les démarches de concertation être renforcées, le bassin d'emploi constituant l'échelon de proximité le plus opérationnel". Elle préconise d'améliorer l'efficacité des missions locales à travers une rationalisation et une mutualisation de leurs moyens et "une démarche contractuelle comportant l'évaluation de leur performance". Elle propose aussi de donner aux opérateurs davantage de liberté dans l'utilisation de leurs moyens pour organiser le contenu de l'accompagnement, en contrepartie d'une rémunération à la performance.
Autres recommandations : assurer la traçabilité du parcours des jeunes et la mesure des résultats des dispositifs, grâce à un identifiant commun à la politique de l'emploi des jeunes, réduire le nombre de dispositifs d'accompagnement et simplifier leur contenu, et favoriser l'accès des jeunes aux formations dans leur parcours vers l'emploi.